14. Jeux de poupées

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Arcan et moi pûmes manger, puis l’hôtesse annonça :

— Mesdames, Mesdemoiselles et Messieurs. Il est minuit. Nous ouvrons les jeux de poupées avec notre traditionnel défi-cunni. Trente euros la participation. Maître-Ulrich offre cinq cent euros à la poupée qui fera jouir Slave-One avec sa langue. Les règles sont simples, chaque participante a le droit à une minute, et ne doit utiliser que sa bouche. Interdiction de lécher les yeux. Une fois toutes les participantes passées, la première peut recommencer gratuitement.

Arcan me décrivit :

— Ils ont attaché les mains de la poupée qui a le harnais, au-dessus de sa tête, à un pilier, un décor de fausses ruines. Tu veux tenter ta chance ?

Je refusai d’un mouvement de tête. Une dizaine de poupées fit la queue près de l’estrade. Arcan continua à me décrire partiellement la scène. La première fut assez stratégique, elle l’embrassa, lui lécha les oreilles et les mamelons, cherchant un point plus sensible qu’un autre avant de s’attaquer à l’entrecuisse. Si les gémissements de Slave-One couvrirent vite la musique, ce ne fut pas elle la gagnante.

— Presque du premier coup, commenta une voix de femme.

La seconde ne sembla pas être très douée avec sa bouche. Les gémissements perdirent en intensité. Les commentaires riaient :

— Elles ne sait pas s’y prendre avec les filles.

— Je serais curieux de savoir comme elle s’y prend avec un chibre.

— Sans doute mieux. Si c’est dans sa nature.

La troisième passa, et les soupirs redevinrent profonds et sensuels. Même-moi, je ne pouvais rester insensible à pareille mélodie. Mon cœur battait plus fort, comme s’il cherchait à l’accompagner. Ne faire qu’imaginer découplait mes émotions. Ce fut la quatrième qui déclencha les premiers cris. C’était si érotique que mon ventre papillonnait de désir. Je souhaitais que rapidement on mit fin à ses attentes. La minute s’arrêta juste avant l’orgasme, laissant la poupée haleter de frustration et d’impatience. Le public retenait son souffle et ses critiques. La cinquième participante fut la plus avisée. Slave-One était à la limite de craquer, mais elle utilisa les trente premières secondes pour la mordiller, et faire durer le plaisir. Slave-One la supplia et lorsque la poupée lui accorda ce plaisir. L’orgasme fit vibrer l’atmosphère, me troublant complètement. Je n’osais bouger, de peur que le simple mouvement de mes cuisses échappe une humidité secrète. Les gens applaudirent.

— Très expressive, la poupée.

— Magnifique. Très inspirant.

— Y a pas à dire, une fille qui jouit, c’est toujours un spectacle émouvant.

Ils détachèrent Slave-One. L’hôtesse toute rayonnante rit, trahissant l’émotion qui l’habitait puis annonça :

— Notre second jeux arrive dans une dizaine de minutes. À tout à l’heure.

Les dix minutes passèrent rapidement. Je restais immobile, écoutant les commentaires grivois, parfois machistes, mais toujours d’une honnêteté entière. J’avais l’impression d’être à un endroit où je n’aurais jamais dû me trouver, comme un meuble au milieu de la Maison Blanche. Puis on nous invita dans une salle. Le groupe entier se déplaça, comme un troupeau de gnous. Lorsque nous nous arrêtâmes, les uns près des autres, l’épaule nue d’une poupée contre la mienne, l’hôtesse déclara :

— Pour notre second défi, les façonneurs peuvent participer.

Des exclamations masculines ravies s’élevèrent dans la salle.

— Il y a à la clé cinq cent euros. Voici un parcours en fil de fer, et vous devez arriver au bout sans créer un contact entre le fil et votre anneau. Chaque fois que vous touchez le fil, cela déclenche une alarme mais envoie également une décharge dans le vagin électrique… Qu’est-ce que je raconte ! Une décharge électrique dans le vagin de la poupée Ipkiss !

— J’ai envie de tenter ma chance, me confia Arcan tandis que certains applaudissaient.

— Si vous parvenez au bout du parcours sans déclencher une seule décharge, votre poupée a le droit à une minute pour la faire jouir à l’aide de ceci. Dix euros pour tenter votre chance ! Seulement dix euros !

