Chapitre 2

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Cain

– Agent Caïn, un incident est survenu au centre hospitalier de la Capitale. Vous êtes requis sur place.

– Bien reçu, Sergent.

Je coupe la communication et sors précipitamment du véhicule garé en vrac devant l’hôpital. Un cri strident fend l’air, me faisant presser le pas.

Je franchis les portes, rappelé à l’ordre par cette consigne : faire mon travail sans attirer l’attention.

À peine dans le couloir, je m’arrête net. Une femme est au sol. Elle bloque l’entrée d’une chambre.

Mais ce qui me frappe, c’est le sang. Partout. Du sol au plafond. Une boucherie.

Je ne réfléchis pas et fais mon travail: j’entre dans la pièce et découvre une jeune femme.

Elle hurle, et je comprends pourquoi. On n’est jamais vraiment habitué à voir autant de sang.

Lorsqu’elle me voit, elle se tait instantanément et laisse retomber le corps inerte de la régulatrice qu’elle tenait dans ses bras.

Qu’est-ce que ça signifie ?

En entendant les autres brigades arriver derrière moi, je me remets en marche. Certains me bousculent dans le processus mais je ne dis rien, je ne dois pas.

Je m’approche à grands pas et ses cheveux noirs flottent au-dessus de ses épaules lorsqu’elle me suit du regard. J'aperçois un tremblement très léger qui la secoue et ses yeux sombres s’arrondissent.

Je me rends alors compte qu’elle fixe mon arme. Pourquoi ça l’effraie ? Elle n’est pas censée ressentir quoi que ce soit.

Je remarque que ses chevilles et ses poignets sont liés. Le sang sur sa peau m’indique qu’elle a tenté de s’enfuir.

Je fouille dans la poche sur ma cuisse et en sors le couteau que j’ai toujours sur moi afin de la détacher.

Elle ne grimace même pas quand les liens écorchent davantage son épiderme.

– Venez avec moi, je dois vous transférer dans un autre hôpital.

Sauf qu’elle ne répond pas, elle ne se lève même pas. Plus je la regarde et plus je me demande la raison de sa présence ici.

Elle n’a pas l’air blessée et même si elle l’était, les présidents de chaque zone s’en moqueraient bien de la laisser travailler avec un bras en moins.

– Pour quelle raison êtes-vous hospitalisée ?

Elle se lève lentement et je continue de la fixer, me répétant intérieurement que je suis en train de perdre mon temps. Pourquoi ai-je accepté de les aider, déjà ? Ah oui, l’alternative était la mort.

– Je suis malade, c’est tout.

La monotonie de sa voix me fait presque froncer les sourcils. On aurait dit qu’elle… Non, elle n’en fait pas exprès.

Je ne réponds pas et me contente de prendre son poignet dans ma main pour qu’elle me suivre mais chose faite, je me fige instantanément.

Un pouls. Cette fille possède un putain de pouls.

Je m’arrête et la regarde dans les yeux mais n’y vois que du vide. Je sais maintenant qu’elle s’efforce à effacer toute preuve d’émotion sur son visage alors au lieu de crier sur tous les toîts qu’une Delta se trouve à côté de moi, je me hâte vers la sortie.

J’essaie de ne pas grimacer en sentant l’odeur du sang et sa matière poisseuse sous mes semelles.

En chemin, je vois les autres soldats se battre pour réussir à maîtriser leurs sujets. Ils n'auraient pas foutu tous les deltas de la ville dans cet hôpital, si ?

Une fois derrière la porte, la fille s’arrête d’un coup et observe avec frayeur l’extérieur. Mon cerveau percute alors: elle n’a jamais mis un pied dehors.

Je lui donne déjà assez d’importance avec ce que je m’apprête à faire, je n’ai pas le temps de lui expliquer ce qu’est de l’herbe ou pourquoi le ciel est bleu.

Je la hisse sur mon épaule. Légère comme une plume. Elle tambourine faiblement mon dos, mais je n’y prête pas attention.

Je me demande ce que lui ferait un repas copieux. Elle à l’air trop mince.

Je défonce la porte de l’hôpital d’un coup de pied et me met à courir aussi vite que je le peux vers la voiture.

Je la jette presque sur la banquette arrière du véhicule dont les vitres teintées empêchent quiconque de la voir et m’installe enfin derrière le volant.

Merde. Qu’est-ce que je suis en train de faire ? Les mains crispées sur le cuir, je laisse mon regard se poser sur la maigrichonne assise dans ma voiture de service, haletante, les yeux fuyants et prisonnière.

Je prépare intérieurement le monologue que je vais servir à Sab. Je croise les doigts pour qu’elle soit indulgente pour une fois et qu’elle nous laisse garder cette fille.

Je sais ce que ça fait que d’être dans un hôpital pour se faire soigner ce qu’on ne contrôle pas, nos sentiments.

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