Le vide

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Je ne crois pas connaître de sensation d'abandon, d'immensité plus puissant que d'être collé à une vitre face au vide spatial, avec de l'encre circulant dans le corps. Une contradiction puissante entre ce vaisseau cargo plus proche d'un charnier et l'espace infini. Les murs de la cellule son recouvert de gravure sur la religion, ma religion ? Je ne crois pas avoir eu le choix avec ma famille.
Texte, enseignement, école, je n'ai jamais choisi, j'ai juste grandi dans des lignes tracées dès mon apprentissage sans trop réfléchir, je n'avais le choix. Ironique, je suis condamné par cette même religion sans même savoir à qui vraiment jeter la pierre. Elle m'a tout pris, mon fils ainsi que sa mère, mes amis, mais je n'arrive même pas à lui en vouloir. C'est juste une voix, des préceptes et beaucoup trop de protocoles.
Vouloir se battre contre elle, être en colère face à des idées, c'est aussi absurde qu'un non-sens, alors j'accepte, comme si j'avais le choix. Mourir ou suivre un chemin, je n'ai pas réellement eu à réfléchir longtemps. J'ai essayé de monter le plus haut possible pour changer des choses, j'y croyais. Je m'y suis brulé, ainsi que toute la cohorte. Et me voila à nue face au vide à allumer ma quatrième cartouche d'affilée. La pièce est obscurcie par un épais nuage bleuté de fumée enivrante. Le maigre souffle de la bouche d'aération au plafond semble tout juste suffisant pour faire passer l'air recycler, empêchant la fumer de se dissiper.

Attendre, dormir, puis de temps et temps, on me lance par la porte une gourde de bouffe hyperprotéiné et cinq cartouches. La cellule devient un amoncellement de fumée et d'humidité liée à la douche qui ne sort qu'une eau brulante ou il est impossible de rester plus de trois minutes. Ça me donne presque un rictusse. Ce sont des des conditions bien meilleures que la plupart des affectations que j'ai connues avec mes soldats au cours des trente dernières années.

La majorité de mes connaissances trouvaient le vide spatial chiant et répétitif, je l'ai toujours vue comme fascinant, encore plus avec l'encre.
Je suis sortie de ma contemplation par l'ouverture et la porte. Toujours une femme de foi en rouge. Une autre que la précédente , ce ne sont pas les mêmes cicatrices qui transparaissent de sa tenue. Cette fois-ci, elle est accompagnée de deux personnes, une femme et un homme nus. Je pointe la femme, elle rentre.

