Chapitre 14 — Le Chasseur

3 minutes de lecture

Dans la lumière froide du jardin, Alexandre prit la parole.

Le Padre reste ici. Avec Marianne.Il nous faut trouver l’autel du sacrifice, pour y replacer le sceau et sceller la faille.

Le vieil homme hocha la tête. Marianne s’installa déjà en méditation, la main sur le sol, cherchant le chemin spirituel du rituel.

Claire, Franck — votre mission : retrouver Delajoie au plus vite. S’il frappe avant nous… tout sera perdu.

Claire vérifia son téléphone. Franck se glissa dans l’ombre avec elle, plus spectre que jamais.

Érik, avec moi, dit Alexandre. — On va faire le tour des discothèques. Il est en chasse. Et ce genre de lieu... attire les proies sans protection.

Paris. Nuit sans étoiles.

Un homme marche dans la ville. E n’est pas un citoyen, pas un politicien, pas un père.

C’est un monstre.

Son regard est vide et son souffle irrégulier. Son téléphone vibre dans sa poche : messages, appels. Ils sont tous ignorés. Il n’est plus ici pour répondre. Il est ici pour frapper.

Les rues sont devenues sa forêt. Et l’innocence… sa viande.

Pigalle. Les néons clignotent sur les vitrines fermées. Des ombres humaines passent, lentes, absentes. Et au milieu… Delajoie.

Ses pas glissent sur les pavés. Son regard saute d’une femme à une autre. Il ne cherche plus une personne. Il cherche une proie.

Sa main tremble légèrement. Dans sa poche, son téléphone vibre. Il ne le regarde même pas.

Il pense au passé.

À ce jour où tout aurait pu s’arrêter. Le bureau de la Crime. Alexandre Vasseur l’interrogeait, les preuves s’empilaient.

Il était prêt à craquer.

Et puis… elle est entrée. Tenue noire. Regard sans âge. — Va prendre un café, avait-elle dit à Alexandre. — Je prends la relève.

Delajoie, assis, la regardait sans comprendre. Elle ne souriait pas. Elle parlait bas.

Tu veux t’en sortir ? Il existe un pacte. Un nom que tu peux murmurer… Et il viendra. Il ne demande pas ton amour. Juste ton offrande.

Il ne se souvient pas avoir répondu, juste d’avoir pensé très fort à son désir de continuer. Et d’avoir rêvé, cette nuit-là, d’un autel qui respirait dans les murs de sa chambre.

Aujourd’hui… Ce n’est plus un pacte. C’est une dette.

Et dans Pigalle… Le démon veut son dû.

Pigalle. La nuit flotte comme une huile noire.

Delajoie marche lentement. Les rues sont trop propres. Les regards sont trop rapides. Il ne veut pas simplement frapper. Il veut traquer. Voir la peur fleurir dans les yeux avant la chute.

Mais il n’est pas seul.

Derrière lui, les ombres glissent. Elles ne marchent pas. Elles s’étirent, se plient, se tordent. Elles ne sont pas visibles à tous. Mais elles sont là. Et elles le suivent comme des chiens silencieux. Elles ne le protègent pas. Elles le guident.

À l’angle de la rue Frochot, une jeune femme sort d’un bar. C’est Lina, serveuse, vingt-deux ans, fatiguée, les écouteurs dans les oreilles. Elle croise Delajoie du regard.

Et elle s’arrête net.

Quelque chose ne va pas. Ce n’est pas l’homme. C’est ce qui l’accompagne.

Elle voit les ombres. Juste un instant. Comme des silhouettes en feu noir, collées à ses talons. Et elle sent le froid. Pas celui de la nuit. Celui de l’absence de lumière.

Delajoie ne la regarde même pas. Mais elle, elle recule, les yeux écarquillés, le souffle coupé.

— Qu’est-ce que… murmure-t-elle, sans finir sa phrase.

Elle trébuche, tombe sur les pavés, se relève en courant. Elle ne sait pas ce qu’elle a vu. Mais elle sait qu’elle ne veut jamais le revoir.

Delajoie continue. Les ombres le suivent. Et dans sa poche, le téléphone vibre encore. Il ne répondra pas.

Je ne suis ni serviteur… ni croyant. Je suis le chasseur, sans Dieu et sans démon. Je suis le lien coupé, le désir pur. Et ce soir… quelqu’un va apprendre la peur.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire lambeau ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0