49. Un visiteur dans l'intimité

9 minutes de lecture

Maxime

Lorsque je passe les grilles du domaine et me lance sur la petite route qui mène au Château, immédiatement, c’est comme si une barrière magique empêchait tous les soucis extérieurs de pénétrer avec moi dans ma propriété. Et pourtant, il y en a. Cet entretien avec le DG me reste franchement au travers de la gorge. Mais pour l’instant, j’ai autre chose en tête. Le soleil est en train de baisser à l’horizon derrière le château et la vue est magnifique. Les reflets irisés de l’astre solaire sur l’eau des douves donnent une impression féérique au château. Quasi mystique. A tel point que je m’arrête un instant sur le chemin pour admirer la vue qui, comme tous les jours, m’époustoufle et me laisse pantois d’admiration.

Je finis néanmoins par redémarrer pour aller me garer près du château. Mes amis les canards m’accueillent à grands cris et je leur souris et les salue en leur faisant une petite révérence, accueillie non pas par des cancanements mais par un éclat de rire auquel je m’habitue de plus en plus. Je lève les yeux et constate que Miléna est accoudée à la rambarde et m’observe, amusée.

— Bonjour, Miléna. Cela fait longtemps que tu m’observes faire mes bêtises avec les canards ?

— Suffisamment longtemps pour me poser des questions sur ta santé mentale, beau châtelain.

J’éclate de rire et suis content de la retrouver. Je ne sais pas dans quelle mesure elle est responsable de mon changement d’attitude envers les migrants, ni de mon désir de m’opposer à mes responsables, mais en tous cas, elle a cette capacité à me faire oublier le reste du monde. Je profite de ce que personne ne puisse nous voir pour l’enlacer et l’embrasser alors que je la plaque contre le mur près de la porte d’entrée. Elle répond à mon baiser avec cette intensité qui caractérise toutes nos étreintes, des moments de pure folie où nos désirs sont immédiatement réveillés et où nos corps ne demandent qu’une chose : s’unir pour notre plus grand plaisir.

— Les enfants ne sont pas encore couchés ? demandé-je, le souffle un peu court. Parce que tu m’as mis en appétit et j’ai envie de toi.

— Non, ils sont en train de lire dans le salon. Ils voulaient t’attendre, et j’avoue qu’enfant, je détestais aller au lit sans avoir un bisou de mon père, donc je n’ai pas pu leur dire non.

J’ouvre un peu plus son chemisier et dépose quelques baisers sur sa peau à la naissance de sa poitrine avant de soupirer et de la laisser tranquille, le temps d’aller m’occuper de ma progéniture que je retrouve effectivement bien installée près de la cheminée.

— Allez les enfants, il va être l’heure d’aller vous coucher maintenant que je suis rentré. Vous êtes prêts ?

Je viens m’affaler dans le canapé entre mes deux enfants qui se collent à moi pour me faire un câlin et j’essaie de ne pas trop dévorer du regard Miléna qui est entrée à son tour sans avoir refermé les boutons que j’ai ouverts. Avec son petit short et ce petit haut bien ouvert, j’avoue qu’elle est ravissante et j’ai hâte que l’on se retrouve seuls pour pouvoir la dévêtir et la caresser jusqu’au bout de la nuit.

— Pourquoi t’es rentré si tard, Papa ? me demande Lili sans bouger.

— J’ai eu un entretien avec mon Directeur ce soir, soupiré-je. Il trouve que je suis trop humain et pas assez efficace dans ce que je propose. Il pense qu’à cause de ma gentillesse, le port va être en danger et qu’on va perdre de l’argent. Je n’étais pas d’accord avec lui, et notre discussion a pris un peu de temps.

— Comment on peut être trop humain ? Il est nul, ton directeur.

C’est clair qu’il est nul et en plus, il est en colère contre moi suite au rapport qu’a fait NIcolas à mon sujet. J’ai quand même pu lui proposer les résultats de l’étude que j’ai réalisée, et ça l’a un peu calmé, mais il a quand même tenu des propos qui m’ont mis hors de moi.

— Si on l’écoutait, les gens comme Miléna, qui viennent d’autres pays, seraient tous renvoyés chez eux, quel que soit le sort qui les attend là-bas. Tu comprends que je suis obligé de m’opposer à ça, Lili ?