J'arrive enfin, le dernier caprice du corps offert à ceux qui choisisse l'Arche. Je pensais que c'était une légende. Les limite avec les ont dits, les légendes commencent à devenir flou pour moi. L'existence même de ce vaisseau était tout au plus une histoire pour faire peur aux enfants, il n'y a pas si longtemps dans mon esprit.
La première chose qui me frappe sur la femme, c'est cette cicatrice à la gorge. Une dévouée servante qui a commis le parjure envers la religion. Les cicatrices sur sa gorge ne laissent que peu de doute, elle n'a plus de corde vocale. Ce fut fait salement au vu des marques. Au-dessus de son pubis, des entailles épaisses, beaucoup trop pour être compté. Une par âme apaisée, comme écrit dans les textes avant le long chemin de rédemptions. Ça, j'aurais mis ma main à couper que c'étaient des légendes. Plus on plonge dans les chemins de rédemptions, plus le rapport au corps devient brutal, grotesque, la chaire doit ressentir, souffrir, être marqué. Là-dessus, mon histoire ne pas trop épargnée. Cela fait bien longtemps que j'ai arrêté de compter mes cicatrices. Aucun soldat ne devrait partir au front pendant que son supérieur attend sagement derrière. Chaque cicatrice, c'est un homme, une femme que j'ai sauvée, c'est pour ça qu'il mon suivi dans chaque bataille, j'étais devant avec eu dans la boue.
Je lui tends la dernière cartouche du paquet avec le percuteur, elle la prend, l'allume et tire un grand coup de dessus. Son regard m'interpelle, elle a pitié de moi, comme si son sort été meilleur. Elle s'avance face à la vitre d'une allure assurée, voir hautaine. Son dos révèle un tatouage immense, les portes de l'Arche dans son dos. Elle a survécu là-bas, il est un grand privilège de se la faire tatouer, comme signe de rédemption accomplit, alors que fait elle ici. Revenir de l'Arche est synonyme de rédemptions à vie, comme vaincre les dieux à leurs propres jeux. Elle cale la cartouche sur ses lèvres, plaque les mains contre la vitre et se cambre. Elle n'est pas une servante, elle est ici de son plein gré. Mais pourquoi ?
Je m'approche derrière elle, je remarque de fines entailles sur ses épaules, son cou, le dos. Elle n'en a pas que sur le pubis, elle en est recouverte. Je me colle à sa chaire, face au vide, elle souffle un épais nuage d'encre acre. Quand le nuage se dissipe, le vide dévoile la destination, ce point lumineux qui se rapproche. Mon cœur rate plusieurs battements, tout devient concret. Elle saisit mon sexe sans douceur et le plaque sur le sien, je la pénètre, comme dans une forme de trans face à cette fatalité.
C'est une station spatiale hors norme, une gigantesque arche dans le vide spatial. D'autre point lumineux s'y dirige, d'autres vaisseaux, certains en repartent. Un frisson parcours le corps de la femme, plus on se rapproche, plus, elle rentre en transe, c'est elle qui mène le jeu, jusqu'à que l'Arche prenne tout la place dans la fenêtre. Tout devient un balai bestiale face à cette vitre agrippée à son corps. Nous avons tous deux les yeux rivés à cet astre de métal luisant. Avec le mouvement, la fumée, l'encre, c'est presque un mirage.

L'arche ou la porte vers le royaume des dieux n'a pas de 'toit', ce n'est pas une légende, tout se passe à sa surface, même d'ici, je peux voir l'agitation. Elle a la forme d'une énorme Arche avec en sont centre des bâtiments parfaitement parallèles des deux cotés d'une allée blanche qui doit être d'une taille disproportionner qui la traverse de sa base juste qu'au dôme. Sur les extrémités de l'Arche se trouvent des bâtiments immenses à la gloire de la religion qui semblent être derrière des murailles tout aussi grandes et disproportionnées. Les vaisseaux approchants le spatioport à la base de l'Arche paraissent ridiculement petits. La taille de la station n'a aucun sens d'un point vu technologique, je n'ai jamais rien vu d'aussi démesurée voguer dans le vide spatial. Mon esprit doit me jouer des tours, mon sang doit être plus bleu que rouge en cet instant. Un rêve peu être, nos deux corps en transe face à cette immense porte flottent dans le vide. Mes sensations sont tellement contradictoires. La peur, l'excitation de cet instant charnel et de la découverte, l'appréhension, je ne sais même plus que penser, que ressentir.

Je reste face à la vitre, figé. Comme un vide, une faille, l'instant d'avant, on était deux dans un rapport bestial et protocolaire. Seul, le cargo et sûrement dans la file pour le spatioport. Je ne vois plus qu'une petite partie de la station, pas qu'elle semble plus petite, bien au contraire, elle est tellement grande que je n'en vois qu'une petite portion emplissant la baie vitrée.

La pièce est désenfumer, la grille d'aération parait reparé ou simplement mise marche. Je prends une douche, l'eau n'est plus brulante, juste chaude. Sur le lit une toge noir. Je l'enfile et vois mes bras brulés sous le textile. Le même tissu que la sainte en tenu rouge, mes marques sont visibles, je me sens plus nu avec cette tenue que sans.
Aucune trace de la femme dans la piece, est elle seulement passé. Par terre, je ramasse le paquet de tissu contentant les cartouches, il est vide, quelqu'un frappe à la porte, c'est bien la première fois.

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