Chapitre 37- Le chemin de croix

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07/07/1944

Mon cher petit Jésus,

Je n’ai pas le choix et vous le savez mieux que personne… Mais Marguerite m’a forcé à ce que j’écrive pour vous dire à quel point je souffre… Elle m’a aussi obligé à écrire une lettre à mes moines pour les rassurer... En disant que j'étais parti à un voyage d'affaires... Pourtant, j’ai… J’ai comme l’impression que ce sont mes péchés… Quand elle me fait du mal, j’ai l’impression que c’est moi le coupable et qui lui cause du tort… Cela peut paraître étrange, mais c’est ce que je ressens. Je voulais vous pardonner pour tous les péchés que j’ai commis, j’en ai terriblement honte… Vous me manquez la nuit, j’implore votre nom, mais vous n’êtes plus présent alors j’en pleure… Tous les jours… Je souffre physiquement, elle me torture pour que je lui dise la vérité… Mais je fais comme vous mon bel Agneau, je me tais et je me laisse aller… La dernière fois qu’elle est venue au cachot, c'était pour m'apporter un peu de pain et d’eau, mais je n’ai même pas mangé tellement que j’étais mal au point… La première fois qu’elle m’a fait du mal c’est lorsqu’elle m’a attaché sur une chaise et qu’elle m’a bandé les yeux… Puis, pour s’amuser, elle est allée chercher du fil à barbelé, en a fait une couronne comme la vôtre mon bel Amour, en me disant « puisque je vois que tu es attaché à ton vaurien de Dieu, je vais te faire souffrir comme lui » et me l’a posé sur la tête. À ce moment-là, j’ai ouvert grand la bouche pour en verser du sang, et chaque fils barbelé avait transpercé ma tête. Je me suis rendu compte à quel point vous aussi, vous en avez souffert lorsqu’on vous a posé la couronne d’épine sur votre tête.. Puis, elle m’en a mis dans ma bouche pour que je me taise et une dose de sang s’est emparé de mes habits… Mon âme brûlait de torture, je sentais la terrible souffrance qu’on m’affligeait, mais je savais que je le méritais, après tous les péchés que j’ai commis contre vous… J’ai essayé de me libérer, mais les fils barbelés m’en empêcheaient… Jusqu’à ce qu’elle m’ait enlevé mes prothèses et m'ait détaché les cordes. Elle m’avait ordonné de bouger, mais je ne pouvais pas, puisqu’elle m’avait enlevé les prothèses. C’est à ce moment-là qu'elle m’a déshabillé et un soldat est venu me prendre par l’épaule gauche pour me plaquer contre un pilier et me mettre une corde autour du poteau. Je n’arrivais plus à bouger… J’avais honte d’être tout nu.. Mais je repensais à vous… Elle connaissait parfaitement les scènes de vos terribles souffrances mon bel Amour… Lorsque vos bourreaux vous ont aussi attachés contre un poteau pour vous flageller.. C’est ce qu’elle a fait… Elle m’a flagellé je ne sais combien de fois… Mais la première fois que j’ai senti le premier coup, je me suis tordue de douleur, sans crier… Mes crises étaient cachés au fond de moi même… Je n’arrivais même plus à exprimer la douleur tellement qu’elle me faisait mal… C’était comme si c’était devenue une habitude de me faire du mal… Je sentais la souffrance, à chaque fois, me brûler tout le corps, pour me rappeler à quel point la chair est faible… J'ai senti cette faiblesse… À ce moment-là, on ne ressent plus aucune la joie… On fait tout pour remonter la pente, mais à chaque fois, quelqu’un nous fait rappeler qu’on est faible... Je l’ai ressentis lorsqu’elle m’avait fouetté au bout de la 80 ème fois… À chaque coup, je sentais mon corps m’abandonnait… Je tombais petit à petit au sol en conservant mes larmes… Je grinçais des dents et fermais les yeux, pour ne plus avoir mal… Mais avoir mal, qu’est-ce que c’est au juste ? C’est sentir qu’on nous plante plusieurs couteaux dans nos cœurs et qu’ils sont tellement nombreux, qu’on arrive plus à les enlever… En plus de cela, j'avais poussé un grand gémissement lorsqu'elle enfonca la couronne de fil à barbelet. À la fin de la soirée, elle avait fini par arrêter et était sortie du cachot. Je sentais le sang couler sur mon dos. Elle ne m’avait pas détaché alors, j’étais resté toute la nuit, en vous implorant de venir me sauver, mais après réflexion, je me disais au fond de moi « non Seigneur, ce n’est pas à vous de venir me sauver, je mérite ce qu’il m’arrive… Tout est de ma faute… C’est moi qui ai provoqué Marguerite... ».

