Partie 7 : Proposition

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Au même moment que l’interview de Gontran et ses amis, au 50ᵉ étage :

— Je n’arrive pas à y croire, s’étonna Marguerite. Gontran à la télé !

Juda, complètement exaspéré, soupira :

— Il est complètement torché, ce con… Et c’est quoi encore son histoire de « Richard et Rachid » ?

— Et cette histoire de bons et mauvais immigrés qui travaillent, de son ami, t’as compris quelque chose, toi ?

— Non… mais crois-moi, Marguerite, on a eu de la chance qu’il ne se lance pas dans son débat sur les pénis animaliers.

— En tout cas, je suis contente de voir qu’il va bien. J’espère que ma p’tite Marie aussi va bien. On devrait leur envoyer une lettre, quand même…

— Je t’ai déjà dit que c’était hors de question ! hurla Juda avant de reprendre son calme. Surtout maintenant que ce con a montré toute l’étendue de sa connerie à la télé.

Marguerite se leva brusquement du canapé :

— Oui, Juda, on a compris que tu ne veux pas que les autres fassent le lien entre toi et les habitants du bas ! Mais je te rappelle que Gontran est ta seule famille, et les gens savent déjà que nous venons d’en bas, comme la plupart ici.

Juda se leva lui aussi et attrapa violemment le bras de sa femme :

— Peut-être, oui, mais garder contact avec les rats du bas montre que tu RESTES un rat ! dit-il avec force. Surtout quand les rats sont au DIXIÈME étage, et maintenant, ce con a révélé que nous sommes une famille d’immigrés !

Il lâcha son bras avec brusquerie avant de s’éloigner et d’expliquer :

— J’ai beau être né et avoir grandi ici, je reste un fils d’immigrés, donc… un immigré. Alors crois-moi, je souhaite encore moins que quelqu’un sache qu’il est mon cousin.

— Et comment veux-tu que quelqu’un fasse le lien entre toi et lui en lui envoyant une lettre !? s’exclama Marguerite. Quoi ? Le facteur va ouvrir notre lettre et lire ce que tu lui dis ? Si c’était le cas, on serait déjà grillés depuis longtemps !

— Non, c’est non, bordel, Marguerite ! explosa Juda en tapant sur la table à manger. Je te rappelle que je suis ton mari, et que dans notre magnifique Tour patriarcale, tu me dois un respect absolu !

Marguerite, qui avait une forte tête, se tut quand même, laissant paraître malgré elle son désaccord. Juda, qui connaissait bien l’entêtement de sa femme, se rapprocha brusquement d’elle et la menaça :

— J’espère pour toi que tu n’as pas, et que tu n’enverras pas de lettre dans mon dos, parce que sinon… !

— Oui, je sais : violer l’autorité de son mari peut mener à une rétrogradation. T’inquiète, je n’ai rien fait, et je ne ferai rien, répondit-elle d’un ton sec en lui coupant la parole.

Soudain, quelqu’un sonna à la porte, les interrompant. Juda lâcha aussitôt sa femme et prit son plus beau sourire. Marguerite fit de même : le couple faisait très attention aux apparences.

En ouvrant la porte, Juda annonça la venue d’une personne inattendue :

— Bah ça alors… Monsieur Lucifer ! Mais que faites-vous ici, enfin ?

— Bonjour, mon cher Juda, veuillez m’excuser du dérangement. Je venais vous parler d’un sujet très important. Puis-je entrer vous expliquer ?

— Mais oui, bien sûr ! Venez donc !

Lucifer entra, et après avoir salué Marguerite, il s’installa à la table à manger. Marguerite proposa à boire, ce qu’il refusa, avant que le couple du milieu vienne s’asseoir en face de lui pour connaître la raison de sa venue :

— Tout d’abord, Juda, Marguerite, encore merci de me recevoir aujourd’hui.

— Mais c’est normal, enfin, monsieur Lucifer, ma femme et moi sommes toujours disponibles pour vous.

— Ça me touche énormément. Alors voilà : d’ici quatre semaines environ, Richard organisera un énorme meeting au 17ᵉ étage, et j’aimerais que vous soyez à nos côtés, sur scène.

