Un aigle au tapis

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Malgré le système de chauffage, Piotr était frigorifié. Aucun effet de vol n’avait été emporté pour opérer en altitude et, malgré les demandes répétées, ceux laissés en Rutharnie tardaient à parvenir. Les dépôts ennemis, dans les villes conquises, avaient été soigneusement vidés, pillés ou détruits. L’objectif, la ligne de défense soviétique courrant de Tetïiv à Haïssyn, approchait et l’environnement devint hostile. Des flocons noirs d’éclatement d’obus anti-aérien et leur bruit sourd apparurent. Ivan se défendait des regards indiscrets ; et il avait bien raison car, dix jours après le lancement de la nouvelle offensive, les Allemands prévoyaient une proche attaque dans ce secteur.

Le pilote enclencha le commutateur de l’appareil photographique. La partie la plus délicate de la mission commençait : il fallait désormais voler en ligne droite, à vitesse et altitude constantes pour obtenir une parfaite netteté et un bon recouvrement des clichés. Dans cette atmosphère malsaine et turbulente, c’était une épreuve pour les nerfs. Car l’avion devenait une cible facile à ajuster. Sa trajectoire devenant totalement prévisible, il était facile pour les observateurs au sol de calculer l’orientation que les pointeurs devaient donner à leurs pièces et le délai avec lequel les artificiers allaient régler les fusées des obus. Sanglé à son poste de pilotage, Piotr suait à grosses gouttes malgré le froid ambiant et luttaient contre ses réflexes de survie, qui lui intimaient l’ordre de tenter des manœuvres évasives. Dans sa tourelle, tout en surveillant d’un œil le ciel et de l’autre l’appareil photographique, Volpovski récitait une longue litanie de prières, s’adressant au Seigneur, à la vierge Marie et à tous leurs saints. Il évitait soigneusement de regarder par l’ouverture ménagée dans son plancher, pour ne pas apercevoir les éclairs lumineux des départs de coups.

Peu à peu, les nocifs petits nuages noirs d’éclatement resserraient leur étreinte, se montrant de plus en plus menaçants. Leur grondement sourd et les secousses qu’ils occasionnaient venaient torturer les nerfs de l’équipages déjà mis à rude épreuve. De temps à autres, un éclat venait frapper le revêtement du fuselage avec un bruit sec. Soudain, un son plus intense que les autres se fit entendre ; il fut suivi de nombreuses répercussions, comme la grêle martelant une vitre. L’avion sursauta, son équipage aussi ! ils rentrèrent instinctivement la tête dans leurs épaules. Après avoir lâché un juron de surprise, Piotr jeta un coup d’œil à ses instruments : rien d’anormal n’était à signaler.

— Volpovski, rapport avaries : où a-t-on été touché ?

— J’en sais rien, je pense que c’est l’arrière du fus’ qu’a pris.

— Je ne vois pas de fuite de carburant, continua le pilote après avoir scruté attentivement sa jauge. J’espère que c’est pas les commandes qu’ont trinqué.

— On en a encore pour longtemps ? demanda d’une voix tremblante Volpovski.

Son cocher n’eut pas le temps de répondre qu’un nouvel obus éclata avec un bruit terrifiant. Le moteur cessa de ronronner régulièrement et la carlingue se mit à vibrer. Un coup d’œil rapide aux instruments informa Piotr que la puissance chutait. Déjà, sans qu’il ne puisse rien y faire, l’appareil perdait de la vitesse et de l’altitude, tout en tressautant au rythme des soubresauts du quatorze cylindres Piaggio.

— Le moulin a trinqué, on se tire de là, commenta-t-il d’une voix neutre.

— Le moulin va tenir le coup, tu crois ?

— Faudra bien.

La musique arythmique et inquiétante du propulseur, obligea le sous-officier à diminuer la puissance. Irrémédiablement, le Breda se dirigeait vers le sol, poursuivi par la meute hargneuse des flocons noirs. En jouant du palonnier, le pilote parvenait encore à modifier la trajectoire de son appareil endommagé, mais il ne pouvait pas faire grand-chose pour changer d’altitude. Les deux hommes n’avaient pas fini de transpirer. Pour l’instant, il était encore possible de rejoindre les lignes amies et de s’y poser… Si le Piaggio daignait toutefois fournir les efforts qu’on attendait de lui. À l’arrière, les appels à la miséricorde divine redoublèrent.