Le lendemain, Marguerite m’avait prévenu que si je ne disais rien, le pire allait m’attendre, mais je m’étais tut, comme à mon habitude. Alors, elle avait organisé un nouveau jeu, comme dans les arènes… Elle m’avait posé sur une cible et dans ses mains, elle tenait plusieurs couteaux. Puis, elle avait commencé à les lancer, juste à côté de moi. Ces coups devenaient tellement violents, que je lisais dans son regard que tout ce qu’elle désirait, c’était de me voir mort, mais c’était plus fort qu’elle, de s'amuser avec moi. Elle ignorait le mal qu’elle faisait… Satan s’était emparé de son âme et en profitait pour s’amuser avec moi… Au bout d’un moment, un couteau avait touché ma côte. C’est à ce moment là, que j’ai repensé à la lance du Christ, lorsqu’un soldat avait planté sa lance de son côté droit. Quand j’avais ressenti la douleur, je n’en avais pas hurlé, tellement que j’étais sous le choc. J’attendais que quelqu’un m’enlève, mais au lieu de ça, Marguerite ne l'avait même pas retiré. Elle avait demandé à ce qu’un chirurgien m’opère, mais sans anesthésie. Très vite, on m’avait opéré, mais très mal… Chaque nuit, je revoyais Marguerite s'emparer de moi en disant que j’étais un bon à rien, que je ne ressemblais à rien, que j’étais devenu un monstre… Que tout était de ma faute si nous étions arrivés là… J’en pleurais toutes les nuits, et en plus de cela, vous m’avez abandonné mon bel Amour… Chaque jour, c’était un nouveau jeu pour Marguerite. Après le lancer de couteau, elle s’était amusée à m'électrocuter, puis après ça, elle s’amusait aussi à me frapper, à me tabasser, à essayer de me faire comprendre que je devais me suicider, à me mutiler aussi… Bref, j’en passe tellement que j’en ai honte à vous racontez tout ceci… Elle me nourrissait peu et me disait que j’étais un vilain chien si je n’obéissais pas à ses ordres. Un coup elle s’en voulait en se noyant dans l’alcool, et un coup elle se mettait en colère et me fouettait… Ce fut des jours sans fin… Tout était devenu noir… Je voyais Satan qui me menaçait chaque jour… Il prenait mon âme entre ses mains… et disait sans cesse que je n’étais qu’un bon à rien.. Que je devais mourir… Et me projetais à chaque fois dans un ravin… Il me faisait comprendre que ma vie n’avais plus aucun sens… Qu’il avait gagné et que Dieu avait perdu, puisqu’il s’était emparé de ce monde… Que plus rien n’avait de sens… Que je ne ressemblais plus à un homme mais un animal… Tout ce qu’il disait était vrai… Il me faisait comprendre à quel point j’avais changé et que je n’étais plus le père Théophane que tout le monde appréciait… Elle m’avait aussi arraché la barbe, elle m’avait coupé tous mes cheveux pour me faire comprendre que je n’étais qu’un simple prisonnier… Elle me mordait parfois, et me griffait tout le visage… Parfois, elle essayait de m’étrangler, jusqu’à ce qu’elle redevenait elle même en disant que c’était horrible ce qu’elle faisait, mais elle changeait très vite en disant qu’elle devait continuer… Je ne voyais plus du tout la lumière du jour, chaque nuit était devenue des nuits blanches… J’entendais plusieurs voix me parlaient en même temps en revoyant Marguerite me torturait l’âme… Je bougeais dans ma cellule, en la voyant d’un seul coup gentil avec moi et d’un seul coup, très méchante… Ma croix était devenue bien lourde à ce moment là… J’essayais encore de la porter, mais elle me la faisait tomber en disant que c’était mal ce que je faisais… Que je devais cesser d’aimer le bon Dieu et que je devais l’aimer elle… Que je devais m’agenouiller devant sa grandeur, qu’elle était plus puissante que Dieu.. Mais je lui faisais comprendre à quel point Dieu nous aimait tous profondément, mais elle ne m’avait pas cru…


