Chapitre 3
Le sol était rugueux sous ses doigts. L’herbe, trop verte. L’air, brut.
Argent se redressa lentement, son regard d’or scrutant l’horizon avec une méfiance muette.
Il avait chuté d’un monde de lumière, et foulait à présent un sol grossier. Chaque pixel de ce paysage le heurtait comme une insulte à sa grandeur. Les arbres étaient cubiques, les montagnes carrées, les nuages eux-mêmes semblaient avoir oublié comment être beaux.
Mais une chose l’interpellait.
"Tout ici était vivant."
Désordonné, mais libre.
Il fit un pas. Puis un autre. Ses bottes de soie céleste s’imbibèrent de boue. Le manteau royal s’accrocha aux feuilles. Il ne pesta pas. Il se contenta de lever le menton.
> " Le chaos a du charme. Très… primitif. "
Il marcha jusqu’à un bosquet. Du bois, pensa-t-il.
Dans son monde, il levait un doigt, et l’univers pliait. Ici ? Rien.
Il tenta de briser une branche. Elle ne céda pas. Pas tout de suite. Il frappa encore. Encore.
Et enfin, un bloc tomba à ses pieds.
Un bloc de bois brut. Rugueux. Carré.
Il le ramassa. L’observa. Tourna autour. Tapota.
Puis soudain, un éclair de données lui traversa l’esprit.
Des fragments de codes invisibles se mirent à luire dans sa conscience. Il voyait... des combinaisons. Des schémas. Des recettes.
"Des crafts."
> " C’est donc cela, le secret de ce monde ? On n’invoque pas, on… façonne. "
Ses doigts agiles se mirent à l’œuvre. Il transforma le bois en planches. Les planches en table. Puis en outils rudimentaires.
Il n’avait jamais rien fabriqué de ses mains. Jamais eu besoin.
Et pourtant, il ressentit quelque chose qu’aucun palais doré ne lui avait offert.
"La sensation d’avoir conquis la matière."
Un outil cassé dans sa main. Il sourit.
Un bloc tomba mal. Il pesta.
Il chercha, assembla, rata, recommença.
Le roi aux yeux d’or se tâchait les mains.
Et il apprenait.
Il découvrit la pierre. Le feu. Le charbon. La viande encore chaude après cuisson.
Et tout cela… sans magie. Sans armée. Sans miroir.
Juste lui.
Il s’assit, à la fin du jour, près d’un feu qu’il venait d’allumer, maladroitement, dans un creux de roche.
Il observa la lumière danser sur ses doigts, sur son visage fatigué mais curieux.
> " Voilà donc ce qu’ils appellent… vivre. "
La nuit tomba. Il entendit des bruits. Des gémissements lointains, des cris, des pas étouffés.
Des monstres, sans doute. Mais il ne bougea pas.
Il restait là, les yeux ouverts sur ce nouveau monde.
Et dans le reflet du feu, "ses yeux dorés brillaient plus que jamais."
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