Soudain, dans le ciel sans nuage, une petite barrique ailée descendit du Soleil. Volpovski l’aperçut au dernier moment. Il commençait à rapporter la mauvaise nouvelle, qu’une rafale de plomb frappa le Breda éclopé. Malgré un virage dérapé, Piotr ne put éviter cette giclée destructrice. Au milieu des « gong » et des « clang » des balles lacérant la tôle de duralium et les éclatement plus sonores des obus résonnant dans le fuselage, Piotr entendit dans ses écouteurs les cris de douleurs de son mitrailleurs. Pressentant le pire, il appela son camarade par le téléphone de bord… sans succès.

Avec un moteur endommagé et un mitrailleur aux abonnés absents, la seule chance de Piotr résidait dans une spirale descendante. Mais une seconde bordée vint frapper le fuselage avant qu’il n’eût le temps d’entamer cette manœuvre évasive. Cette fois, l’ennemi avait dût se rapprocher, les parois du poste de pilotage furent constellées d’impacts et de trous. Le tableau de bord vola en éclats, projetant morceaux de verre et de métal vers le pilote. Une douleur aigue le saisit d’ailleurs à l’épaule et au bras. Il vit rapidement sa dernière heure arriver.

Tournant la tête à gauche et à droite pour tenter d’apercevoir la prochaine attaque, il aperçut deux flèches argentées fondre du ciel. Un staccato de détonations étouffées suivit, dans ses arrières. Reportant son regard de l’autre côté, Piotr eut alors la surprise et le soulagement d’apercevoir un chasseur Messerschmitt 109 qui volait à ses côtés. C’était la première fois que le jeune rutharne en voyait un d’aussi près. L’appareil était d’une élégance rare avec des lignes très pures, un fuselage et des ailes d’une finesse exemplaire. Son nez était une gracieuse ogive soulignée de jaune et dont la volumineuse casserole d’hélice bicolore était la clef de voute. Avec son disgracieux Breda complètement déglingué, il avait l’air d’un mendiant demandant l’aumône à un riche chevalier. À travers sa verrière anguleuse, seule concession à la laideur, le pilote allemand au visage dissimulé par un masque inhalateur et une paire de lunettes de vol s’enquit de sa situation par gestes. Il indiqua ensuite à Piotr, qu’avec son ailier, ils allaient l’escorter. Puis, avec grâce, il effectua un virage ascendant, dévoilant la forme trapézoïdale de ces ailes, terminées par un saumon harmonieusement arrondi. La peinture jaune appliquée aux extrémités de la voilure faisait particulièrement ressortir ce détail, le reste étant d’une teinte gris-bleu clair se confondant avec l’azur du ciel. Il n’y avait pas à dire, les ingénieurs du professeur Messerschmitt avait rendu une copie quasi-parfaite avec ce chasseur.

Rassuré par la présence de ces deux anges gardiens, Piotr put désormais se concentrer sur son vol. Malgré la douleur et l’engourdissement de son bras gauche, il essaya de maintenir son appareil en vol. Ce dernier se montrait de plus en plus récalcitrant et les deux mains de son cocher n’était pas de trop pour le retenir. Le moteur semblait avoir pris davantage de plomb. Piotr tenta de nouveau d’entrer en contact avec Volpovski… mais ce dernier ne répondait toujours pas. La jauge de carburant, miraculeusement épargnée, baissait anormalement, signe qu’au moins un des réservoirs avait été percé lors de l’attaque des chasseurs soviétiques. Il était malheureusement impossible de savoir duquel il s’agissait. Pour être sûr de ne pas manquer, le pilote rutharne ouvrit donc le robinet du réservoir secondaire : l’aiguille de la jauge remonta mais pas autant qu’il ne l’avait espéré. Elle reprit ensuite sa chute angoissante. L’altitude diminuant également, les volets du capot furent ouverts pour éviter une surchauffe du moteur. Mais ce dernier expirait déjà son dernier souffle : l’aiguille de la jauge avait presque terminé sa chute. Il se mit bientôt à hoqueter dans de formidables détonations faisant penser à des coups de feu. Puis le silence ne fut troublé que par le bruit de l’air glissant sur la carlingue et s’engouffrant dans ses nombreuses meurtrissures. L’hélice tournait dans le vide, brassant inutilement l’air ; Piotr la mit difficilement en drapeau, à cause de son bras blessé.