* * *


Marguerite était assise sur une chaise, pendant qu’un soldat m’avait plongé la tête dans une bassine d’eau. Lorsque j’étais à deux doigts de m’évanouir, elle lui avait ordonné de me relever. Le cœur battant de droite à gauche, j’avais pris une grosse bouffée d’air avant qu’il me remette la tête sous l’eau… J’étais à bout de souffle, j’avais de gros hématomes, elle m’avait déboité une épaule gauche qui ne répondait plus du tout à mes commandes… J’avais du sang partout sur tout le long de mon corps, séché… Des anciennes blessures ne s’étaient pas encore totalement renfermées… J’en tremblais de tout mon corps… Jusqu’à ce qu’elle dise au soldat qu’on allait passer aux choses sérieuses. Elle m’avait conseillé à ce que je dorme bien cette nuit, mais comme la faim me guettait, je ne pensais qu’à manger… J’étais en train de devenir fou, mon corps était effrayant à voir… Je ne savais pas du tout combien j’avais perdu de kilos…. Mais je ressemblais à un squelette… Mes pensées partaient dans tous les sens, je les entendais me dire de me tuer… Je ne voulais pas l' écouter, je priais encore en vous implorant de me sortir d’ici, mais je me disais à chaque fois que c’était MES péchés et qu’il était MON devoir de les réparer ! J’avais passé une très mauvaise nuit en attendant au pire… Le lendemain, après six mois à être resté au cachot, un soldat m’avait sorti de la cellule en me disant que je devais me rendre dehors. Pour la première fois, la lumière du jour avait frappé mon visage. J’en fus tout ébloui, jusqu’à ce qu’un autre soldat m’avait demandé de mettre ce bout de tissu pour couvrir le bas. Ils m’avaient dirigé vers une croix qu’ils avaient construite, au sol. Pleins de gens s’étaient alignés dans le grand jardin en tenant des cailloux. Ce fut ma plus grande humiliation lorsqu’ils m’avaient vu à moitié nu. Pour me faire souffrir davantage, Marguerite m’avait rit au nez en me disant qu’elle allait me faire humilier comme Jésus-Christ et que c’était une joie de le faire. Aussitôt, un soldat, que je vis soudainement en romain, m’avait ordonné de prendre la croix. Il avait mit une corde autour de mon cou pour que j’avance, mais comme je n’avais pas les prothèses, ce fut très compliqué… C’était très humiliant de ramper au sol, lorsque je passais devant les autres qui ricanaient à mon nez… Puis, un soldat avait eu l’intelligence de me plaquer un clou derrière mon dos pour que je transporte plus facilement la croix. Lorsque le premier clou avait transpercé la croix et mon ventre, j’en avais craché aussitôt du sang et m’étais effrondré… Entendre les rires et en plus de cela, sentir les cailloux me percutaient la tête, me faisaient pleurer… J’avais envie de fuir, loin, très loin de toute cette honte… Mais j’avançais, en pensant à vous mon bel Amour lorsque vous aviez porté votre croix… Je vous imitais, mais en rampant au sol… Avec la croix clouait derrière moi… Les gens me crachaient au visage et d’autres me jetèrent de la boue. Je ne faisais pas attention, car mon objectif était de porter tous mes péchés… Puis, j’étais tombé une deuxième fois au sol, lorsqu’un soldat avait eu le malin plaisir de m’écraser en sautant sur moi. Je sentais tout le poids de son corps contre mon dos et hurlais à l’intérieur de moi. Puis, celui qui me tirait, m’avait ordonné d’avancer, mais je n’en avais plus la force… Il avait insisté en me tirant par le cou et aussitôt, je n’avais pas eu d’autre choix que de ramper encore… Lorsque ce fut mes dernières forces, j’avais demandé aux soldats que je n’y arrivais plus. Il avait rouspété en me portant sur ses épaules et m’avait emmené jusqu’à la colline. Lorsqu’ils plantèrent les cloux dans mes deux mains, Marguerite avait écrasé son pied contre le clou qui transperçait mon ventre. J’avais poussé un petit gémissement lorsqu’ils avaient soulevé la croix. Et là, ce fut le début d’un grand calvaire… Pendant 6 heures j’étais resté cloué sur cette croix, en repensant à vos paroles mon bien-aimé « mon Dieu mon Dieu, pourquoi m’avez vous abandonné ? » « je suis un monstre, je ne ressemble plus à rien, ils rient et hochent de la tête » « mon âme est triste à en mourir » « je ne suis rien sans vous mon amour, rien du tout... » « c’est parce-que vous avez souffert de nos péchés, que j’en souffre aussi cruellement » « je le fais par amour » « venez vite me secourir, venez vite... » « je n’ai plus la force, je ne ressemble plus à rien » « pardonnez-leurs parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font ». J’avais tourné la tête vers ma gauche lorsque je vous avais vu sur une croix. Je voulais vous parler, mais vous aviez déjà rendu votre esprit… Jusqu’à ce que j’avais cru que c’était à mon tour, en inclinant ma tête vers le bas…

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