Au même moment.

Académie de Nérinia.

Tiag Soaris n'était pas connu pour avoir de grands pouvoirs parapsychiques, contrairement à sa fiancée qui combattait actuellement avec une section d'assaut sixienne en Fankwarn occupé.

Tiag tenait un fusil mitrailleur à visée laser dans la mezzanine du dortoir dans laquel il avait dormi en tant qu’étudianttrois années durant. Ses deux amies Rennata et Mélisandre furent apparemment affectées au sommet du donjon central, mais en fait, Tiag croyait avoir entendu dire qu'elles étaient postées dans le bureau du Colonel Rigmaans, le directeur à présent en fin de mandat.

Rigmaans prononçait un discours tous les soirs dans la salle des dîners, qui était transformée en salle de guerre. La veille, il avait annoncé que les unités Retnet de droïdes étaient maintenant à trois kilomètres. Dans les petits villages alentours, côté Dallinger ou côté Clairy, des membres de la Gendarmerie Royale et des troupes régulières des Armées Fédérales se battaient pour neutraliser ces unités rutilantes. Les droïdes étaient robustes physiquement, et très bien équipés pour tuer. Il fallait souvent dix soldats des Six Royaumes pour tuer deux à trois droïdes, et encore, c’était uniquement quand les soldats humains avaient de la « chance » !

Souvent, un expert en informatique, passé par Nérinia ou la faculté de Magnaria, s'approchait au plus près des unités Retnet combattantes et parvenait à pirater leurs systèmes avec l'aide d'une tablette géocom assez puissante. Il fallait souligner que toutes les unités Retnet n’étaient pas commandées par une seule et même machine centrale. Cela eût ététrop compromettant pour les stratèges de Taknav. A la moindre panne de la machine centrale, ce seraient alors toutes les unités Retnet qui pouvaient potentiellement y passer. Il y avait donc des machineries de commande locale, charriées dans des diligences à cheval conduites par des officiers d’artillerie de l’armée régulière de Retlig. Ce furent celles-ci que des pirates informatiques sixiens parvinrent à désactiver de temps à autres, un peu partout sur la ligne de front, de Clattanni, dans le Royaume de Strani, jusqu'à Hillsbarn, à la pointe nord du Royaume de Fankwarn.

Fin Juillet 4736.

Deux mois de guerre.

Les raids de dragons chevauchés par les légionnaires TL ne cessaient point.

D'ailleurs, l'un d'eux s’approcha de Nérinia par une après-midi grise et légèrement pluvieuse.

L'officier TL Hirshönn Woldow, engagé dans la sinistre légion depuis trois ans, chevauchait une femelle dragon capturée à la même époque sur la Côte Est de Retlig. Woldow était un psychopathe comme Katarina Dartmund elle-même les appréciait : sans aucune morale, une obéissance radicale, un fanatisme politique morbide.

Woldow avait commencé comme gardien d'un camp d'internement et de “rééducation politique” dans les provinces sud de Retlig. Il avait assassiné des dizaines d'opposants politiques et d’elfes des montagnes, enterré ou brûlé les corps et expliqué très calmement à leurs proches qu'ils avaient fuit dans les Six Royaumes ou en Terre des Orgueils. Woldow était un criminel d’état, il était l'instrument du Parti, et le Parti, selon les mots de Katarina Dartmund, “dispose du droit de vie et de mort sur quiconque dans le monde entier”. Cela faisait froid dans le dos, mais Woldow considérait cela comme légitime. Il croyait en la nécessité d'exterminer une population toute entière si celle-ci était inutile à la société. Et il pensait aussi que les peuples de Retlig avaient une morale parfaite, qui devait s'imposer dans les Six Royaumes, puis en Hafar, en Térihan et en Terre des Orgueils.

Woldow effectua un dernier virage dans les airs au-dessus des villages dallingiens de Kintzbourg et de Holsterden. Sa dragonne arrosa de flammes les beffroi-temples des deux bourgades. Katarina Dartmund avait été claire : “Le culte païen sixien est décadent. Trop timoré et trop indulgent. Saccagez les beffroi-temples. Fusillez les théologiens récalcitrants en place publique, ou pendez-les à l'éclairage public.”

La dragonne de Woldow obliqua au-dessus d'une vaste forêt de sapins et passa la frontière avec le Royaume de Clairy. Nérinia fut en vue. Par télépathie, le TL ordonna à sa dragonne d'arroser d'une grosse gerbe de flammes le sommet du donjon central de l'Académie.

Si ce traître d’Holger Staviansk pouvait brûler avec.... pensa Woldow.

*

-Soaris ! Oppdenaarde ! Walton ! hurla Ignar Bram. Au Donjon central ! Dragon TL en vue !!

-Dragon TL en vue !! lança à son tour Tiag Soaris. Au Donjon !!

Ils n'eurent point le temps de gagner l'immense donjon. La dragonne d’Hirshönn Woldow avait déversé ses flammes sur les hourds boisés situés au-dessus du bureau de Rigmaans. Dans son bureau, ce dernier appela en moins de temps qu'il ne faut pour le dire des RAA -Renforts Aériens Animaux, en d'autres termes, des unités sixiennes de dragons- grâce à son petit droïde de communication.

Officiellement, les Armées Fédérales ne dressaient pas de dragons et ces créatures n'existaient plus. Divulguer des preuves de leur existence pouvait mener à la cour martiale ou bien à une cour pénale civile d'exception, mais Sire Konradius Clairy avait équipé dans le plus grand secret les armées sixiennes fédérales de dix dragons au cours des deux derniers mois, dont le jeune Nazarkhan, élevé par Ruben Rigmaans.

Les dégâts à Nérinia furent assez importants. L'école était en feu et quelques étudiants qui défendaient les lieux, volontairement, furent tués par le rayon de la mort de Woldow. La dragonne de Woldow fut mise en fuite par Nazarkhan au bout de deux heures seulement et un ballon dirigeable anti-incendie put prélever de l'eau dans le lac de Nérinia pour éteindre les flammes.

Mais l'enfer allait continuer à l'Académie. Une unité Retnet était en chemin à moins d'un kilomètre. Un ancien étudiant en troisième année promu caporal commença à pirater le système de commande de cette unité...

Tiag Soaris ainsi que Rennata Solenzara et Mélisandre Chaverny étaient toujours en vie.