Chapitre 1 - Scène 4

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Le coeur battant à toute allure, j’en profitais pour me dégager de sa prise et reculais dans la pièce, faiblement éclairée par un feu de cheminée. 

— Alors chaton, tu veux sortir les griffes ? 

Il s’avança et les planches du parquet gémirent sous son poids. J’avais peur, et cette idée m’était insupportable. Je portais impulsivement la main à mon baudrier et dégainais mon poignard. La surprise se dessina sur son visage, mais elle ne fut que de courte durée. Ma main tremblait et mes appuis étaient instables. Il prendrait vite le dessus et en était parfaitement conscient. Je déglutis et l’observa faire un pas de plus, tel un prédateur vers sa proie. L’excitation dans ses yeux provoqua une vague de dégoût en moi, et je frappais une première fois. 

Il esquiva, narquois. 

Pique en circulaire, comme un crochet du droit, m’avait expliqué Matt une bonne centaine de fois. Vise entre les côtes et touche le coeur ! 

Je me concentrais et frappais une deuxième fois.

Pas assez rapide… 

Au moins, cette fois, je lui avais entaillé le bras. Il poussa un juron et envoya un coup sec sur mon poignet. Le choc me fit lâcher l’arme, qui vola jusqu’à l’autre bout de la pièce. Sidérée, je ne vis pas non plus venir l'uppercut qu’il planta dans mon estomac. Je tombais à genoux, le souffle coupé. 

— Petite garce ! hurla-t-il en m’envoyant une gifle. 

Je secouais péniblement la tête pour m’efforcer de garder mes esprits. L’homme était planté devant moi, prêt à réitérer son geste. Les poumons brûlants, je pris appui sur un pied et me jetai sur ses jambes. Il bascula vers l’arrière, se cogna la tête contre l’âtre de la cheminée et poussa un grognement féroce. 

Derrière-nous, la porte s’ouvrit brusquement et Tylia entra, furieuse. 

— Je peux savoir ce qu’il se passe ici ?

Ses yeux passèrent du poignard à nous, en passant par le plancher tâché de sang. Elle s’avança et saisit mon menton entre ses doigts chauds. Ils sentaient le tabac froid. Si proche, je réalisais qu’elle devait bien avoir quarante ans. Avec ses yeux en amande et sa peau laiteuse, elle était probablement la plus belle femme que je n’ai jamais vu. 

— Qu’est-ce que je t’avais dit Wayde ? vociféra-t-elle en se retournant vers l’homme. Pas de ça sous mon toît ! 

Il se releva, un sourire arrogant aux lèvres, et se frotta le crâne. 

— Allez Tylia, me dit pas que t’aimes pas quand c’est sauvage… sinon, pourquoi tu te pavanerais avec ton barbare ? 

Ce n’est que lorsque il le mentionna que je remarquais sa présence. Resté accoudé à l’embrasure de la porte, le jeune homme scrutait la scène, impassible. 

— Vire ta sale carcasse de mon établissement.

— J’en ai pas fini avec elle, rétorqua-t-il en me désignant d’un coup de menton.

Je me redressai à mon tour, prête à riposter, mais Tylia n’en m’en laissa pas l’occasion. Elle s’interposa entre nous, les poings plantés sur ses hanches larges.

— Mémorise bien mon visage, maquerelle. Un de ces jours, c’est probablement le dernier que tu…

Il ne finit pas sa phrase et esquissa un rictus de douleur. La femme venait de le saisir par l’oreille, comme un enfant que l’on réprimande. J’avais presque envie de rire.

— Souviens-toi à qui tu t'adresses. 

Le brigand leva finalement les mains et se laissa diriger vers la porte, non sans me lancer un regard assassin. 

— Tu vas me le payer…

— Terminé ? lâcha froidement le jeune homme.

Je vis Wayde hésiter à lui tenir tête, mais il se contenta de marmonner quelque chose du genre “je connais le chemin” en passant devant lui. 

— Les soldats ne vont pas tarder à venir faire leur descente, lâcha Tylia. Tu dois partir, Logan. 

— Je prendrai la sortie habituelle, répondit-il placidement, prêt à tourner les talons. 

— Attends. 

Elle effleura de nouveau le visage, sortit un mouchoir de son corset et tamponna minutieusement ma lèvre. La douleur me fit comprendre qu’elle était ouverte.

— Ce gros lourdaud et ses sbires l’attendront probablement en-bas, reprit-elle, emmène-la avec toi.

Mon cœur loupa un battement et le jeune homme poussa un soupir impatient. 

— Si elle tombe, ce ne sera pas mon affaire. 

Tomber ? Comment ça, “tomber” ?

— Merci, mais je me débrouillerai seule… assurais-je sans en être certaine. 

Elle fronça les sourcils et pointa un doigt menaçant vers moi. 

— Écoute-moi bien, petite : si te faire tuer ne te dérange pas, grand bien te fasse, mais cela n’arrivera pas à La Petite Régente. J’ai horreur de ce genre de désagréments, c’est compris ?

Le ton de la maquerelle était si autoritaire que je me surpris à hocher la tête. Elle ramassa mon poignard, le mis entre mes mains et me poussa vers le jeune homme.

— La prochaine fois que tu mets les pieds dans une maison de luxure et que tu en perturbes les plaisirs, c’est moi qui aurai ta peau. 

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