— C’est un gode monté sur une poignée, me souffla Arcan.

Je n’étais pas partante pour goder une autre fille. Mais lorsqu’elle demanda des participants, le mouvement de laisse m’indiqua que la main d’Arcan se levait. La Gloutonnette compta en désignant les façonneurs, très nombreux à vouloir se lancer.

La laisse m’entraîna, presque soudainement, trahissant l’impatience d’Arcan. J’entendais le buzzer indiquer quand un façonneur échouait au parcours de fête foraine. Puis Ipkiss commença à gémir, les dents serrées, chaque fois qu’on électrisait son intimité. L’hôtesse appelait les façonneurs les uns après les autres. Ils étaient nombreux à attendre leur tour, et pour certains, perdre n’était qu’un moyen de la faire gémir. Plus le buzzer sonnait longtemps, plus elle éprouvait l’effet de l’électricité. J’entendais bien à la jubilation générale que s’ils pouvaient la faire jouir ainsi, le spectacle leur aurait suffi. Lorsque la laisse me fit à nouveau avancer, je compris que c’était au tour d’Arcan.

— Honneur au nouveau venu et vainqueur.

— Concentration, marmonna Arcan.

Chacun retint son souffle, imposant un silence étrange. Puis ils s’exclamèrent de joie. La laisse me tira. Arcan me prévint trop tard.

— Escalier montant.

Je trébuchai sur les deux marches de l’estrade. Arcan était resté sur le côté et il lâcha la chaîne qui me reliait à lui depuis le début de la soirée. Un sentiment d’abandon s’empara de moi. Mon cœur partit au triple galop. L’hôtesse me prit les mains et me remit un gode en verre recourbé, dont les veines avaient été remplacées par de hiéroglyphes. Il dégoulinait d’huile entre mes doigts. Le façonneur d’Ipkiss me dit :

— Tu as une minute. Je ne compterai qu’à partir de la première pénétration.

En panique totale, tremblante, je cherchai Arcan de mes sens. Les hommes scandaient :

— Muse ! Muse ! Muse !

Le façonneur d’Ipkiss me guida :

— Fais juste un pas et accroupis-toi.

Je voulais fuir, mais aveugle sur l’estrade, ce serait prendre le risque de me casser une jambe. L’énergie de la foule m’obligeait, maintenant que j’étais là, à obéir. Je m’accroupis en gardant les genoux serrés, déplaçant mes mains sur le manche de l’objet, puis je tâtonnai sur la feutrine de l’estrade, rencontrant la cuisse qui s’ouvrait en grand. Son façonneur me dit :

— T’es pas loin, à droite.

Je remontai ma main, trouvant le pli de la cuisse, puis mon pouce rencontra par mégarde la vulve détrempée. Dégoutée, je retirai ma main, puis présentai le phallus. Je le glissai en elle, en espérant qu’il allait bien là où il devait. Je sentis son corps se tendre, elle laissa échapper un premier soupir. Je posai mes genoux sur l’estrade et entamai le va et vient. Ipkiss se mit à gémir. En colère d’avoir été abandonnée par Arcan, voulant en finir rapidement, j’allais et venais avec vigueur. Les gémissements se transformèrent en petits cris étouffés. Les façonneurs lubriques nous regardaient en silence, captivés par la pornographie de la scène. J’étais certaine que ma mère riait sous cape. Sinon peut-être trouvait-elle que j’avilissais l’image qu’elle se faisait des poupées. Je ne savais même plus ce qui pouvait lui passer par la tête. Je n’étais plus sûre de la connaître. Plus ma colère s’épaississait, plus mes gestes se durcissaient. Ipkiss s’exprimait à haute voix, sans retenue. La minute me paraissait durer une éternité, les secondes alourdies par la honte d’être ainsi exposée en train de goder une autre fille. Mais le corps d’Ipkiss se figea autour du vît, son souffle coupé en plein cri. Je le renfonçai malgré tout. Je sentis la main demi-gantée d’Arcan sur mon bras.

— C’est bon, elle a eu son compte.

Essoufflée, Ipkiss couina, et je me relevai en suivant la laisse, abandonnant l’objet entre les cuisses de la poupée. L’hôtesse s’exclama :

— Cinq cent euros à Muse !

— Marches descendantes, deux marches, murmura Arcan.

Mes pas me firent trébucher malgré-moi. Arcan me rattrapa dans ses bras.

