54. Le Casanova du refuge

9 minutes de lecture

Miléna


Lorsque j’ouvre les yeux, je suis éblouie par le soleil qui perce entre les rideaux que Maxime a mal fermés hier soir. Je m’étire comme un chat avant de me retourner, étonnée de ne pas avoir chaud grâce ou à cause du corps de Maxime, et constate que je suis seule dans le lit. Je jette un œil au réveil et comprends pourquoi. Il est déjà presque dix heures. Il est rare que je dorme aussi tard et ça m’étonne que Max ne m’ait pas réveillée. Me voilà bien, il va falloir que je sorte de là avec discrétion, en priant pour que les enfants ne montent pas au même moment.

Je me lève bon gré mal gré et pars à la recherche de mes vêtements, que je retrouve finalement dans la salle de bain. Un sourire se dessine sur mes lèvres en constatant les dégâts de la veille. Y a pas à dire, le sexe avec Maxime, ça déménage. Un simple brossage de dents peut partir en vrille, et tout ce qui se trouvait sur le rebord du lavabo a atterri par terre. Je prends le temps de tout ramasser en me remémorant la scène. Les trois minutes de brossage de dents ont été une séance intense de caresses, jusqu’à ce que je me rince la bouche et me retrouve coincée entre le lavabo et le corps de mon amant. Ou de mon amoureux, plutôt ? J’ai l’impression que tout est encore plus intense, maintenant que le sexe est ponctué de “je t’aime”. Rien que d’y repenser, j’ai l’impression de sentir ses mains sur ma peau, son souffle dans mon cou, son excitation nichée en moi. Bon sang, tout est tellement fort avec cet homme, j’ai la sensation d’être en vie comme jamais lorsque je me retrouve dans ses bras.

J’essaie de me secouer un peu avant de me retrouver toute excitée et d’autant plus frustrée que nous n’aurons pas de moment en tête à tête avant que les enfants ne soient couchés, m’habille et sors doucement de la chambre en vérifiant qu’il n’y a personne dans le couloir. Je file faire une toilette de chat dans ma suite et enfile la petite robe de plage dans laquelle je passe quasiment ma vie en ce moment. Il fait beau, il fait chaud en ce début juillet, et je suis à l’aise dans ce fin tissu.

Je m’arrête au beau milieu des escaliers en constatant que la porte d’entrée est grande ouverte et qu’il y a trois hommes à l’extérieur qui semblent faire comme chez eux. La scène me laisse perplexe, mais je finis par comprendre qu’il s’agit de l’entreprise de surveillance que Maxime a engagée pour installer des caméras autour du château.

— Papa ! Miléna est réveillée ! crie Lili en débarquant dans le hall alors que je finis de descendre. Il voulait pas qu’on aille te réveiller, mais il faut que tu te dépêches de boire ton café, on sort et c’est une surprise !

Je souris et l’enlace en déposant un baiser sur son front avant qu’elle ne monte en vitesse, apparemment pressée d’aller s’habiller. Une sortie ? Où est-ce qu’il nous emmène ?

— Bonjour Tom, bonjour Maxime, dis-je en entrant dans la cuisine. On sort ?

J’adore le regard que porte le beau barbu sur moi et la façon dont il marque une seconde d’arrêt avant de se reprendre et me répondre.

— Oui, j’ai pris un rendez-vous et j’ai besoin que tout le monde soit là pour m’aider dans le choix qui va m’être proposé. Tu as juste le temps de prendre ton petit déjeuner et on y va.

— Tu as besoin de tout le monde ? Un rendez-vous ? Tu veux qu’on t’aide pour choisir des lunettes, c’est ça ? ris-je en me servant un café.

— Je n’ai pas encore perdu la vue en raison de mon grand âge, même si j’avoue que tu as cette fâcheuse habitude de m’éblouir. Tom, file te préparer, on va être en retard !

— Je ne peux pas, Lili est dans la salle de bain, Papa. On va vraiment t’acheter des lunettes de soleil ?

— Tu n’as pas besoin de la salle de bain pour aller t’habiller, petite crapule qui se moque de son vieux père. Allez, ouste !

Je vois Tom lever les yeux au ciel en sortant de la pièce, et Maxime en profite pour approcher et venir m’enlacer alors que je beurre mon morceau de pain.