La fin du voyage était proche, jamais il n'atteindrait le terrain de Proskurivka. Inexorablement, le bombardier perdait de l’altitude. Jetant convulsivement un œil par la verrière à moitié éclatée, le pilote inquiet tenta de se repérer. Il espérait bien avoir franchi les lignes ou être en passe de le faire. La perspective d’être capturé par les soldats de l’Armée rouge ne l’enchantait aucunement. Il était, du reste, certain que cela équivaudrait à une exécution sommaire mais pas nécessairement propre et sans douleurs. Il était en effet revenu aux oreilles des aviateurs, qu’avec celles des tankistes, leur têtes étaient plus ou moins mises à prix d’office.

L’altitude diminuait toujours et les détails se précisaient davantage. Des lueurs de départ de coups, signe des emplacements d’une batterie d’artillerie camouflée dans les bois, puis les balafres sombres et zigzagantes de tranchées, un espace vide d’où émergeaient quelques geysers de terre et de fumée… Piotr souffla de soulagement et sentit son corps se détendre. Restait maintenant à trouver un coin pas trop mal pavé pour y atterrir le moins mal possible. Là, sur sa droite, entre les restes d’un village anéanti et un bosquet effeuillé. Délicatement et avec lenteur, l’oiseau blessé vira pour s’aligner dans la longueur de la prairie. Au sol, une arme automatique aboya, lui envoyant une ultime rafale de projectiles avant de se taire. Le sol défilait, les troncs décharnés et les ruine de mazanka découvertes passèrent sur ses côtés. Une dernière prière au Seigneur pour que la mésaventure ne se termine pas mal et ce fut le choc du contact brutal avec le sol. Projeté en avant, l’épaule gauche meurtrie par la bretelle du siège, Piotr regardait maintenant avec impuissance le fond de l’herbage se rapprocher tandis que son appareils glissait en cahotant sur le sol irrégulier, dans un bruit de tôle froissée. Pourvu qu’il ne fasse pas un « casse-croûte collimateur » comme cela arrivait parfois.

Le silence régnait enfin. Piotr était vivant et conscient. Au-dessus de sa tête, un des deux Messerschmitt tournait en ronronnant. Le Rutharne ôta son masque inhalateur, puis, de sa main droite, il dégrafa son harnais et tenta de se lever. Sa tête heurta les restes de plexiglas de sa verrière, qui lui rappela ainsi brutalement son existence. Après l’avoir repoussée vers l’arrière avec difficulté, il se glissa péniblement à l’extérieur et salua son protecteur, qui interrompit sa danse de rapace. Le pilote se retourna alors pour aller s’enquérir de la santé de son mitrailleur.

La tourelle pyramidale était complètement éclatée. Seule son armature métallique avait survécu à l'attaque : les panneaux de plexiglas avaient tous éclaté sous les balles des chasseurs soviétiques. Autour, de nombreux impacts, parfois précédés d'éraflures claires, indiquaient un certain acharnement de ses adversaires. Son cœur se mit à battre plus lourdement : ce spectacle n'augurait rien de bon. Abreuvé de sang, dopé par l'afflux de cortisol, le cerveau du pilote tournait à plein régime pour se préparer au pire. Il se rapprocha lentement. Le vert fade de l'intérieur de l'habitacle de Volpovski était éclaboussé de taches rouges, plus ou moins oblongues. Alors qu'il avançait, les mouchetis carmin se multipliaient, laissant présager le pire. Le corps du mitrailleur était toujours invisible.

Piotr avait maintenant presque atteint le rebord de la tourelle. Il s'apprêtait à poser ses mains dessus et s'y appuyer pour regarder vers l'intérieur. Mais une voix à l’accent guttural l’interrompit :

— Hände hoch ! Schnell !