— Ça va ?

J’avais envie de lui crier dessus, de lui reprocher de m’avoir laissée seule sur l’estrade. Mais il avait lu l’égarement sur mon visage, il venait à moi, prévenant. Donc je restai blottie contre lui. Je ne voulais plus qu’il me quittât. J’avais juste fourré une autre fille avec un gode. Ce n’était pas pire que d’être baladée nue à l’aveugle, pourtant je ne me sentais pas prête à vivre cette exhibition. J’inspirai profondément alors que ses bras se refermaient autour de mes épaules.

— Ce n’est rien… Si j’avais su que ça te mettrait dans ces états, je ne t’aurais pas fait participer.

Je secouai la tête pour indiquer qu’il n’était pour rien. L’instant humiliation était terminé, et il m’avait fait gagner cinq cent euros. Arcan m’éloigna de la foule, sa main caressa ma joue.

— Personne ne peut t’entendre parler. Ça va ?

— Oui.

— Je suis désolé.

Je secouai la tête et lui dis :

— Je peux me laver les mains ?

La laisse me tira doucement et je la suivis jusqu’aux sanitaires. J’entendis les talons d’une autre poupée me croiser. Arcan continua :

— J’ai agi sans penser que tu n’aimerais pas.

Je me lavai les mains en cherchant mes mots, puis lui confiai :

— C’est juste que… ça devait juste être une sorte de défilé. Je ne m’étais pas préparée à… à faire ça devant plein de gens.

— Si c’est un peu trop pour toi, on peut rentrer.

J’étais fatiguée, j’avais trop peu mangé, je ne voulais pas connaître les autres jeux. Je cédai :

— Je veux bien, s’il te plaît.

Je m’en voulais de l’avoir tutoyé, mais il ne releva pas. Il présenta mes mains aux séchoirs, puis il m’emmena. Mes espadrilles ne retrouvèrent pas le feutre de la grande salle.

— Arcan et Muse.

— Vestiaire quatre.

Nous nous enfermâmes. L’hôtesse s’étonna :

— Déjà sur le départ ?

— Assez d’émotions pour une première participation, indiqua Arcan.

— Mais quelle bonne soirée. Voici vos gains, et voici ceux de Muse.

On me remit une liasse de billets entre les mains. Je les gardai fermement entre mon pouce et l’index, tandis qu’Arcan passait la cape de fourrure sur mes épaules. Puis après quelques banalités aimables, nous quittâmes le sas, traversâmes le hall, et retrouvâmes la fraîcheur de la nuit. Il me tint le bras jusqu’à la voiture et m’aida à m’installer. Il s’assit, démarra, les graviers roulèrent sous les pneus jusqu’à ce que nous parvinssions à la route. Arcan maugréa après lui-même :

— Je suis trop con ! Ça va, Muse ?

— Oui, ça va.

— Je suis désolé. J’ai…

— J’ai gagné cinq cent euros.

— C’est pour le principe.

— C’est cool. Même sans avoir les yeux bandés, pour cinq cent euros, dans n’importe quelle soirée, je l’aurais fait. C’est juste le contexte qui m’a mise dans l’inconfort.

— T’es OK ?

— Si tu veux, je suis prête à recommencer.

Il posa sa main sur la fourrure enveloppant ma jambe.

— T’es une poupée extra.

— C’est dans les gènes, à ce que j’ai compris.

Arcan rit, se détendit, mais s’enquit à nouveau de mon humeur :

— T’as pensé quoi de la soirée ?

— Bizarre. Je n’étais pas à l’aise parce que je ne savais pas à quoi m’attendre. Ça s’est super bien passé. Et du coup, c’est bizarre. Surtout que je n’en ai rien vu. Je ne sais pas à quoi ressemble Ipkiss, je ne sais pas à quoi ressemble l’Impératrice. Je suis… Je suis contente de ne pas avoir vu leurs têtes, et en même temps je sentais dans les voix comment on me regardait. Je n’en sais rien. Je ne sais pas si ça m’a plu ou pas. Je… Faut que je laisse tout ça retomber.

— J’attendrai pour te demander si tu veux recommencer ?

— Oui.

Il mit son clignotant, accéléra. Je précisai :

— Oui, je veux bien recommencer.

— Je préfère que tu réserves ta réponse, je suis trop fatigué pour réfléchir à la suite.

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