— Tu aurais dû me réveiller, je te promets que je ne l’aurais pas mal pris.

— Tu étais trop belle à dormir comme ça, tranquillement dans mon lit. Tu m’en veux si je te dis que j’ai passé un bon moment à te mater ?

— C’est un peu… Flippant, mais aussi terriblement mignon, ris-je en l’enlaçant. Ça a dû te coûter cher, toutes ces caméras… Je suis désolée, Max.

— Non, les caméras en soi, ça va encore. C’est l’abonnement sécurité qui coûte le plus cher. Mais je suis largement payé quand je vois ces jolies petites fesses nues dans mon lit, tu sais ? Je t’aime, ma belle, et il va vite falloir que le soir arrive parce que tu me fais trop envie !

— Eh bien… Vivement ce soir, alors, ris-je en l’embrassant dans le cou avant de mordiller le lobe de son oreille.

Maxime recule brusquement alors que le bruit des pas de Lili se fait entendre dans le couloir, et l’adolescente débarque dans la pièce, toujours aussi surexcitée.

— Tom a presque fini, il se brosse les dents !

Le regard que me lance mon châtelain à cette évocation me donne un coup de chaud immédiat, et je plonge le nez dans ma tasse pour tenter de garder contenance. Lorsque Tom redescend, nous ne tardons pas à partir, laissant les ouvriers travailler. Le trajet passe rapidement, les enfants tentant de deviner où leur père nous emmène, et j’avoue être piquée par la curiosité. Il ne m’a absolument rien dit et j’ai peur que les enfants, clairement très enthousiastes à l’idée que leur père leur fasse une surprise, soient peut-être déçus selon ce qu’il leur réserve.

Lorsque Maxime s’arrête devant une barrière et sort pour sonner à l’interphone, les enfants s’agitent davantage encore.

— Papa, on va vraiment adopter un animal ? demande Lili lorsqu’il remonte dans la voiture.

— Oh mais c’est trop bien ! s’extasie Tom, que je n’ai jamais vu autant sourire.

— Oui, on va adopter un chien. Il y a une portée de petits chiots qui sont sevrés et qui sont prêts à être adoptés. J’espère que vous aimez les labradors !

Je jette un œil à mon châtelain, qui sourit, fier de sa surprise, en redémarrant pour s’engager dans le chemin qui mène à la grande bâtisse. Donc, il est vraiment prêt à tout faire pour me rassurer. Un petit chien… Bon, c’est un bébé, pas éduqué, dont il va falloir s’occuper, qu’il faudra dresser. Et puis, je ne crois pas que cette race soit vraiment connue pour son côté chien de garde. Mais le geste est là, et encore une fois, il va investir de l’argent pour que je me sente en sécurité. Je m’en veux autant que je suis touchée par tous ces petits gestes, même si je crois qu’il me prend pour une folle.

Lorsque nous descendons de la voiture, nous sommes accueillis par un jeune homme à l’allure sympathique qui se présente rapidement et nous enjoint à le suivre à l’intérieur. Les enfants le suivent comme son ombre tandis que Maxime et moi traînons un peu derrière eux.

— Un petit chiot, hein ? Il va garder quoi, sa gamelle ? ris-je.

— Dans six mois, il sera déjà grand, et je ne veux pas non plus d’un chien méchant qui fasse peur aux enfants. En tous cas, si quelqu’un s’approche, il le signalera, tu sais ?

— Je sais… Rassure-moi, tu ne prends pas un chien juste pour que je me sente en sécurité, n’est-ce pas ? Je veux dire… Les enfants ont l’air contents, mais Tom m’a dit que tu ne voulais pas d’animaux dans le château, alors…

— Alors si, c’est juste pour toi. Et puis, ça fait plaisir aux enfants qui pensent qu’ils ont enfin réussi à me faire céder. Et ça, c’est bonus. Tu penses que ce n’est pas une bonne idée ? me demande-t-il, soudain inquiet.

— Honnêtement ? J’ai l’impression que ce petit chiot pourrait faire du bien à tout le monde.. Regarde-les, j’ai l’impression qu’ils ne sont jamais aussi bien entendus, tous les deux.

