Tempête levante (pt.1)

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Les yeux fixant avec attention l'écran, Lucien appuya lentement sur le bouton. Il y eut un instant d'attente, d'espoir. Puis la fenêtre s'ouvrit, et sous ses yeux ébahis, le jeu se lança. Avec appréhension, il bougea la souris et la déplaça sur les mots « Commencer » avant de cliquer. Le jeu débuta, comme il l'avait voulu, comme il se l'imaginait. Il avait réussi ! Ce qu'il avait fait fonctionnait enfin ! Soupirant de soulagement, il laissa un sourire traverser son visage et ferma le jeu, enregistrant les modifications du programme avant de mettre en veille l'ordinateur dont la température atteignait des sommets. Il resta là quelques instants, perdu dans ses pensées, les yeux fixant le mur blanc face à lui. Puis le bois de son bureau craqua et le tira de ses réflexions.

Il s'étira et quitta sa chambre, avant cependant de faire promptement demi-tour pour entre-ouvrir sa fenêtre afin d'aérer la pièce qui commençait à sentir le renfermé. Il descendit ensuite dans la cuisine et commença à s'activer pour préparer un repas digne de ce nom à sa famille lorsqu'elle rentrerait. Il posa une poêle sur le feu et y fit saisir le poulet préalablement coupé. Il entreprit la découpe des légumes en julienne qui serviraient d'accompagnement. Il assaisonna le tout et laissa la préparation cuire à feu doux pour la maintenir au chaud d'ici le retour de ses parents et de ses sœurs. Il mit la table et alla allumer la télévision, une bonne méthode pour se divertir tout en s'instruisant. Il mit le journal et resta bouche bée devant les idioties que lançaient les chefs d'états, la situation déplorable de la planète, et le monde qui marchait sur la tête. Il soupira, et finit par changer de chaîne, ne supportant plus cet étalement d'inepties.

Lorsque huit heures sonnèrent, Lucien décida d'appeler ses parents pour leur demander quand ils rentreraient, car il commençait à se faire tard, surtout qu'il y avait école le lendemain. Il composa le numéro de son paternel, et attendit jusqu'à être redirigé vers le répondeur. Pas étonné pour le moins du monde, il raccrocha et composa le numéro de sa mère. Plus étrangement, elle non plus ne répondit pas, et il tomba directement sur la messagerie vocale. Il décida de tenter sa chance avec sa sœur, mais là encore, il dû raccrocher sans avoir pu joindre qui que ce soit. Comment ce faisait-il que personne ne réponde ? Étaient-ils déjà en route, ou n'entendaient-ils tout simplement pas leurs mobile sonner ?

Il regarda sa montre, une fois de plus, qui n'affichait que huit heures et quart. Peut-être devait-il simplement attendre un peu plus ? Ils finiraient bien par rentrer à la maison de toute façon. Il tenta de chasser de son esprit les multiples scénarios sinistres qui s'y étaient infiltrés, essayant vainement de se concentrer sur le programme scientifique diffusé sur l'écran à quelques mètres de lui. Mais rien n'y fit, il s'inquiètait de plus en plus à mesure que le temps passait. À huit heures et demi, il décida d'appeler sa grand-mère sur son fixe, au moins il serait sûr que quelqu'un lui répondrait.

  • Âllo ? Fit la voix bien connue à l'autre bout du fil.
  • Bonsoir, mamie.
  • Comment vas-tu, Lucien ?
  • Très bien, et toi ? Tu pourrais demander à papa et maman s'ils ne pourraient pas se dépêcher de rentrer ?
  • Ça ne va pas trop mal, mon petit. Mais, peut-être que tu serais le mieux placé pour le leur dire, non ?

Lucien eut un temps d'arrêt, surpris.

  • Ils... ne sont pas chez toi ?
  • Je ne les ai pas vu de la journée, mon garçon.
  • Ah, d'accord. Merci, mamie.
  • Quelque chose ne va pas, mon chéri ?
  • C'est juste que...

Lucien hésitait à confier ses craintes. Ce n'était certainement qu'une illusion de son esprit, une idée abracadabrantesque, sans fondements. Qui pourrait croire que c'était vrai ?

  • Ce n'est rien, mamie, ne t'inquiète pas. Mais rappelle moi si jamais ils venaient te voir. Bisous.
  • Bisous, à bientôt mon trésor !

Il raccrocha, quelque peu honteux ; il n'aurait pas dû mentir ainsi à sa grand-mère. Mais ce qui était fait était fait à présent, il devrait faire avec. Il monta quatre à quatre les marches jusqu'à sa chambre et, sans prendre le soin de fermer la fenêtre alors qu'il faisait un froid polaire, tapa précipitemment dans un moteur de recherche « Comment faire si votre famille disparaît ». Il tomba sur des résultats sans queue ni tête, ou dont les solutions semblaient pouvoir prendre des mois à arriver. Peut-être devait-il appeler la Police ?

Il décida de rappeler chacun des membres de sa famille, au cas où l'un d'eux décroche. Mais, comme il le craignait, personne ne répondit cette fois encore. Que devait-il faire ? Hésitant, il rassembla son courage et tapa les deux chiffres qui l'aideraient certainement à retrouver ses parents et ses sœurs, il l'espérait en pas trop mauvais état. Tous les scripts, du plus plausible au plus impossible, tournaient en boucle dans son esprit, se formant et se mélangeant au gré de son imagination et de son anxiété grandissante. Finalement, il appuya sur le bouton vert, et se mordit la lèvre inférieure, attendant que quelqu'un lui réponde.

  • Police Nationale, bonjour. Que puis-je faire pour vous ? Répondit une voix féminine.
  • B...bonjour, fit-il hésitant, désolé de vous déranger. Je vous appelle parce que..., commença-t-il sans vraiment savoir comment tourner sa phrase, ma famille a disparu.
  • Pourriez-vous me donner plus de détails, je vous prie ?
  • Et bien, mes parents et mes deux sœurs cadettes sont partis chez mes grands-parents, mais ils ne répondent plus à mes appels et ils n'ont jamais été chez mes grands-parents...
  • Êtes-vous sûr qu'il s'agit d'une disparition ? Êtes-vous sûr qu'ils n'avaient pas prévu de faire quelque chose en prenant soin que vous ne le sachiez pas ?
  • Je... je ne sais pas, admit-il, peut-être.
  • Écoutez, je ne peux pas faire grand chose en quelques instants, donc je vais voir ce que je peux faire le plus vite possible, et je vous rappelle dès que j'ai plus de renseignements, d'accord ?
  • Oui, j'imagine que c'est tout ce qui soit possible pour l'instant...

Il lui donna également son nom, avant que son interlocutrice ne raccroche, et espéra du fond du cœur que le reste de la maisonnée était effectivement partie faire des emplettes dont il ne devait pas avoir connaissance.

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