Juda et Marguerite furent surpris :

— Ma femme et moi ? Sur scène ? C’est beaucoup trop d’honneur, enfin… Je ne sais pas si nous le méritons…

— Mais si, voyons ! Vous avez préparé toute la réception la dernière fois, c’est en partie grâce à vous que nous avons pu commencer tout ceci. Il faut que vous soyez là ! Et je vous le dis : quand tout ceci sera terminé, vous êtes en tête de liste pour être « surclassés ».

Juda eut énormément de mal à ne pas exploser d’euphorie en entendant ce simple mot : surclassés.

Ne voulant pas tout gâcher, il reprit ses esprits et répondit calmement :

— Vous nous faites trop d’honneur, monsieur Lucifer… Comment refuser après toutes ces gentilles paroles ? dit-il en regardant sa femme, un sourire accroché au visage.

— Je suis ravi de vous savoir parmi nous, Juda… et vous aussi, Marguerite !

Marguerite, qui s’était contentée d’écouter jusqu’ici, prit enfin la parole :

— Je suis moi aussi très honorée par votre offre, cependant je suis assez timide… Ce genre d’événement me mettrait beaucoup trop mal à l’aise, dit-elle, cherchant clairement une excuse pour ne pas participer.

— Ne vous en faites pas, madame, seul votre mari a besoin d’être sur la scène, devant tous ! Vous pouvez rester en coulisses, avec « l’équipe des ténèbres », comme j’aime les appeler, répondit Lucifer en souriant.

Ne voyant pas quoi répondre pour éviter d’y aller, Marguerite finit par accepter la proposition de Lucifer, ce qui le remplit de joie.

— Oh, et attendez, dit-il en farfouillant dans ses énormes poches. Maintenant que vous faites officiellement partie de l’équipe, je dois vous remettre certaines choses.

Le couple se regarda, avant de reporter leurs yeux sur ce que Lucifer allait sortir.

— Tenez : vos badges du parti, à vos noms. Vous en aurez besoin pour passer la sécurité.

— Vous aviez déjà fait nos badges nominatifs !? s’étonna Marguerite.

— Eh oui, il n’y avait aucune raison que vous refusiez, sachant que vous détestez autant que nous ces sales migrants. En tout cas, c’est ce que votre mari a laissé présager lors de la réception.

Lucifer adressa un sourire à Juda, qui le lui rendit avec un sourire gêné.

— Et de toute façon, conclut Lucifer, si vous aviez dit non, je n’aurais eu qu’à les jeter.

— Effectivement, acquiesça Juda.

— Et j’ai autre chose ! Ça, c’est une preuve que vous êtes sous ma responsabilité, et donc de potentielles personnes à surclasser.

Soudain, Lucifer sortit un pistolet tout noir de sa poche. C’était un modèle très basique, avec l’emblème de Lucifer, ainsi que les chiffres « 66/6 » écrit en blanc, représentant son numéro d’étage et de porte.

À la vue de cette arme, Juda et Marguerite reculèrent instinctivement de quelques millimètres.

— N’ayez pas peur, enfin, je ne vais pas vous tuer, les rassura Lucifer. Nous, les « anges », on a tous un type d’objet favori. Pour montrer qui l’on souhaite potentiellement surclasser, on confie cet objet à la personne.

— Oui, et une fois que les périodes de surclassement commencent, l’objet fait office de preuve de participation au fameux « tournoi » pour devenir un ange, conclut Juda.

— Eh bien voilà, vous connaissez la règle, mon bon Juda.

— Évidemment. Il n’y a que pour devenir un « ange » qu’il y a un tournoi pour être surclassé. C’est juste que… voir une arme m’a surpris, haha, désolé.

— Il n’y a pas de mal, mon bon Juda ! Gardez bien cette arme, d’accord ? D’ailleurs, vu que vous commencez déjà à être connu, cette arme pourrait très bien vous servir pour vous protéger, haha.

Après cela, Lucifer partit aussitôt, laissant Juda et Marguerite complètement retournés.

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