Chapitre 1 - Première scène

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Mes bottes rencontrèrent enfin le sol pavé de la cour et je poussai un soupir de soulagement. 

— Caravaire, dernière cité d’Esnil avant la frontière. On y est presque Mano ! 

Comme s’il partageait ma joie, le hongre alezan me bouscula d’un coup de tête. Un éclat de rire m’échappa, et je me tournais fièrement vers les immenses façades en pierres de la cité. 

Autour de nous, tout était nouveau, surprenant, déroutant. La foule grouillait dans chacune des artères de la ville, dans une lourde cacophonie. Ralliement de marchands, râles de mendiants, mélodies enjouées, crissements de vaisselle et d’acier… fascinée par tant de détails, de couleurs et de mouvement, je restais sur place un instant et m’étirais longuement.

— Bienv’nue dans le ventre du Val’har, gamine. 

La grosse voix qui surgit derrière moi me fit sursauter et je pivotais avec maladresse. Je me retrouvais face à un colosse, qui devait bien faire deux têtes de plus que moi. Une vilaine cicatrice couvrait son crâne, brillant de sueur et de crasse. 

— Le… ventre du Val’har ? répétais-je, intriguée. 

Ses lèvres s’étirèrent en un rictus qui m’arracha un frisson. 

— Ici, pas d’frontières, pas d’bannières. Mercenaires Esniliens, brigands Bélégores, commerçants du Fjeld… tu viens d’mettre tes pieds dans une sacrée fourmilière. 

— Hmmm… De toute façon, je ne compte pas m’éterniser, dis-je en glissant ma main sur l’encolure chaude de Mano. 

L’inconnu me tendit son énorme paluche et agita ses doigts sales. 

J’hésitais un instant puis la lui serrai avec fermeté, comme Matt me l’avait appris. 

— Je suis Ellie. Et vous ? 

Il leva un sourcil et s'esclaffa. 

— Moi, j’suis palefrenier. 

Mes joues s’embrasèrent lorsqu’il attrapa les rênes de ma monture et m’annonça le prix de ses services. 

— T’es pas du coin, hein ? lança-t-il après que je lui ai donné deux écus.

Je rangeais ma bourse dans ma saccoche, effleurant au passage l’enveloppe parcheminée qui se trouvait à l’intérieur. Son contact m'insuffla un peu de courage, me rappelant que dans moins de trois jours j’aurai achevé mon voyage. 

— De Colcourt, ce n’est pas si loin, rétorquais-je, toujours vexée. 

— À d’autres, gamine ! Viens pas m’faire croire que t’es du nord. 

Ce genre de remarques m’étaient parfaitement familières. Je les entendais quotidiennement depuis dix sept ans. Il est certain que ma petite taille et mes boucles brunes contrastaient avec la stature imposante et les cheveux dorés des habitants du coin… je me contentais donc de lui lancer un sourire défiant.

Ici, pas d’frontières, pas d’bannières, c’est bien ça ?

L’homme passa sa langue sur ce qu’il restait de ses dents et rit à nouveau. 

— Elle apprend vite… elle voyage seule ? 

J’écartais aussitôt le pan de mon manteau et dévoilais mon baudrier. Un poignard que j’avais dérobé à Matt y était accroché.

— Jamais, répondis-je sur un ton que j’espérais suffisamment ferme.  

— Bien… on verra s’tu passes pas la nuit. L’cas contraire, j’vendrai ton canasson ! déclara-t-il en se tournant vers les écuries. 

Entraîné dans son sillage, Mano s’ébroua et jeta un dernier coup de tête dans ma direction. 

— Puisse Pyros vous être clément à vous aussi ! lançais-je, déroutée. 

Impatiente de découvrir la ville, je jetais ma besace sur mon épaule et m’engageais vers l’allée principale.

— À nous deux, Caravaire… 

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