Un grand fracas manque de provoquer chez moi une crise cardiaque qui me fait bondir hors du lit. 3H33 exactement, heure miroir. J'en ai des frissons.

Mais qui peut bien tambouriner à ma porte à cette heure-ci ? Ma tête me fait mal, sûrement à cause des odeurs et du manque d'oxygène qui ont le même effet sur mon crâne. Il paraît que les encens sont cancérigènes, maintenant je comprends pourquoi.

Pour couronner le tout, le ciel étoilé a laissé place à un tonnerre hurlant de mécontentement ; le vent siffle dans mes oreilles, la pluie bat à tout rompre. Dehors, le noir complet, seul un réverbère ose faiblement éclairer la boutique. Rapidement, je me dirige vers la porte d'entrée qui cache une ombre effrayante, en l'occurrence celle d'un homme que je devine à la charpente et la taille. J'hésite un instant avant de réaliser qu'il me supplie de lui ouvrir : sûrement un voyageur que la tempête a pris par surprise. A l'instant T, je ne peux m'empêcher de me mettre à sa place.

"Attention à tes vieux réflexes", je pense tout haut – sans comprendre que mon nouvel invité n'a rien perdu de la partie, à en voir son sourire en coin – ma bouche à moi, elle, retenant un bâillement à en décrocher la mâchoire. Encore sur le paillasson, la porte entrouverte il m'annonce :

— « Bonjour Madame, merci de m'accueillir, et pardon pour l'heure, mais je me trouve actuellement en... galère.

— Aaah, mumm. Oui, je m'en doute ; bonjour. Que vous arrive-t-il ? Je peux vous aider ?

Alors que je referme d'un coup sec la porte derrière lui avant de laisser le vent s'engouffrer et détruire tout sur son passage, je me surprends à l'observer : sa barbe bien taillée m'impressionne, il ne me donne pas du tout l'air d'être inconvenant. Et ses cheveux de jais, qui laissent perler des gouttes d'eau sur ses lèvres que j'ai envie de... Mais à quoi tu joues Eléna ?

Je t'ordonne d'arrêter tout de suite !