Samedi 11 Décembre

8 minutes de lecture

« Ha, tu travailles aujourd’hui ? »

Interpelle ironiquement Nico en voyant arriver Laurent alors que le service bat son plein depuis plus d’une demi-heure. Ce dernier riposte avec autant de sarcasme :

« Heu oui, il me semble.

—Tu n’étais pas obligé de répondre, c’était une question rhétorique.

—Oh putain la soirée qu’on a passée hier !

Poursuit-il en faisant fi de tout le reste pendant que Nico essuie les verres derrière le comptoir.

—Lucy m’a dit que vous vous étiez rentrés vers dix heures, du coup elle n’a dormi qu’une heure.

—En rentrant, on s’est arrêté dans un bar, ils étaient tous au café. T’aurais vu la tête de la serveuse quand j’ai commandé deux coupes de champagne avec des croissants. Sur le coup, elle a cru que je plaisantais.

—Tu m’étonnes, normal qu’elle ait cru que tu blaguais. Mais tu veux un café maintenant ?

—Ha non, toujours pas, sers-moi une vodka.

—Tu commences déjà ?

—Pour commencer, il aurait fallu que j’arrête à un moment, là je continue.

—Bon allez, je te laisse ta place et vais vite en salle aider les filles. »

Nico sert le verre à son patron avant de retourner à son poste en salle. Lorsqu’il vient chercher sa première commande au comptoir, Nico constate qu’il y a un verre de rosé en trop. Il le notifie à son patron qui lui répond caustiquement :

« Ha merde, tant pis, tu vas le boire. »

Le serveur, un peu surpris, hésite un instant puis se décide à le boire bien qu’il n’apprécie pas particulièrement l’alcool à l’heure du déjeuner. Il préfère à l’heure du dîner, mais pour une fois, il se dit qu’il peut faire exception, et puis, il a bien compris que son patron n’avait pas envie de boire seul.

Lucile n’approuve guère de voir son petit ami un verre à la main et ne manque pas de lui faire remarquer, mais il ne semble pas tenir compte de ses remontrances et poursuit sa dégustation. En fin de service, Lucile part assez rapidement, elle souhaite dormir un maximum de temps avant de reprendre le service du soir. Laurent, quant à lui, traîne un peu et discute avec Nico.

« Tu viens avec nous ce soir ?

—Ce soir ? Je bosse pas, je finis à dix-huit heures.

—Et alors ? Ça t’empêche de sortir ?

—Tu sais, une fois que je suis chez moi, j’ai plus envie de bouger. Surtout que tu bouges tard, moi, passé vingt-deux heures je décolle plus de mon lit.

—Viens avant alors, tu te mets au comptoir et on commence à boire ensemble.

—Tu trouves pas que je passe assez de temps ici déjà ? Je vais pas venir quand je suis de repos.

—Ho, mais c’est bon, c’est juste un soir, tu vas pas en mourir ! En plus demain tu commences à dix-huit heures trente, t’as tout le temps de récupérer.

—Mais pourquoi tu insistes tant pour que je vienne ce soir ?

—Je sais pas moi, mais tu viens jamais avec nous.

—Je tiens moins la cadence que vous, encore si je prenais de la coke, je tiendrais le coup, mais j’en prends pas…

—T’en veux ?

—T’en as ?

—Bien sûr, comment tu crois qu’on tient le coup ?

—En fait, j’avais quelques doutes…

—Alors t’en veux ?

—Non merci, pas intéressé. C’est pas trop mon truc.

—T’en as déjà pris ?

—Non, mais ça me tente pas.

—C’est toi qui vois, je te force pas, mais tu viens ce soir !

—Franchement pas motivé.

—T’as pas le choix, sinon t’es viré, c’est un ordre de ton patron !

—Ho putain t’es dur là. Bon si c’est un ordre, je vais faire un effort, mais c’est la dernière fois !

—Je savais bien que j’allais réussir à te convaincre ! »

En rentrant chez lui, Nico envoie un SMS à Kate :

J’avais raison !

À quel sujet ?

Dao

Développe

Elle prend avec Laurent et Lucy

Comment tu sais ?

