chapitre 5
Mathilde ouvrit les yeux. Il faisait encore nuit. Elle avait encore dans la bouche un goût suave, une saveur douceâtre de sucrerie. 6 h s'affichaient sur le réveil de sa table de nuit. Le poignard de la réalité lui vrilla le cœur. C'était le jour où elle allait devoir prendre ce train. Seule face à sa peur, son angoisse, sa terreur. Rien n'était plus terrible que de se réveiller en se rendant compte que rien n'avait changé. Les vibrations de panique s'enclenchaient dans son corps à un rythme diabolique. Une saveur métallique qu'elle avait du mal à déglutir envahissait sa bouche et sa gorge. Elle se précipita aux toilettes pour vomir une bile verdâtre et acide. Mourir serait la solution.
Elle se releva, regarda un instant son reflet dans le miroir à travers ses yeux embués de larmes. Elle crut distinguer une ombre, un visage, une forme. Elle se retourna pour constater le vide derrière elle. Elle tremblait. Elle alluma toutes les lumières, visita fébrilement toutes les pièces de son appartement. Elle était seule. "Je fais une crise de panique, il n'y a personne. Doucement, son calme revint. Elle était épuisée. Triste et misérable.
L'eau tiède de la douche chassa les relents fétides de son réveil. Elle reprenait peu à peu le contrôle de ses émotions, retrouvait la force et la confiance qui la caractérisait. "Je vais y arriver ! Rien ni personne ne pourront m'empêcher d'aller ou j'ai décidé d'aller !"Elle fixa son regard dans la glace : je suis l'écrivaine, la réalisatrice de ma vie !"Ses yeux lançaient des éclairs. Je vais prendre ce train, et tout va bien se passer !"Une voix dans sa tête lui souffla tranquillement qu'elle pouvait toujours le croire...
Elle traîna sa valise, le jour se levait doucement. Les lumières des lampadaires étaient encore allumées pour quelques matous qui s'enfuyaient en feulant à son approche. Ses pas résonnaient sur le trottoir. Quelqu'un, qui l'observerait de loin ne pourrait s'imaginer la force et le courage qui l'animait, qui la portait vers sa destination : la gare.
Elle eut envie de s'asseoir un moment et somme toute elle avait encore du temps avant le départ. Elle s'engouffra dans un café. La salle était déserte, ce qui la surprit, car elle s'attendait à y trouver plusieurs voyageurs attendant devant une boisson chaude. Un homme appuyé au comptoir, le visage caché derrière la capuche de son manteau semblait dormir devant un verre de vin blanc. Le garçon de café derrière le comptoir la salua :" Bonjour Madame qu'est ce qui vous fera plaisir ?" Elle faillit répondre : une bonne grève pour que j'aie une raison de ne pas prendre ce foutu train ! Mais elle s'entendit répondre : "donnez-moi un café s'il vous plaît."
Elle tourna sa cuillère dans sa tasse, rêveuse, et ne vit pas l'homme entrer dans la salle. Elle leva la tête quand il s'assit en face d'elle. Il lui souriait et elle reconnut l'employé de la gare qui lui avait vendu le billet. "Bonjour Mathilde, vous êtes bien courageuse "Surprise, elle laissa retomber sa petite cuillère. Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? L'homme lui souriait toujours, il émanait de lui un calme et une immense sérénité, qui faisait comme un halo autour de lui.
"Je suis là pour vous accompagner dans votre voyage, expliqua-t-il, vous avez pour le moment réussi avec brio toutes les étapes de votre démarche : acheter le billet, venir jusqu'à la gare à l'heure. Je vous propose de faire ce voyage avec vous".
" Mais je ne vous ai rien demandé ! S'écria-t-elle. Veuillez cesser de m'importuner, je ne vous connais pas !"
- Ne refusez pas mon aide, je sais que vous en aurez besoin, il faut saisir la main quand elle se tend vers vous.
- Ah oui, lâcha Mathilde de plus en plus énervée et comment comptez-vous m'aider ?
- En vous montrant toutes les forces et les ressources que vous avez enfouies au fond de vous et que vous ne percevez pas encore.
Interloquée et intriguée, elle fixa son regard dans les yeux de l'homme en face d'elle. Il continuait à sourire et ses yeux pétillaient. Pourquoi se sentait-elle si calme tout d'un coup ? Elle ferma les yeux un instant. Quand elle les rouvrit, elle était seule, l'homme n'était plus là.
Elle se leva, laissa une pièce sur la table, prit sa valise et sorti dans la rue.
Une fois dans la gare, elle leva les yeux vers le tableau d'affichage pour repérer la voie d'où son train partirait. Au lieu de voir la suite de chiffres et de lettres attendues, une phrase unique clignotait : " Affronte ta peur, et tu n'auras plus jamais peur !"

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