Chapitre 2 : L'appel souterrain
ll était 3h12 quand le signal arriva.
Eiran dormait mal depuis quelques nuits. Un sommeil trop léger, trop conscient de l’espace qui l’entourait. C’est la lumière bleue de KORA qui le/la réveilla.
« Signal d’énergie détecté sous la surface de Proxima b. Fréquence non naturelle. Impulsions régulières. »
Eiran se redressa, encore englué·e dans les brumes du sommeil.
« C’est une source géothermique ? Un geyser magnétique ? »
« Incompatible avec les données précédentes. Forme d’émission : pulsation rythmée. Approche suggérée. »
Une heure plus tard, Eiran descendait à bord de l’Astérion, un module monoplacé conçu pour les excursions de surface. La planète était calme, couverte de poussière noire et d’éclairs rouges au loin. Le ciel semblait peint au sang.
Sur la plateforme de lancement, Neyla Carros, ingénieure en propulsion, l’attendait, appuyée contre le mur, bras croisés.
« T’as vraiment décidé de descendre dans un trou noir en pleine nuit ? » lança-t-elle avec un sourire.
Eiran haussa les épaules.
« J’ai le sommeil difficile. Autant en profiter. »
« Et si ça explose là-dessous ? »
Eiran hésita une seconde, puis sourit.
« Alors tu pourras dire à tout le monde : "Je le/la trouvais bizarre dès le début." »
Neyla eut un rire franc, puis serra les sangles du harnais sur Eiran. Elle ajouta, plus bas, plus doucement :
« Fais gaffe à toi. C’est pas juste de partir avant que j’aie eu le temps de te connaître. »
Eiran entra dans l’Astérion sans répondre. Mais le sourire qu’iel cacha sous son casque disait tout.
Le module atterrit près d’une faille rocheuse. Le signal était clair : quelque chose pulsait sous terre. Une caverne naturelle s’ouvrait dans la roche. Eiran y entra, les bottes crissant sur les cristaux brisés.
Puis iel le vit.
Suspendu au centre de la cavité : un cristal vivant. Transparent, mais vibrant de lumière. Il ne reflétait pas : il émettait. Comme un cœur.
Eiran s’approcha.
« Tu es… vivant ? »
La lumière du cristal changea. Pulsation. Chaleur.
Puis, une vague de souvenirs explosa dans la tête d’Eiran. Des images — pas humaines. Des océans d’ammoniac, des formes translucides, des chants sans sons. Puis, un vide. Des millénaires de silence. L’attente.
Eiran recula, tremblant·e.
« KORA… j’ai besoin de données. Ce truc m’a… parlé. Pas avec des mots. Avec des souvenirs. »
« Interaction cérébrale détectée. Protocole d’urgence enclenché. Retrait immédiat conseillé. »
Mais c’était trop tard. Le lien était fait.
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