— Nicht schiessen : Ich… Rutharnien… nicht Russen ! lança Piotr après s’être retourné avec précaution et en levant son seul bras valide.

Face à lui, quelques soldats allemands, au visage sale et à l’uniforme couvert de poussière, le braquaient avec leur fusil. Devant, l’un d’eux, armé d’un pistolet mitrailleur, affichait une mine patibulaire qui montrait clairement qu’il n’hésiterait pas à tirer. Ses traits étaient tirés, ses yeux mi-clos injectés de sang et soulignés de cernes. Le pilote rutharne ne pouvait que faire le rapprochement avec son saut en parachute lors du précédent conflit. L’histoire semblait se répéter avec une déplaisante ironie.

— Guck mal, Herr Feldwebel, ein zweiköpfiger Adler auf der Drift, lança un jeune soldat en pointant le vautour bicéphale ornant la dérive du Breda.

— Alles Gutt ! commenta le sous-officier à la mitraillette en ordonnant à ces hommes de baisser leur fusil avec son bras. Feldwebel Günther Hochmeister, se présenta-t-il d’une voix plus sympathique en tendant un paquet de cigarette. Sie sind verlezt ! s’inquiéta-t-il ensuite en pointant l’épaule et le bras ensanglanté du pilote. Hans, bring den Sanitätsoldat ! commanda-t-il à l’attention d’un de ses hommes.

Piotr opina du chef et, rassemblant les quelques bribes d’allemand qu’il connaissait, ajouta :

— Mein Kamerad, auch…

D’un geste le sous-officier allemand envoya un de ses hommes regarder l’endroit que pointait le pilote. Mais aussitôt un sifflement strident se fit entendre, suivit d’une explosion à proximité, soulevant poussière et terre séchée. D’instinct, les fantassins s’étaient aplatis au sol. Leur sous-officier s’était jeté sur Piotr pour le plaquer au sol. Un second obus tomba à proximité : visiblement l’artillerie soviétique tenait à achever le travail de ses camarades de la défense anti-aérienne.

— Zurück ! hurla le chef de groupe, entre deux explosions.

Malgré les protestations du pilote, les hommes en vert-de-gris se replièrent sous l’averse d’acier et l'emmenèrnt avec eux. La progression ne fut pas aisé. Les soldats progressaient par bon. À chaque éclatement, ils se couchaient à plat ventre. Parfois, une grêle de terrer retombait sur les casque ou les corps. Le soldat qui guidait Piotr, bien plus à l'aise que lui dans cet exercice, le tirait et le plaquait sans ménagement, sans aucune considération pour sa blessure. À la douleur, s'ajoutait le sifflement strident des obus puis le bruit assordissant des explosions. La peur d'être tué et le stress de l'instinct de conservation augmentaient le rythme de son cœur, plus que l'effort physique. Dans cette course effrénée pour la survie le salut vint du ciel. L'air feula au passage des tirs de contre-batterie allemands et, bientôt, le silence se fit. Combien l'aviateur aurait aimé le savourer ? Ces anges gardiens ne lui en laissèrent pas le temps et l'entraînèrent vers le village que les canons russes délaissaient pour se défendre.

Après avoir contourné les postes de défenses, on allongea Piotr sur une table, dans la maison à moitié en ruine où se tenait le poste de commandement. Le soldat à la mitraillette s'entretint avec un autre qu'il appelait « Leutnant ». Le secouriste de la section, reconnaissable à ces grosses pochettes remplaçant les cartouchières et son brassard blanc à croix rouge, s'approcha. Après un rapide examen, il s'occupa de ses blessures. Ses moyens étaient minces : des compresses et une bande pour faire un pansement compressif en attendant mieux. Un bout de tissu de la cominaison de vol servit à faire une écharpe provisoire. Après quelques mots rassurants et un sourire, il repartit aussi vite qu'il était venu, appelé par une nouvelle urgence. Le jeune pilote etait frustré de ne pouvoir demandé qu'on retourne chercher son mitrailleur. Il avait l'impression d'observer une ruche depuis l'extérieur, d'être étranger à cette communautée. L'officier tenta bien de nouer un dialogue, mais Piotr ne connaissait pas assez l'allemand pour discuter et argumenter. Tout ce qu'il put tirer fut une cigarette, qu'il fuma sans entrain ni goût. Puis son interlocuteur fut appelé par l'opérateur radio.

