26. Jeux de débridées

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Minuit. J’avais oublié ma nudité, l’esprit noyé dans les conversations, essayant d’imaginer la soirée de la semaine prochaine. Je voulais à tout prix écraser ma mère. La voix d’une hôtesse nous rappela l’heure. Les duos de poupées et des façonneurs se regroupèrent à nouveau vers l’estrade et déjà les exclamations laissaient imaginer un jeu qui créait l’engouement des hommes.

— Notre premier jeu nous est proposé par Ipkiss ! Voici six magnifiques phallus. Notre poupée va les enfiler le plus vite possible, du plus petit au plus grand. La participation est de soixante euros. La poupée qui battra son record de vitesse aura cinq cent euros. Notre jury contrôlera que chaque gode soit enfoncé jusqu’à la ligne.

Je savais qu’elle voulait se refaire le visage, mais elle avait quand même de sacrés numéros. Entre l’électrification la semaine dernière, et aujourd’hui un concours de vitesse de pénétration. Arcan ne cilla pas, et je ne pus deviner ce qu’il pensait de ça.

— Ipkiss est en place. Est-ce que notre jury est prêt ? A mon top ! Trois ! Deux ! Un !

Les exclamations scandées m’empêchèrent de me faire une idée de la vitesse. Mais il sembla quelle eut du mal à arriver au bout du cinquième. Le sixième prit du temps. L’hôtesse peinait à être entendue.

— Alors ? Verdict ?

— Neuf secondes et vingt centièmes ! répondit une gloutonnette.

— Est-ce que nos contrôleuses d’enfoncement valident les cinq godes ?

— Validés !

— Validé pour six secondes et vingt centièmes ! Nous allons nettoyer les phallus. Qui relève le défi ?

L’hôtesse désigna les poupées qui levaient les mains. Il n’y eût que trois participantes, ce qui me rassura en partie sur l’état d’esprit de la majorité des filles qui s’exhibaient ici.

— J’espère que vous êtes lubrifiées !

Un soupir d’ennui échappa à Arcan, mais nous attendîmes tous les deux, entre les éclats de voix, masculins comme féminins, les encouragements hystériques et les résultats olympiques. Aucune ne battit Ipkiss qui avait dû s’entraîner. Mais récupérer seulement cent quatre-vingt euros était plutôt maigre pour son opération d’orthodontie.

Les gloutonnettes annoncèrent le défi-cunni. Arcan ne me le proposa pas cette fois-ci, et s’éloigna un peu, pour me proposer une flûte de champagne. Nous trinquâmes tous les deux tandis que plus d’une dizaine de participantes relevaient le défi. La fille attachée n’était pas la même que la dernière fois car je ne reconnus ni la voix ni les réactions. Les gémissements ne me laissèrent pas indifférente et me rappelèrent à mon propre spectacle muet, improvisé avec Geisha. Il ne m’avait pas fait gagner d’argent, ni même la première place du podium, et pourtant c’était le même. À l’instant, toute la salle était tournée vers la fille. Combien m’avaient regardée ? Je me sentais incapable de proposer mon corps en pâture à des coups de langues, pourtant je l’avais fait.

Lorsque mon verre fut vide, Arcan demanda :

— Envie de rentrer ?

J’opinai du menton. Le stupre me mettait aussi mal à l’aise qu’il m’inspirait. La salle sembla se refroidir au fur et à mesure que nous quittions la foule. Le son fut étouffé par la porte du vestiaire. L’hôtesse nous dit :

— Voici vos affaires. Très belle chorégraphie.

— Merci.

— Voici vos gains, et vos affaires

Arcan m’enfila le manteau, salua poliment la fille, puis me guida jusque dans la nuit fraîche. Je m’installai dans la voiture, gardai les cuisses serrées de froid l’une contre l’autre. Il attacha sa ceinture, puis démarra. Lorsque les roues quittèrent le gravier, il me dit :

— La mise en scène. Il nous faut une véritable mise en scène. J’ai des idées mais… Nous avons… J’ai sous-estimé ta mère. Elle a l’expérience de ces soirées, elle ne vise pas au hasard. La musique, le jeu de lumière, tout était trop bien synchronisé pour qu’elle ait travaillé ça en une semaine. C’est pour ça qu’elle revient plusieurs soirées de suite avec un thème. Elle choisit le thème et elle monte le niveau show après show.

