Chapitre 15 : (Henry)
- J’ai froid.
Derrière mon visage impassible, je lève les yeux au ciel. Héloïse m’agace. A chaque fois que je passe un peu de temps avec elle, c’est la même chose. Elle se plaint.
Pourquoi ai-je cédé aux demandes de son père déjà ? Parce qu’il m’horripilait avec ses supplications. Je déteste agir sous la contrainte. J’avais prévu de rendre une petite visite à Aurore dans sa nouvelle cellule, et me voilà avec cette noble de pacotille ! Non, si j’avais su, j’aurais refusé le…
- J’ai froid.
J’inspire profondément. Ne pas s’énerver. Mon regard se pose Héloïse, qui tente de se réchauffer tant bien que mal. Cependant sa robe légère ne la protège nullement contre la fraicheur du soir, et le vent marin. Tant pis pour elle. Elle voulait me plaire, la seule chose qu’elle gagne c’est d’attraper froid.
- J’ai…
- Par pitié arrête de te plaindre, je finis par exploser, ce qui la fait taire. Je ne t’ai pas emmenée là pour entendre tes jérémiades.
Elle acquiesce, tremblante. Voilà qui est mieux. Je profite du silence qui s’installe pour observer la ville qui s’étend en contrebas. Cette vue me rappelle la soirée que j’ai passé avec Aurore, à regarder les étoiles. Je ne sais pas pourquoi, mais cette jeune femme m’intrigue. Elle n’est pas noble, pas instruite, mais il y a quelque chose chez elle qui m’attire. Je chasse ces pensées de mon esprit.
Ce n’est pas Aurore que tu devras épouser dans deux mois.
Alors je me tourne vers Héloïse, et affiche un sourire chaleureux.
- Excuse moi pour ma sécheresse. Comprend bien que je suis quelqu’un de très occupé, et que je consacre l’entièreté de mon temps à mes devoirs de Roi. En choisissant de rester avec toi ce soir, je délaisse mon peuple. Aies au moins l’amabilité d’apprécier ce cadeau que je te fais, s’il te plaît.
- Oh mon Roi, pardonnez mon comportement ! Elle s’écrie, les lèvres bleues. Je ne voulais pas vous offenser. J’ai toujours aimé votre compagnie si intéressante ! J’étais seulement surprise que vous ayez choisi cet endroit pour notre rendez-vous.
Je peine à garder mon sourire. Comme je m’y attendais, elle se dévalorise et me met sur un piédestal.
- Je voulais cette fois-ci, vous permettre d’apprendre à mieux me connaître. Tout en faisant preuve d’originalité. Et le plus haut balcon de mon palais m’a paru être une excellente idée. Il n’y a rien au monde de plus vaste, de plus beau que les étoiles. Tenir une conversation sous leur lumière est pour moi sentimental.
Elle ouvre de grands yeux, et un sourire se dessine sur son visage arrondi.
- Je suis enchantée d’apprendre que les étoiles vous fascinent. Je me suis moi-même beaucoup intéressée à ces astres. D’autres formes de vie se cacheraient-elles dans ces points lumineux ? Serions-nous capable d’aller vérifier un jour ?
Ses questions se frayent un chemin jusqu’à mon esprit, familières. Il y a peu, j’avais tenu un discours similaire à Aurore. Je secoue la tête, tentant de la chasser de mes pensées. Je me force à reporter mon attention sur Héloïse qui me dévore du regard. Ses cheveux blonds et lisses encadrent son visage fragile, protégeant son cou fin. Une expression béate déforme ses joues et se reflète dans ses yeux verts. Un visage d’ange, ni plus ni moins. Et pourtant, je ne peux m’empêcher de trouver sa peau trop claire, trop maquillée, ses iris pas assez bleu, et son admiration pour moi trop encombrante.
De même, ses paroles sont trop en accord avec les miennes. Son éducation ne l’empêche pas de toujours vouloir me donner raison car je suis le Roi. Jamais elle ne me froissera. Jamais je ne la dégouterai, qu’importe ce que je fais, qu’importe si je me montre odieux avec elle.
Même son prénom ne me convient pas.
Je porte les mains à mes tempes, et pénètre son esprit, qui m’apparait aussi lisse et rangé que je l’imaginais. Dés mon arrivée, un gros nuage de lumières se dirige vers moi. En voyant le nombre de souvenirs reliés à ma personne, je quitte la mémoire de ma promise pour revenir à la réalité.
Je réalise enfin ce petit plus qu’Aurore détient contrairement à Héloïse.
Des secrets.
Qui sont d’autant plus intéressants car inaccessibles même avec mon aptitude.
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