Effectivement, Tom et Lili passent devant les cages des rongeurs et s’interpellent l’un l’autre pour que chacun observe l’animal qu’il a vu. Ils sont vraiment trop mignons, mais si on les laisse ici trop longtemps, on va repartir avec lapins, hamsters, cochons d’inde et toute une floppée de petites bêtes.

— Je crois que ta présence y est aussi pour beaucoup, Miléna. C’est fou comme ils sont heureux que tu sois parmi nous. C’est un peu comme si la place n’attendait que toi.

Je crois qu’il me surestime beaucoup. Je n’ai rien fait de particulier, ils grandissent, tous les deux, c’est tout. Chacun d’eux évolue et se rend compte qu’on ne peut compter que sur sa famille, sans doute. Ou qu’on est plus forts ensemble.

— Oh Papa, regarde comme il est trop mignon ! s’extasie Lili alors que Jérémy, le gars qui gère le refuge, dépose dans ses bras une petite boule de poils toute noire.

— Oui, il est beau, mais il y en a d’autres aussi, il faut tous les regarder pour choisir celui qui vous plaît le plus.

— Sinon, on peut tous les prendre, Papa, non ? Comment on peut savoir lequel on va préférer ? Comment on peut choisir ? Ce sont des bébés chiens, ils sont tous mignons, regarde, continue Tom en s'accroupissant pour en caresser un autre.

— Non, on n’en prend qu’un et on fait ça au feeling. Il faut toujours faire confiance à ses premières impressions. Regardez les bien tous, et je suis sûr qu’il y en a un qui vous plaira plus que les autres. Il faut toujours se fier à ce qu’on ressent au fond de soi.

— Et si on n’est pas d’accord ? lui demande Lili en jetant un œil malicieux à son frère, on pourra en prendre deux ?

— Si vous n’êtes pas d’accord, on laisse Miléna trancher. Alors non, vous ne m’aurez pas comme ça, les coquins !

J’ouvre de grands yeux en l’entendant. Hors de question que je joue l’arbitre, moi. J’ai juste envie de tous les prendre, il ne peut pas me demander de choisir lequel va vivre sa meilleure vie au château, il est fou !

— Compte pas sur moi, chuchoté-je alors que les enfants passent d’un chiot à l’autre pour les caresser et prendre la température. Je suis incapable de choisir, t’es fou.

— Si tu me le demandes, on les prend tous, tu sais ? A toi de voir…

Est-ce qu’il se rend compte que j’ai tous envie de les adopter, là ? Il y a quand même six chiots, il est malade ! Je m’apprête à répondre quand le petit noir qui était dans les bras de Lili tout à l’heure vient s’asseoir devant moi et lève sa petite bouille trop mignonne dans ma direction.

— Oh bon sang, Max, regarde ça, comment tu veux ne repartir qu’avec un chiot ? demandé-je en récupérant la boule de poils qui me lèche la joue dès qu’il est à portée, me faisant rire.

— Je crois que l’on va prendre celui-là, il a l’air de faire du gringue à toutes les femmes de la famille ! Un vrai Casanova ! répond-il en souriant.

— Heu… Si ça va aux enfants, ça me va. Alors, qu’est-ce que vous en dites ?

Tom et Lili lèvent le nez du groupe de petits chiots qui cherchent leur attention et nous rejoignent pour venir caresser le labrador qui semble adorer ça. Je crois que la petite bête est adoptée rapidement.

— T’es sûr qu’on peut en prendre qu’un, Papa ? tente quand même Lili en regardant derrière elle.

— Oui, Casanova nous suffira, je crois. Et puis, si on en prend plus qu’un, on ne survivra pas à autant de mignonnerie !

Les enfants semblent à la fois hésitants et tout heureux, et je comprends qu’ils soient partagés. Jérémy, qui semble habitué à ce genre de situation, nous propose de sortir de la pièce pour qu’ils jouent avec notre nouveau locataire pendant que Maxime et moi signons les papiers. Enfin, pendant que mon châtelain signe, paie, et que nous écoutons conseils et avertissements sur tout ce qui concerne l’adoption d’un chien. J’ai l’impression que cela dure une éternité et que cela passe à la vitesse de la lumière à la fois.

Nous sommes arrivés à quatre, nous repartons à cinq, un animal tout heureux qui trépigne entre Lili et Tom, et quatre sourires accrochés à nos visages. La surprise est réussie, y a pas à dire !

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