Après un bref change entre les deux hommes, les ordres claquèrent. Tout le monde s'activa pour récupérer matériel et armement. Un motocyclistes en imperméable de caoutchouc vert attrapa Piotr par son bras valide et l'attira vers l'extérieur. Il le jeta plus qu'il ne l'aida à s'asseoir dans le sie-car de son véhicule. Ils démarra en trompe et tous deux empruntèrent une piste poussiéreuse. Ils remontèrent une colonne de chars et de véhicules semi-chenillés qui revenaient du ravitaillement pour partir à l'attaque avec ses sauveteurs. Le Rutharne commençait à sentir le contre-coup de tous les évènements. Il fit à peine attention aux silhouettes grises et anguleuses. La pétarade des moteurs l'abrutissait plus qu'elle n'aurait pu l'exalter ou lui donner l'impression de puissance de la Wehrmacht. Il suivit la route en pilotage automatique jusqu'au poste de secours du bataillon.

Le point médical était signalé par un modeste panneau blanc à croix rouge. Ici, les obus pouvaient encore pleuvoir, la discrétion l'emportait donc sur tout autre considération. Plusieurs blessés s'y trouvaient déjà, assis sur du mobilier de circonstance ou allongé sur des brancards. Les mêmes visages émaciés et cernés du front l'accueillirent. L'assistant du médecin, un énergique lieutenant, l'examina avant de donner les consignes à un sous-officier sanitaire. Hébété et fatigué, Piotr suivit à peine le changement de ses pansements et le badigeon de teinture d'iode. Il ne remarqua même pas le bulletin de liaison qu'on lui épingla sur la poitrine avant de l'emmener dans la zone d'attente, à l'extérieur. Tout se bousculait dans sa tête. Elle lui donnait l'impression d'éclater. Les petits symboles écarlate ou les caractères gottiques[1] des brassards du personnel se brouillait comme des toiles filantes et lui donnait le tourni. Le ballet des musiciens du régiment transformés en brancardiers de circonstance l'étourdissait. Ils passaient devant ses yeux comme des spectres insaissables, se confondant preque avec les volutes de fumée de la cigarette que le pilote fumait pour patienter.

Ses souvenirs commenèrent à se brouiller une première fois lorsqu'on le hissa dans l'ambulance qui devait l'emmener au centre divisionnaire. Mais les cahots de la routes non goudronnée le maintinrent éveillé. Par moment, les soubressauts qu'ils occasionnaient ravivaient la douleur de sa blessures. Au-dessus de lui, un camarade gémissait à chaque secousse ; il devait être salement touché. Un autre,sur sa droite, se mit pleurer en appelant sa mère ou peut-être sa femme. Pour ne rien arranger, la chaleur était étouffante dans l'habitacle sombre. L'odeur devint vite insoutenable dans ce milieu clos. Les effluves de sueur, de sang caillé, d'excrément et d'urine se mélangeaient et remontaient dans la gorge déséchée jusqu'à provoquer la nausée. Trempé et assoiffé, le pilote rejeta sa tête en arrière, contre la toile de son brancard. Combien de temps dura ce trajet de quelques kilomètres ? Bien plus pour les infortunés passagers que pour le véchicule ou ses conducteurs[2]. Et le parcours du combattant n'était pas fini pour autant. Les effets de la phase d'épuisement conitnuait de s'instiller et se combinait à ceux de la perte de sang. La mémoire de Piotr cessa bientôt d'enregistrer les détails de son traitement. Assomé et abruti, il s'endormit sitôt installé dans un lit. Toute pensée pour Kazimiez Volpovski, son mitrailleur et compagnon d'infortune, s'était depuis longtemps envolée. Mais le drame, lui, revint le hanter. Le soir même, son sommeil fut agité.

[1] Le personnel médical portait le brassard à blanc à croix rouge. Il y avat également des personnel d'appoint renforçant les équipes de brancardiers ; eux portaient un brassard blanc avec l'inscription Hilfskrankenträger (aide-brancardier) en noir.

[2] Il y avait théoriquement un chauffeur et un aide.

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