— Ben oui, évidemment que je comprends. C’est normal de pas être d’accord avec lui. Moi non plus, je suis pas d’accord, d’ailleurs. S’il était à leur place, il aimerait bien qu’on l’aide plutôt que de le renvoyer dans son pays.

— Exactement. Bref, je crois qu’un jour, il va falloir que je change de travail car là, si ça continue comme ça, je vais finir par déprimer, moi. Heureusement que vous êtes là à la maison et que vous me redonnez le moral.

J’observe Miléna dont le regard s’est posé sur moi et ne me quitte pas. J’ai l’impression qu’elle me donne de l’énergie juste avec ce contact visuel. Ou peut-être est-ce la pensée des moments intimes qui nous attendent une fois que l’on va se retrouver dans mon lit. Je me relève et entraîne les enfants vers leur chambre où Miléna et moi venons les embrasser et les border.

— A demain Tom, fais de beaux rêves ! A demain Lili.

— A demain Papa, à demain Miléna, répondent-ils en chœur.

— Bonne nuit les enfants, à demain.

Je referme doucement la porte et me dépêche de rattraper Miléna qui est en train de descendre les escaliers. Sans attendre, nos bouches se retrouvent et ses doigts glissent sous ma chemise pour caresser mon torse. Elle m’attire à sa suite et sans nous séparer, nous finissons de descendre les escaliers pour revenir au salon où je retrouve le canapé, mais cette fois, le câlin dont je bénéficie est beaucoup plus sensuel. Miléna vient en effet me chevaucher et je profite des baisers qu’elle dépose sur mon cou, mes joues, mon front, amusée de me faire languir comme ça.

— Je t’ai gardé une assiette, au fait, tu dois avoir faim. Et moi qui t’accapare, excuse-moi, me dit-elle à l’oreille tout en déboutonnant ma chemise.

— J’ai faim de toi, le reste peut attendre.

J’ai réussi à défaire le bouton de son short et je le fais glisser le long de ses jolies jambes jusqu’au sol. Toute aussi impatiente, elle s’attaque déjà à mon pantalon. Je sens ses doigts s’insérer sous le tissu et elle en extrait mon sexe bandé qu’elle utilise pour caresser son clitoris. Que j’aime à voir nos deux sexes qui se frottent ainsi dans une danse qui témoigne de toute notre excitation ! Nous finissons de nous débarrasser de nos vêtements et je profite qu’elle se soit levée pour la prendre dans mes bras et la pousser contre la cheminée. J’ai presque envie d’allumer le feu pour réaliser un de mes fantasmes, mais vu la température ambiante et la chaleur qui se dégage de nos corps, ce serait une folie vraiment pas raisonnable.

Toute aussi excitée que moi, elle se cambre et passe une main entre ses jambes pour attraper ma hampe et la positionner entre ses lèvres qui sont déjà bien humidifiées. J’adore lui faire l’amour ainsi, nos deux corps qui ont appris à se connaître se répondent d’une manière coordonnée et harmonieuse. Notre désir est tel que notre première étreinte de la soirée est courte et intense. Miléna est tellement excitée qu’elle ne tarde pas à jouir, soutenue par mes bras puissants malgré le plaisir qui me terrasse en même temps qu’elle.

Nous restons ainsi enlacés, mon sexe toujours bien calé au fond d’elle, son dos contre mon torse, nos bouches qui ne veulent plus se quitter.

— Tu crois que c’est l’heure du reste ? finis-je par demander. Avant de reprendre tout ça, bien entendu.

— Ah, le sexe t’ouvre l’appétit ? rit-elle. Comment on fait si je n’ai aucune envie de bouger et que je refuse que tu t’éloignes ?

La coquine, contrairement à ses dires, bouge néanmoins ses fesses sans pour autant nous désengager. Je tolère cette délicieuse torture encore quelques instants avant de me désengager.

— Eh bien, il va falloir que tu sévisses et me punisses car tu vois, j’ai bougé.

