La fille aux écouteurs

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J’imagine une fille, avec ses écouteurs blancs dans la cour du lycée. Ses cheveux bruns sont réhaussés en queue de cheval. Elle n’a pas de sac, pas d’objets lui encombrant les mains. Elle est vêtue d’un simple pantalon bleu et d’un gilet gris. De petite taille, elle ne devrait pas attirer l’attention.

Sauf que tout le monde l’observe.

Elle n’a pas de maquillage, ne semble ni belle, ni laide. Elle ne porte pas de bracelets ou de bijoux. Elle n’a pas d’amis. Elle ne parle pas. Ses vêtements ne sont pas à la mode, mais pas déchirés ou usés non plus. Elle ne porte pas de lunettes.

On ne voit pas ses yeux, qu’elle a laissé fermés.

Personne ne devrait tourner la tête pour la regarder passer.

C’est pourtant un jour d’Automne comme les autres. Il a plu, encore une fois ce matin. Un petit vent s’infiltre de temps en temps dans les vestes fermées. Les nuages, comme d’habitude, voilent le ciel. Les élèves et les profs sont au rendez-vous, décimés aux quatre coins de l’établissement. Les cours se déroulent normalement, et la sonnerie, stridente, ne manque pas de crier toutes les heures.

Les garçons sont toujours en bande et en tenue de sport. Les filles, toujours vêtue à la dernière mode, racontant les potins. Les studieuses étudient encore sous les arbres.

Un jour

Comme

Les autres.

Sauf un détail :

La fille aux écouteurs danse.

Elle a d’abord tapé discrètement du pied, balançant la tête en rythme.

Puis, doucement, elle a sorti les mains de ses poches. Elle a commencé à marcher, toujours en rythme. La musique la détend, l’empêche de penser.

De plus en plus, ses craintes,

Ses peurs disparaissent.

Elle s’avance,

Et pour une fois,

Se lâche complètement, sans retenue.

Elle bouge, portée par une mélodie que les autres n’entendent pas. Elle se fond dans la musique. Ses pas s’enchainent de plus en plus vite, avec élégance et harmonie. Ils s’arrêtent parfois, pour reprendre leur ballet presque en suivant.

Les filles ont arrêté de rigoler.

Les garçons ont arrêté de les reluquer bêtement.

Les profs ont arrêté de marcher.

Tout le monde la fixait avec surprise et curiosité.

Son portable est soudain tombé, ses écouteurs se détachant. La musique est apparue brusquement, se fondant avec la danse. La fille, les yeux fermés, ne s’est pas arrêté un seul instant de danser. Chacun de ses mouvements, hypnotiques, se cale parfaitement sur les notes. Elle n’a pas conscience d’être entourée. Elle est ailleurs, dans un monde inconnu des autres, transportée par ses enchainements.

Le rythme ralenti, et la fille aussi. Lentement, sur la dernière note, elle lève son bras, pour le ramener contre son cœur, le regard perdu vers le ciel encore gris. Elle finit par ouvrir les yeux.

Le rouge lui monte aux joues quand elle découvre l’attroupement qui s’est formé autour d’elle.

Le silence est pesant.

Et, finalement,

Quelqu’un se met à applaudir.

Petit à petit les autres suivent. Les filles. Les garçons. Les studieuses. Les profs.

Un sourire timide mais merveilleux se dessine alors sur le visage de cette fille. S’il commence à pleuvoir dehors,

Dans sa tête, il fait un temps fabuleux.

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