— C’est possible. C’est la troisième soirée qu’elle fait sur l’Egypte antique.

— C’était cinématographique. Les noirs et les flashs très brefs donnaient vraiment l’illusion d’un serpent qui sortait d’une des filles pour entrer dans l’autre. Elle est très douée.

— Vous voulez qu’on fasse un spectacle comme ça ?

Il grommela une négation, puis me dit :

— Il faut qu’on se différencie de ta mère. Mais on peut oublier l’érotique tendre. Il faut que nous percions leur imaginaire avec du jamais vu. Il faut qu’on les surprenne. Ta mère choisit un thème bidon, mais les surprend à chaque fois avec un spectacle. Il faut qu’on les surprenne, mais pas par le spectacle. On doit produire un spectacle permanent. Il ne faut pas que tu sois l’actrice de quelques minutes, il faut que tu sois le personnage de la soirée.

— En restant Muse ?

— Exactement. Quand tu as léché le masque d’Ipkiss, tu étais ce personnage, et on était complètement en dehors d’une démonstration.

— D’accord.

La voiture ralentit en retrouvant la ville, puis il proposa :

— Kebab ?

Je souris.

Un peu plus tard, assise sur le canapé à côté d’Arcan, le kebab entre les mains, je savourais d’un appétit féroce, comme si je sortais d’une séance de corde-à-sauter. J’essayai de rattraper les aliments qui s’échappaient de mes doigts et tombaient sur la table basse tout en regardant les photos qui défilaient sur la tablette sur laquelle il avait déchargé la soirée. Me voir adossée dans les bras des trois filles qui me caressaient pendant que Geisha me faisait jouir réveilla le désir violemment en moi. Sur la vidéo, je vis les vagues de mon ventre soumis au plaisir de cette rencontre saphique. Geisha était menue, le visage et le corps peints en blanc, les lèvres marquées d’un rond rouge et le ventre couvert d’idéogrammes asiatiques. Je ne trouvais pas ça beau, et j’aurais sûrement refusé si je n’avais pas été aveugle. Malgré tout, le rendu improvisé m’humectait malgré-moi. Mon ventre avait envie d'Arcan, mon cœur voulait lui prouver que j'étais toute à lui. Je commentai :

— Je comprends que le spectacle ait plu.

— Ça a été très inspirant pour moi. Inattendu.

— Moi aussi. Je n’ai jamais fait ça avec une fille.

— Très belle première.

— Je voulais vous remercier.

— Pour ?

Je posai mes lunettes, puis coiffai mon masque. Je me levai pour laisser tomber la fourrure, et je tâtonnai de mes mains en me penchant vers lui et répondis :

— Pour tout.

Je cherchai sa ceinture, la détendis, puis quand mes doigts trouvèrent l’ouverture de son pantalon, il leva les fesses et le baissa lui-même. Je remontai mes mains sous son costume et trouvai sous mon menton son sexe déjà dur et arqué. Un parfum de sperme s’en échappait déjà et mon nez rencontra une perle qui s’y colla. Je passai ma langue le long de la hampe et enveloppai le gland entre mes lèvres. Il me parut énorme, bien plus que dans les souvenirs de mes ex. Les muscles de son ventre se tendirent à ma première aspiration. J’avais envie qu’il jouît de ma langue, comme en écho de ce que Geisha m’avait offert. J’avais besoin de me prouver à moi-même que mon hétérosexualité était intacte, que c’était lui que je désirais. Son odeur me rendait hystérique et suffit à me rassurer.

Malgré l’alcool ingurgité toute la soirée, il ne mit pas longtemps à grogner. Je bloquai le fond de mon palais avec la langue et terminai par des vas et viens, lèvres closes autour de son gland. Son corps s’arqua, sa semence jaillit. Je restai immobile jusqu’à ce que ces muscles se détendent et avalai.

Il caressa mon visage et se redressa. Il me souleva dans ses bras et m’emmena dans la chambre. Lorsqu’il me déposa, je restai accrochée à lui. Je voulais une étreinte forte, je voulais des caresses, je voulais lui dire que je l’aimais. Mais à ce stade, ça aurait été ridicule de précipitation. Il accepta l’étreinte, ses doigts se perdirent en caresses et je m’endormis avant lui.

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