Il me l’a dit

Tu vas lui parler ?

Je sais pas…

Tu me raconteras demain

OK

Nico regarde l’heure en soupirant, il est près de vingt-trois heures et il n’a aucune envie de sortir. Ce qui le dérange, c’est d’être en présence de Dao alors même qu’elle consommera des produits illicites en cachette. Poussé par la curiosité de connaître leurs fins de soirées, il se prépare à rejoindre la bande de fêtards au Diner.

Ils ne restent pas longtemps au restaurant, la plupart des clients sont déjà partis lorsque Nico arrive. En le voyant arriver, Laurent lui prépare un verre de rosé. Le serveur trempe ses lèvres à plusieurs reprises dans le récipient, puis, ne pouvant pas rester sans rien faire à regarder ses amies travailler, il va leur donner un coup de main pour le rangement et le ménage, geste qu’apprécie grandement Lucile. Une fois les derniers clients partis et la salle nettoyée, les quatre amis peuvent enfin commencer leur soirée.

Nico reste assis sur la banquette du night-club et observe ses camarades. Pour une fois, il apprécie presque toutes les musiques que diffuse le disc jockey, le thème de cette soirée étant les années quatre-vingt, il n’en est que plus ravi. Tranquillement installé un verre à la main, il épie tous les faits et gestes de Dao d’un regard suspicieux, ainsi même lorsque la jeune fille se rend aux toilettes pour des besoins naturels, il en déduit qu’elle va prendre de la drogue, il voit le mal dans chacune de ses absences. Pourtant, même s’il est vrai qu’à quelques reprises elle va “taper “, comme ils disent, tous ses déplacements ne sont pas conditionnés par son addiction. Laurent, un peu fatigué de danser et surtout par toutes les boissons alcoolisées qu’il a ingurgitées, rejoint Nico sur la banquette, sans omettre de se servir un verre d’une des bouteilles posées sur la table.

« Putain je bois trop, j’en peux plus !

—Tu dis ça, mais tu te ressers un verre !

—Il ne faut jamais arrêter un train en marche… Et heureusement que je tape, sinon je tiendrais pas !

—T’en as pris beaucoup ce soir ?

—Je sais plus trop, mais pas mal ouais !

—Et les filles aussi ?

—Ma wife autant que moi je pense, Dao moins.

—Ça doit vous revenir cher non ?

—M’en parle pas ! C’est moi qui paie tout !

—Ah bon ? À Dao aussi ?

—De temps à autre, elle me donne ses pourboires, histoire de participer, mais bien souvent, je paie tout. »

Laurent boit son verre d’une traite et se ressert aussitôt.

« Bon sinon, t’as pas repéré de filles qui t’intéressent ?

—Ah si, plein !

—Tu attends quoi ? Va les voir ! Offre-leur un verre !

—Mais ça sert à rien, elles sont ici pour danser, elles n’ont que faire d’un mec qui danse pas !

—Mais non, tu te fais des idées ! Tu vas les voir, tu les fais rire et voilà !

—Oui, plus facile à dire qu’à faire !

—Non, mais j’ai l’impression que tu te fais un peu chier là.

—Pas du tout, je profite du spectacle, j’aime bien observer les gens. Et puis avec vous, je risque pas de m’ennuyer ! »

Leur conversation est interrompue par l’arrivée des filles qui les rejoignent en se jetant sur eux, manquant de renverser de peu la table et tout ce qui s’y trouve. Les deux copines euphoriques veulent partager leur joie avec leurs accompagnateurs. Lucile prend une bouteille de champagne et oblige Laurent à boire au goulot, en en renversant partout. Le liquide se déverse le long de son visage, finissant sa course sur le velours du canapé. Puis Laurent vide le reste de champagne sur son cuir chevelu. Dao, qui n’a rien manqué de la scène, regarde son partenaire de jeu d’un air taquin en saisissant une coupe sur la table. Nico comprend immédiatement où elle veut en finir et lui lance d’un ton menaçant :

« Ne joue pas à ça avec moi. »

