Le vaisseau dérivait à vitesse réduite dans l’orbite silencieuse d’une planète inconnue, recouverte de brume argentée. Les systèmes de communication étaient endommagés, la navigation en pause. Kael avait réparé l’alimentation manuelle. Alisra avait recalibré les capteurs gravitationnels à la main. Ils étaient seuls. Complètement.

Et pour la première fois depuis leur départ, il n’y avait plus rien à faire.

Dans la cabine de repos, le silence était apaisant.
Alisra observait les constellations anciennes à travers la vitre courbe.
Kael était assis en retrait, dans l’ombre. Il la regardait sans parler.

– "Tu savais que les étoiles qu’on voit là sont peut-être déjà mortes ?" dit-elle doucement.
– "Oui. Et pourtant elles brillent encore. Comme certaines personnes."

Elle tourna la tête vers lui.
Son regard n’avait plus cette dureté défensive. Plus de sarcasme. Juste une fatigue tendre. Une solitude qu’elle comprenait trop bien.

– "Pourquoi tu me détestes autant ?" demanda-t-elle, presque dans un souffle.

Il se leva, s’approcha. Lentement.
Elle ne recula pas.

– "Parce que quand je te regarde, j’ai peur d’oublier pourquoi je me bats."
– "Et tu te bats pour quoi ?"
– "Pour ne pas t’aimer."

Un silence. Long. Lourd. Chargé.

Puis il tendit la main. Doucement. Elle la prit.
Son cœur battait trop vite. Elle se rapprocha.

Leurs fronts se touchèrent. Deux souffles mêlés dans la pénombre. Une main glissée dans les cheveux d’Alisra. Une caresse hésitante. Elle ferma les yeux.

Enfin, un moment de paix. D’abandon.

« Bip. Bip. Bip. »

Une alarme s’enclencha.

– "Protocole d’interception. Canal codé. Source inconnue."

Ils se figèrent.

– "Un message ?" murmura Alisra.
– "Pas humain." répondit Kael, la voix plus grave.

Les écrans s’illuminèrent.

Un signal. Un mot. Répété dans toutes les langues connues.
Il s’affichait en boucle.

LYRA. LYRA. LYRA.

Son cœur manqua un battement.

– "C’est le prénom de ma mère." dit-elle, blanche comme un astre mort.

Et juste après, une voix. Déformée. Grave. Mais humaine.

"Alisra. Tu portes la clé. Ils arrivent. Ne leur fais pas confiance."

L’écran clignota.

Puis plus rien.

Un vide absolu. Et cette tension dans l’air… comme si l’espace respirait.

Alisra recula, le souffle court.
Kael, lui, se rapprocha encore. Il posa ses mains sur ses épaules. Son regard était grave.

– "Ta mère… elle est peut-être là. Vivante."

Elle leva les yeux vers lui, perdue.

– "Et si je suis la clé… qu’est-ce que ça fait de moi ?"