04h05

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Un mélodieux bourdonnement au petit matin, sous le ciel étoilé, les firins nous éclairent, telle la lune printanière. Un léger clapotis dans leurs eaux, ils sourient, les aquinas, sont comme ça.

Nous voilà liés dans une perception sensorielle commune, je ressens son souffle discret, les feuilles bruissent dans une brise timide. Des parfums musqués, boisés et ambrés s'ajoutent à ce tableau vivant, puis la douceur de la literie effleure sa peau dénudée d'une caresse sensuelle. C'est ainsi par procuration que je vis cela depuis mon hôte.

Malgré mes connaissances, jamais je n'aurais imaginé que cela soit aussi intense, mes propres analyses sont altérées par les siennes devenant ainsi plus subjectives. Pendant qu'un goût neutre s'accumule dans sa bouche un léger liquide coule de ses lèvres jusqu'à sa joue. Enfin, depuis son regard souriant, les poutres en chêne, vieilles, mais solides.

Michel dort sûrement, mais Papa doit déjà être réveillé. En tout cas, je suis contente d'avoir écouté Yumi. Mes draps ont conservé l'odeur de la lavande que j'ai mise hier.

Ses réflexions passent sur les miennes sans avertissement. Michel est son frère, Papa, ce doit être Kenji, Yumi est l'herboriste du village. Ces informations viennent de ma mémoire sémantique, sans qu'elle ne soit mienne. La couverture encore chaude glisse doucement sur ces cuisses par l'inertie de la gravité, tandis qu'elle se redresse joyeusement.

Dans le miroir son regard émeraude se reflète, un visage ovale aux traits délicats et juvéniles. Une peau d’un blanc éclatant, le revers de sa main essuie sa joue, puis ses doigts glissent dans sa courte chevelure ébène pour aplatir les épis du matin. Son apparence est sans en douter celle d'une Hahaoya, ce peuple est pourtant éteint.

Mes cheveux repoussent si vite, je passerai chez Annie tout à l'heure.

Son rire accentue ses yeux amande et sa petite bouche ronde. Son regard fixe sa poitrine modeste avant un léger soupir de soulagement. Ses tétons pointent en réaction aux températures légères du matin. Elle tourne la tête à droite. La fenêtre est entrouverte, et à côté un calendrier de treize mois. Encore une chose que je connais, mais sans vraiment me rappeler.

La table en dessous est couverte de feuilles et d'un encrier. Les aquinas nagent dans la vasque de sa commode sur la gauche.

Les firins virevoltent en restant à l'extérieur de la maison, ces petits insectes bioluminescents oscillent du bleu au vert à l'exception de la reine qui est d'une teinte écarlate.

Mizuki repousse sa literie sur le côté d’un geste vif, puis s’assied au bord du lit. Elle ouvre le tiroir de sa table de nuit, avant de saisir un vieux briquet. La bougie citronnée s'éclaire, ses bras s'étirent, elle inspire avec joie. Sa chambre rustique est minimaliste et épurée.

Il faut que je demande à James s’il peut commander d’autres bougies. Oh, et aussi de nouvelles culottes ! Tatsuya m'en a emprunté une hier, je me demande pourquoi la sienne était sale.

Ses pieds se posent sur le tapis en laine, d'une impulsion souple, Mizuki se lève avec calme. Quelques pas vers la fenêtre, puis elle se tourne face au miroir. D'un doigt sous l'élastique elle ajuste sa culotte, puis paumes ouvertes étire ses bras au plafond. Les secondes s'écoulent, une minute, puis deux.

Elle abaisse son torse sans plier les genoux et pose fermement ses paumes au sol, passant ainsi du tadasana à la posture de l'uttanasana. Cela me laisse libre de réfléchir, déjà, ce n'est plus le calendrier grégorien qui est utilisé. Mizuki est bien une Hahaoya, mais une chose est étrange et il m'est impossible de le définir pour le moment.

Il faut que je pense à finir ma chanson, je n'ai pas eu le temps hier. Je dois aussi en écrire une pour l'anniversaire de Tom et de Yuki.

C'était brusque... Le son strident d'un réveil mécanique devient audible.

— Michel ! Éteins ce stupide engin !
— Désolé, laisse-moi une minute.
— Tu sais que je peux venir te réveiller le matin si tu veux ?
— C’est gentil, mais ça fait partie de mes responsabilités.
— Très bien, je n’insiste pas.

Michel est trop obstiné parfois, mais c’est une de ses qualités.

Sans que je le réalise, les sens de Mizuki s’effacent. Ma conscience glisse involontairement vers ceux de Michel. C'est comme changer de chaîne, sauf que ce n'est pas moi qui ai la télécommande. Une chambre plus sobre, plus étroite, un matelas dur sous ses fesses ferme.

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