XXVII- De la préparation à la guerre

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 Tandis que nous attendions à une table notre dîner, je regardais que la cantine était vide. Nous étions le soir et, j'estimais, l'heure approximative du souper. Je n'expliquais pas pourquoi personne ne venait prendre le repas. Le lendemain allait être une journée de combat, il fallait reconstruire les forces.

Finn, une fois de plus, devina ce qui se passait dans mon esprit et prit la parole en touchant juste :

"L'être humain se comporte différemment la veille d'une bataille. Sachant qu'il peut mourir dans les heures à suivre, certains se débauche toute la nuit durant. Ceux-là, effectivement, vont mourir le lendemain puisqu'ils ne seront pas du tout frais et ils n'auront aucun des réflexes qui les auraient gardés en vie. D'autres vont se réunir autour d’un feu et lier des fraternités de dernières minutes. Ces fraternités semblent à première vue très friable puisqu'elle ne repose que sur l'instant... au contraire, ces fraternités de combat durent toute la vie chez ceux qui survivent. Quant aux morts, leurs frères leur rendent hommage pendant des années. D'autres encore sont des vétérans de ces instants et dorment comme des loirs pour se réveiller en forme au matin, pour prendre un petit déjeuner complet et pour aller se positionner en première lignes, le bouclier ferme défendant le frère de droite. Un homme sur dix de ceux-là survive au combat. Mais leurs rangs se remplissent des recrues du jour qui deviennent des vétérans au soir. Enfin, il y a ceux qui commandent... Finn sourit largement à ces mots. Un sur deux ne dort pas de la nuit tellement il se fait du souci sur l'issue de la bataille, le second dort sans crainte... A quelle catégorie appartiens-tu, Arn ? J'ai été surpris par la question, parce que je ne savais pas à quelle "catégorie" j'appartenais mais surtout, quelle question !

- Hmm... Je n'en sais rien, je crois. Et toi ? Finn rit largement.

- Ahah ! J'ai appartenu à chacune des catégories que je viens de te décrire... Sa réponse m'a plus surpris encore que la question. Je voulais en savoir plus et cela ne tarda pas. J'avais quinze ans, comme toi, lors de ma première bataille. J'étais avec mon frère, tout fraîchement Chevalier. L'ennemi était en supériorité d'au moins dix contre un. Mais on ne pouvait fuir, l'avenir de notre Royaume dépendait de nous. Mon frère et moi n'avions pas les épaules pour soutenir ces responsabilités, tu te souviens de cette histoire, on l'a raconté à l'auberge... en bref, on a bu toute la nuit. Et le lendemain a été une boucherie et au bout d'une heure notre capitaine a hurlé à la retraite à notre place. Nous, on était incapable de prendre une seule décision... On a suivi nos compatriotes dans la honte. C'est tous les morts que j'ai vu tombé à ma droite, à ma gauche, devant, derrière moi, qui m'a fait dessoûler rapidement. Et j'ai rapidement juré de ne plus boire avant une bataille.

- Cela à de quoi être efficace, j'imagine...

- Ensuite, c'était au siège de la Nouvelle Eter, la capitale de notre Royaume. J'ai fait partie d’une fraternité du dernier instant avec, tu ne le devineras pas...

- Mon père et le Chevalier Rollon qui n'était pas encore Chevalier à ce moment-là ?

- Ouah ! Exactement, très bonne déduction.

- On ne connais pas beaucoup de monde, tous les deux, le choix était facile.

- Si tu le dis. Il y avait aussi notre regretté Roi pour faire les cinq doigts de la main. Ton père a été envoyé avec le futur Rollon en secret, pour prêter main-forte désespérément. Les trois quarts des Gardes Royaux de Rollon ont pris part à la bataille. L'issue de la bataille, tu l'as connait. La Nouvelle Eter est prise, notre Roi est pendu et la main amputée de son majeur doit fuir.

- Cela me fait comprendre mieux encore ta sympathie avec mon père et avec le Chevalier Rollon. Ce siège ne devait pas être commode.

- Effectivement. Mais toute défaite est dure... moralement surtout. Tiens ! Voilà quelque chose que tu pourras retenir dans ta vie à venir.

- J'écoute bien.

- Si ce siège avait été victorieux, toutes les épreuves que j'ai traversées auraient été un doux souvenir. Elles auraient été des épreuves pour éprouver ma force, j'en aurai tiré une gloire personnelle, cela aurait "je l'ai fait !". Tandis que, comme c'est une défaite, l'impression que cela me laisse est une honte monstrueuse... et je ne sais pas quoi en tirer. Vois-tu ce que je veux dire ?

- J'ai un peu de mal à suivre...

- On se souvient des épreuves passées jusqu'à la réussite, pas celles, pourtant les même peut-être, menées jusqu'à la défaite. Même si cette défaite n'a pas dépendu de nous.

- Aaah, oui ! Je viens de comprendre. J'étais surpris de ces explications sorties un petit peu de nulle part. Aussi je ne savais pas trop quoi répondre au déballage sentimental de Finn. Il n'avait pas le ton léger qui le caractérise si bien. Il était, là, très sérieux. Puis j'ai pensé revenir à l'objet du début de notre discussion : Il te reste à me parler de deux autres batailles, celle où tu es un vétéran en première ligne et la seconde où tu as commandé.

- Aaah ! Tu ne perds pas le nord toi ! J'aime beaucoup cela ! Se reprit Finn en souriant d'abords puis en riant à la fin. Très bien, jeune recrue, très bien. Ma dernière bataille en tant que vétéran ne remonte que à quelques semaines. Le Chevalier Rollon menait ses troupes et nous allions à la rencontre de la fausse armée du Royaume de Arl. La bataille a tournée en notre avantage rapidement et l'armée en face a reculé jusqu'à rompre le combat. Cela était invraisemblable. On apprenait plus tard qu'elle nous avait contourné pour se diriger vers Elk tandis que nous rentrions vers Poiter. En vérité, peu de mes camarades sont morts ce jour-là. Mais j'étais bien en première ligne, je peux te le juré.

- Je te crois sur parole.

- Enfin, la bataille où j'ai commandé sur mon beau cheval de guerre est la même que celle où tu es tombé courageusement en défendant la porte de la ville.

- Ah bon ?! Tu étais où ?

- Alors... en fait je suis arrivé juste au moment où tu es tombé, à peu près.

- Oooh, c'est possible que... J'essayais de me remémorer quelque chose. Je crois me souvenir d'avoir entendu des ordres criés au-dessus de la mêlée.

- Lesquels ?

- Quelque chose d'assez classique, hein. Du genre "Chargez ! Défendez les murs !". Dans ma tête je croyais entendre le Chevalier Rollon.

- Eh bien c'était moi !" Et Finn rigola ouvertement.

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