Dao ne prête aucune attention à ces mots et lui verse lentement la coupe de champagne sur la tête. À court de munitions, Nico s’empare du petit seau à glace et déverse son contenu sur la poitrine de celle-ci. D’un cri strident, elle se redresse en cherchant à évacuer les morceaux de glaçon restés bloqués entre ses vêtements, puis en saisit un qu’elle glisse difficilement dans le caleçon de son assaillant qui ne se laisse pas faire. Dans la continuité de son délire, Dao défait peu à peu tous les boutons de la chemise de Nico, et une fois son torse mis à nu, elle se plaque de tout son corps contre lui. Le jeune homme ressent un grand froid l’envahir au contact du vêtement trempé de son amie. Les frissons passés, il concentre son attention sur l’excitation que lui provoquent les seins de Dao collés contre lui. D’une pulsion souveraine et dans l’ivresse du moment, Nico approche ses lèvres de celles de Dao et l’embrasse, elle ne semble pas refuser ce baiser et mêle spontanément sa langue avec celle de son ami. Lucile, qui se chamaille avec Laurent, remarque le câlin que se font ses deux employés préférés. Voyant que cela dure assez longtemps, elle leur vide un verre de vodka dessus en s’exclamant :

« Eh vous deux, y’a des hôtels pour ça !

—T’es jalouse ? »

À peine a-t-elle fini sa phrase que Dao s’avance vers Lucile, lui passe la main derrière la nuque et l’embrasse à son tour. Nico, qui se retrouve délaissé, tente de s’essuyer le visage tant bien que mal tout en remettant sa chemise en place. Du coin de l’œil, il observe les filles qui s’étreignent face à lui. Le baiser terminé, les deux copines s’en vont danser dans la foule…

Les heures défilent sans qu’ils ne s’en rendent compte, bientôt la boîte ferme ses portes. Laurent suggère de poursuivre la nuit, où plutôt la matinée devrait-il dire, en d’autres lieux. Nico préfère décliner l’offre prétextant être fatigué, il en a assez vu. À la surprise générale, Dao déclare vouloir rentrer avec lui. Habituellement à cette heure-ci elle est toujours partante et ne refuse jamais de prolonger encore quelques instants sa nuit d’insouciance où plus rien d’autre n’importe que de s’amuser, de danser, d’absorber cette poudre blanche et de boire pour oublier tous les problèmes.

Lorsqu’ils arrivent chez eux, après avoir pris une douche, Nico s’installe dans le lit en regardant la télévision. Dao le rejoint en sortant de la salle de bain.

« Tu fais quoi ?

—Rien, je regarde la télé en attendant le sommeil.

—Je peux regarder avec toi ?

—Oui bien sûr. »

Dao s’allonge sur le ventre à côté de lui en plaçant son bras autour de sa taille, sa tête appuyée sur son épaule.

« C’est nul ce que tu regardes.

—Oui, c’est vrai ! Mais je ne regarde pas vraiment, et puis y’a rien d’autre de toute façon.

—Tu veux pas mettre un DVD ?

—Si tu veux, je mets quoi ?

—Je regarderais bien Usual Suspects. »

Le jeune homme se soumet au désir de Dao et lance la lecture du film avant de reprendre sa place à ses côtés. Il n’arrive pas à se concentrer sur l’écran, le contact de sa peau nue contre la sienne l’excite, et il se demande s’ils vont faire l’amour. J’ai envie de l’embrasser… Mais je peux pas, si jamais elle veut pas je me sentirais trop mal à l’aise. Vaut mieux que j’attende que ça soit elle qui commence… Putain je devrais pas penser à ça, c’est pas bien, c’est mon amie, ma petite sœur de cœur… Mais elle est tellement belle… et douce… J’ai sommeil, je sens que je vais pas tarder à m’endormir. Il relève lentement la tête afin de voir le visage de Dao. Elle dort… Elle est trop mignonne comme ça. Il dépose un tendre baiser sur son front. Bonne nuit mon ange… Une dizaine de minutes plus tard, il finit par s’endormir à son tour.

Annotations

Vous aimez lire Georgie Marceau ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0