Elle rit et ce son cristallin a le don de me faire rêver et de me donner des envies d’encore, voire même des envies de toujours. Mais je reste raisonnable et nous nous installons en cuisine pour que je puisse goûter au délicieux plat de pâtes bolo qu’elle a préparé. Plus frileuse que moi, elle a remis son short et son chemisier qu’elle n’a cependant pas boutonné, alors que je reste nu.

Je profite de ce repas improvisé pour lui raconter les déboires que j’ai eus avec mon DG, et notamment le fait que lui aussi me reproche d’être passé du mauvais côté de la force et de ne pas donner mon maximum pour empêcher les migrants de pénétrer dans le complexe portuaire. J’ai eu beau lui montrer le résultat des calculs, insister sur le fait que tout était déjà si bien protégé que les migrants préféraient désormais risquer leur vie sur des canoës pneumatiques, rien n’y a fait. Il faut que je crée des dispositifs qui sont dangereux pour les vies des migrants. Comme si cela allait les dissuader après tous les sacrifices qu’ils ont déjà faits pour arriver ici...

— Tu vois, Miléna, je pense de plus en plus que je n’ai plus ma place dans cette entreprise dont les valeurs ne me correspondent plus du tout.

— Il va falloir que tu cherches un autre travail alors, si tu ne te sens plus bien au port. Si le travail, ce n’est pas la vie, c’est quand même une part importante, il faut s’y retrouver et s’y épanouir.

— Ah, si je pouvais faire comme mes ancêtres et vivre de mes rentes, commencé-je à dire avant d’être interrompu par des coups assénés sur la porte d’entrée.

Rapidement, j’enfile mon pantalon et vais voir qui ose ainsi nous déranger. J’entrouve la porte prudemment et me retrouve face à un monsieur à la peau mate, assez petit mais trapu, qui s’adresse à moi avec un fort accent d’Europe de l’Est.

— Bonjour. J’ai faim. Ici, vous aider réfugiés. Moi très faim.

— Mais qui vous a donné mon adresse ? Je ne suis pas une association, moi !

— Moi faim. Donner manger, s’il vous plaît. Beaucoup faim.

Je soupire et lui fais signe de me suivre jusqu’à la cuisine où Miléna, maintenant rhabillée, se joint à nous. J’essaie de lui poser quelques questions, mais il ne répond que par des borborygmes inintelligibles.

— Miléna, tu penses que tu peux échanger avec lui ? Tu parles russe, peut-être ?

— Oui, ça doit pouvoir se faire… Tu veux savoir quoi ? me demande-t-elle.

— Demande lui ce qu’il veut, qui l’a orienté ici, ce qu’on peut faire pour lui, bref, j’ai envie de reprendre là où on s’est arrêtés dans nos activités, et plus vite on sait ce qu’il désire, plus vite on peut aller se coucher.

Je la regarde échanger en russe sans que je ne puisse comprendre un mot de ce qui est dit. Ses questions se font de plus en plus courtes et j’ai l’impression que son stress augmente au fur et à mesure de l’entretien qui se déroule sous mes yeux sans que je puisse y participer. Que c’est frustrant !

— Il dit quoi, alors ? ne puis-je m’empêcher de l’apostropher.

— Il dit que Lorik lui a parlé du château, qu’il a été en contact avec lui. Il cherche… Un endroit où dormir, veut aller au port pour passer la frontière… Il dit qu’il est seul, qu’il n’a pas mangé depuis quatre jours.

— Dis-lui qu’on va lui donner à manger, mais que je ne souhaite pas l’héberger. Si je lui dis oui à lui, on va vite se retrouver submergés, ici.

Je constate qu’elle a l’air mal à l’aise avec ma décision et qu’elle hésite beaucoup dans son discours auprès de ce réfugié. Mais il nous remercie avec profusion et se régale de son plat de pâtes avant de nous quitter, des dizaines de mercis prononcés à notre intention. Nous le regardons repartir comme il est venu, sans papier, sans le sous, mais mû par une forte volonté de rejoindre l’Angleterre. J’admire sa détermination et cette rencontre ne fait que renforcer mon souci d’imaginer des solutions permettant de préserver la vie de ces personnes qui ont tout sacrifié pour réaliser leurs rêves. Cela vaut bien un peu de considération, non ?

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