Je m'en souviens. Je m'en souviens comme si c'était hier, les yeux tristes du pauvre garçon, alors que sa mère s'éteignait, celui dont je n'avais jamais vu les larmes, les laissaient enfin coulés. Jusqu'à présent, il avait affronté de nombreux obstacles, de son plus jeune âge à maintenant, il n'avait cessé de se battre. Se battre autant, ça fatigue. Et enfin, il avait atteint sa limite. Ses yeux étaient de véritables fontaines. Un flot ininterrompu de larmes en découlait, et pourtant, malgré tout, il n'y avait pas de tristesse dans ceux-ci. Étrange, sa mère disparaissait, sur une planète loin de la sienne, elle poussait son dernier soupir. Elle souriait en le faisant, comme s'il s'agissait d'un de ses plus beaux jours. Elle était âgée, pour une humaine en tout cas, cette dame au sourire indéfectible et aux yeux pleins d'espoir accepter la mort un vendredi, sur une Charmante petite planète De La Roue de Chariot.

Je me souviens du regard de Tim qui combattait la tristesse de la disparition de sa mère. Il me raconta plus tard qu'il ne voulait pas lui montrer son désespoir, il ne voulait pas qu'elle parte avec la vision de son malheur. Il ne soignerait jamais vraiment de la perte de sa mère. Elle n'était pas toute jeune alors qu'elle rejoignait les étoiles, mais d'après lui, elle n'était pas assez vieille... J'admets que je n'ai jamais su ce que les Humains qualifiaient de vieux. Vous vieillissez si vite, et mourrez si jeune... Et en même temps, mourrez-vous réellement ?

J'ai une fois discuté avec un fœtus. Une discussion captivante ! Apparemment, il était à l'aise dans le ventre de sa mère... Mais il me disait manquer d'exercice, que depuis quelque temps, il avait pris du poids, le manque d'effort d'après lui. Il me disait qu'il avait peur de devenir gros, il ne savait pas que pour un fœtus, c'était plutôt bon signe, que cela voulait dire qu'il était en bonne santé, et que ça n'était pas définitif. Mais pour lui, ça l'était, sa vie ne durait que neuf mois, il savait qu'un jour, il verrait la lumière au bout du tunnel, il pensait sa vie si courte, qu'il ne voulait pas la passer à ne rien faire. Je ne pleure pas la mort des gens, j'en ai vu beaucoup trop pour cela, et en même temps, les gens meurent-ils réellement ? Où est-ce que comme ce fœtus, ils se préparent simplement à une autre vie ? Une vie autre part peut-être, sur un autre monde, une autre planète, un autre plan de l'existence. La mort est une fin, mais qui vous dit qu'elle est LA fin ?

J'ai vu des milliers, des millions, des milliards de vies s'éteindre, des étoiles se consumer, des planètes exploser , toutes ces choses qui ne sont plus, je les ai vus disparaître dans le vide de l'univers. Jamais elles ne sont réapparues, jamais elles ne sont revenues, et chez moi, nous disons toujours qu'on finit forcément par revenir à notre point de départ. Qu'il n'y avait qu'un seul voyage dont on ne revenait jamais. Peut-être que cet endroit, où nous nous rendons à la fin, est bien trop beau pour le quitter, peut être simplement que nous cessons d'exister pour laisser la place à autre chose, comme un fœtus qui donne sa place à un nouveau-né. L'un voit la fin de sa vie, l'autre son commencement.

La mort n'est pas la fin, ou en tout cas, je ne le pense pas, elle n'est qu'une étape, une autre partie de la vie, vous autres avez appelé cela la mort. Chez moi, nous l'appelons " L'inconnu ", une étape que même mon peuple n'a pas encore réussi à comprendre... Ce qui vient sûrement de notre incapacité à mourir... Mais au final, est-ce réellement important ? Que vous mouriez ou non, que votre vie s'éteigne ou non, ou que vous cessiez d'exister, l'important, c'est qu'un jour, quelque part, vous ayez été en vie, vous avez marqué l'Univers, vous avez existé.

L'Univers est dur, il est froid et la chaleur a du mal à s'y faire sa place, mais jamais il n'est cruel, il est un berceau, un utérus, il est la source de toute vie. Et vous, vous qui lisez cela, vous disparaîtrez sûrement un jour, moi, je resterai là, la question qu'il faut vous poser, ce n'est pas " Qu'est-ce que ça fait d'être mort ? ". Non, la question que vous devriez vous poser est la suivante " Qu'est-ce que ça fait d'être vivant ?".