05h35
Ses doigts tournent une page dans un discret froissement.
D’une main sereine elle dépose la pointe de sa plume au contact du papier.
Les mots se forment rapidement sous ses gestes lents.
Ses fesses reculent légèrement et son dos se cale contre le dossier de la chaise.
Autour d’elle, son bureau est méticuleusement rangé et organisé.
« Furvivius est ton nom scientifique, mais tous t’appellent Furvius ! »
« Mammifère nocturne si mignon aux petites oreilles rondes… »
« Sur ton adorable frimousse ovale, ta truffe rose frétille et tes yeux réglisse pétillent. »
« Ta minuscule bouche sourit, tes moustaches frémissent. »
« Ta fourrure grisâtre tachetée de noir et ta longue queue touffue te rend tout doux. »
« Enfin, tes fines pattes se terminent par de petites griffes crochues. »
« Ta nourriture se compose d’insectes nuisibles et de petites plantes toxiques ! »
« Tu habites les espaces confinés, mais excelles dans l’art de grimper. »
« Tes petits cris signalent le danger, tandis que tes couinements discrets t’offrent l’amour. »
« D’une portée de trois à cinq individus, avec huit ans de vie moyenne. »
« J’aimerais que tu ne sois plus chassé… »
— Même si ta viande est délicieuse, tellement tendre et savoureuse !
Son murmure accompagne sa main.
— Ah…
Son soupir est assez prononcé.
Quelle idiote je fais, il va falloir que je réécrive cette page.
Je regrette encore d’avoir mangé du furvius, mais la faim ne laisse souvent pas la morale dominée.
Après tout, qui n’a pas de regret.
Elle détache la page du livre avec soin.
Il me paraît évident que le rôle du furvius est également écologique au vu des écrits de Linda.
Il est probable que sa création avait pour but de réduire voir supprimer toutes formes de pesticides.
Mirina aurait sûrement pu m’expliquer tout cela en détail…
Pourquoi son prénom me revient-il maintenant…
Elle essuie rapidement un filet de bave du coin de sa bouche avec un mouchoir.
Après un instant, elle se lève et se dirige vers les escaliers.
Elle monte doucement les marches, puis traverse avec calme le couloir étroit au parquet grinçant.
Sa main abaisse la poignée qui grippe légèrement et Linda entre dans la petite cuisine rustique.
Elle se rapproche du grand vaisselier noueux d’un pas ferme
Elle ouvre le petit tiroir de droite et commence à fouiller.
Où est-ce que j’ai mis la cannelle ?
Une phrase prononcée par Mirina me revient en mémoire…
— Sans harmonie, personne ne survit. On doit apprendre à s’adapter pour ne pas mourir.
Ah, la voilà !
Cette épice est vraiment géniale.
Ses sensations s’effacent et mes perceptions sont désormais connectées aux sens de Kenji.

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