04h18
Pendant un cours instant, le prénom de Naya me parvient, mais il ne se rattache à rien de tangible.
Ses mains appuient fermement sur le sol pendant que son pied droit impulse une poussée légère.
Ses jambes s’élèvent avec fluidité vers le plafond.
Elle crée ainsi une transition entre l’uttanasana et l’adho mukha vrksasana.
Ses deltoïdes et triceps maintiennent la charge de son poids sans tremblements.
— Est-ce que Kuroki a pu t’offrir ta nouvelle épée ?
Elle s’exprime calmement malgré l’effort.
— Pas encore, ces commandes s’accumulent en ce moment.
Son regard se fixe sur le tapis.
Cette tache était là avant la naissance de Michel… Ça m’a toujours intriguée.
Sa pensée fait ressurgir un souvenir impersonnel en moi.
Quinze ans plus tôt…
Émilie se lève en soutenant son ventre, mais soudain elle perd les eaux.
Son hurlement attire immédiatement Yumi et Annie qui entre dans la chambre avec rapidité.
Cette donnée n’appartient pas à mon Chishiki.
Il est possible que ce soit lié à un observateur conçu de mon vivant, mais impossible de l’identifier.
De plus, en théorie, il n’aurait pas survécu à ma mort physique.
Enfin, il devrait être numéroté, mais tout me ramène au prénom de Hana.
Mizuki pousse sur ses doigts et lève encore plus son corps.
— Le fraisier de Samuel était absolument délicieux !
Sa voix est vive.
— J’ai vu ça ! Une fille un peu trop gourmande en a englouti la moitié.
Celle de Michel devient traînante.
Il ne faut pas que mes pensées deviennent trop envahissantes sur mes observations.
Mon rôle est d’observer pour mon Chishiki et non de faire des hypothèses.
Son visage grimace et ses sourcils se froncent.
— Ce n’est pas ma faute si on n’en mange pas souvent.
— Mieux vaut se modérer pour ne pas rendre fades ce que l’on aime.
Ses lèvres s’étirent en un large sourire.
— Papa m’a dit exactement la même chose ! Donc, hier, je lui ai demandé d’acheter une brioche.
Michel se met à rire sans retenue et Mizuki le rejoint dans ce même geste sociale.
— Tu es vraiment incorrigible !
— Toi aussi tu es gourmand !
Elle laisse planer un court silence…
— Rappelle-moi qui prend toujours les plus gros morceaux de viande ?
— Toi, évidemment ! Tu manges comme quatre.
Ses joues rougissent faiblement.
— Mauvais exemple !
Ses jambes redescendent vers l’avant pendant que son dos se voûte.
Elle transite ainsi entre l’adho mukha vrksasana au chakrasana.
Chaque muscle de son corps s’étire…
Son ventre émet un faible gargouillis qu’elle décide d’ignorer.
Sa respiration reste maîtrisée, chaque inspiration est courte et ses expirations lentes.
Le silence entre eux me permet de réfléchir à l’absence de technologie moderne.
C’est sûrement lié à un événement majeur…
On remet rarement un calendrier à zéro surtout au vu de l’établissement du grégorien.
Il y a cependant plusieurs causes possibles que ce soit la guerre où des événements climatiques.
Dans tous les cas, l’an 2706 est celle de ce changement.
— On a de la chance d’avoir Éline et Samuel.
Michel s’exprime fermement.
Un moustique entre et se pose sur la poitrine de Mizuki qui ne réagit pas.
— C’est vrai, ces pâtisseries sont exceptionnelles !
— Sans parler de la viande fraîche que prépare Éline à la boucherie.
— Dire que c’est moi que tu traites de gourmande !
— On l’est tous un peu au fond.
Ses yeux se ferment tranquillement et son ouïe se fixe sur la voix de Michel.
— Tu crois que le bébé d’Éline va naître bientôt ?
— Yumi m’a dit que c’est pour dans trois mois.
— C’est une bonne nouvelle.
Michel marque une courte pause, son souffle est calme.
Le bruit de la page qu’il tourne parvient à Mizuki malgré la séparation de leurs chambres.
Il est évident que ses sens sont beaucoup plus développés que ceux d’un humain…
Cela pourrait être lié au fait qu’elle est une Hahaoya.
Tout du moins uniquement du côté maternel, il reste donc la génétique paternelle qui manque.
— Tu sais comment ils vont l’appeler ?
— Non, et toi ?
— Je crois qu’ils hésitent encore.
Le moustique marche sur elle, mais elle ne bouge pas.
Elle observe ses pattes bouger en tripode, puis ses antennes denses et duveteuse.
Elle fixe son rostre court et ses lèvres s’étirent.
C’est un mâle !
Ils ne piquent pas.
Elle tend ses muscles avec calme…
Brusquement, un bruit sourd provient de la chambre de Michel.
— Ça va ?
Michel soupire.
— Oui, rien de grave.
Ses sensations s’effacent et mes perceptions se connectent aux sens de Kenji.

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