Chapitre 13 : première mort

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Quelle ne fut pas la surprise de Mikaëla à son réveil. Elle trouva Junker, roulé en boule sous son apparence de dragon. Quentin avait la tête posé sur lui et une grande aile lui servait de couverture. La jeune femme les regarda, attendrit. Elle s’attarda sur le museau de l’être robotique. Il avait comme une crinière bleuté et des plumes métalliques courraient sur sa colonne vertébrale jusqu’au bout de sa queue. Les cornes de Junker étaient plutôt imposantes et formaient une excroissance sur son front, protégeant ses yeux comme une sorte de casquette. Elle tendit la main. Soudain, l’être de métal ouvrit un œil, la stoppant net. Néanmoins, il la laissa caresser son épaisse chevelure. Elle remarqua que de plus petites cornes poussaient entre les autres. Puis elle le laissa tranquille. Junker émit un grondement et donna un petit coup de museau à Quentin.

-Hein ? Quoi ?

Il se redressa, regardant autour de lui.

-La nuit n’a pas dû être bien confortable, dit Mikaëla en se tournant.

- C’est mieux que de dormir loin de Junker.

Celui-ci se redressa. La jeune femme fut surprise de la façon dont il changeait d’apparence. Sa queue se rétracta, ne laissant plus qu’une excroissance et son gouvernail.

-Préparons-nous, dit-il. Quelque chose me dit qu’il faut partir au plus vite.

Alors, Alexander ouvrit la porte à la volée.

-Des brigands encerclent l’établissement.

- Comment-ça ?

- Des informations ont dû fuiter. La mission d’escorte devait être discrète.

- Mais pourquoi ?

- Parce que certaines personnes ne veulent pas que la société actuelle change, dit Mikaëla. Mon intervention a pour but de faire prendre conscience au monde de la misère en certains lieux. Cela signifierait donc que de l’argent devrait être utilisé pour rénover les quartiers périphériques. Et au vu de ce que j’ai pu lire dans le cahier de Junker, la situation est plus critique que je ne l’aurai crue.

- Les aristocrates veulent donc que les plus démunies restent ainsi ? S’indigna Quentin.

- Nous n’avons pas le temps de papoter. Junker, quand nous sortirons, tu les occuperas. Tu n’as pas à les tuer, juste à les retenir. Ta vitesse te permettra de nous rattraper à l’extérieur de la ville.

- Bien.

Tous le monde parti s’équiper. Junker regarda par la fenêtre avec discrétion. Ces individus n’étaient pas des amateurs, au vu de leurs équipements. De toute évidente, ils étaient ici pour tuer la jeune femme.

-Junker ? Tu vas t’en sortir ?

- Vous n’avez pas à vous en faire. J’ai plus d’un tour dans mon sac.

Il se drapa dans sa cape. Quentin vint les chercher. Il observa son compagnon du coin de l’œil. Il lui prit la main. Junker tourna la tête.

-Tâche de revenir, d’accord ?

- Ce ne sont pas quelques malfrats qui vont m’arrêter, tu le sais.

Ils arrivèrent devant la porte et se mirent en formation. L’être de métal ouvrait la marche. Il se mit en position.

-En avant.

Aussitôt, Junker s’élança, brisant l’ouverture des portes d’un violent coup de poing. Aussitôt, les tirs se mirent à fuser. L’être capé se jeta sur les hommes à grande vitesses, les frappant avec force.

-Concentrez vos tirs sur celui-là !

Malheureusement, les balles ne faisaient que ricocher. Junker ouvrit la bouche et cracha des sphères de feu qui glacèrent les véhicules et clouèrent les hommes sur place.

-Quoi ?!

Le camion blindé ne tarda pas à partir. Pendant ce temps, l’être de métal débarrassait les brigands de leurs armes sans pour autant leur faire grand mal. Alors, un homme le frappa de son fusil. Junker encaissa. Il se retourna et frappa, l’envoyant au tapis.

-Tout ça pour empêcher de pauvres gens d’accéder à une vie meilleure…

Il s’approcha d’un homme, remettant ses bandages sur son visage. Il le regarda de haut.

-A croire que pour préserver leurs intérêts personnels, les grands du monde sont prêts à tout.

Puis il s’élança, se mettant bientôt à quatre pattes. C’est alors qu’un bruit de moto se fit entendre derrière lui. Trois malfrats l’avaient pris en chasse. La bête gronda et fit demi-tour. Il encaissa un tir et poussa un rugissement.

-Quoi ?!

Il percuta l’un des deux-roues de plein fouet, l’envoyant en l’air. Junker bondit et changea de forme, crachant une sphère de glace qui ébouillanta le deuxième motard, le faisant chuter. A sa réception, il s’élança à vive allure sur le dernier.

-Mais c’est quoi ce truc ?!

Junker sentit alors une nouvelle énergie affluer. Ses cornes se mirent à scintiller sous la lumière du matin. Cette lumière continua de s’intensifier pendant plusieurs secondes. Il ouvrit les mâchoires et cracha un puissant rayon blanc qui fit exploser la moto, tuant son pilote sur le coup. Junker s’arrêta et regarda le résultat de ce qu’il venait d’accomplir. Il semblait terrifié et stupéfait.

-J’ai… j’ai tué un humain…

Il ferma les yeux. Finalement, il s’élança, abandonnant les lieux. Il ne mit guère longtemps à retrouver le fourgon qui roulait à faible allure. Junker bondit sur le toit. La portière latérale droite s’ouvrit.

-Junker ! Lança Quentin.

Celui-ci le rejoignit et referma la porte. Le jeune homme eut un sourire, soulagé qu’il soit revenu. Mais le regard de son ami fit disparaitre cet air enjoué de son visage. Ni lui, ni Mikaëla, ni les autres hommes à bord n’osèrent prononcer le moindre mot. Il en fut ainsi pendant une grande partie du trajet. Junker avait les yeux fixés sur le tapis de sol et ne levait la tête qu’a de rares occasions. Quant à Quentin, le mutisme de son compagnon l’inquiétait. Il arborait un air plus grave qu’à l’accoutumé. Il était arrivé quelque chose durant l’affrontement face aux individus armés. Le jeune homme voulu parler mais il ne savait pas quoi dire.

-Junker…, dit-il finalement. Tout va bien ?

L’être de métal ne répondit pas. Il leva les yeux sur son compagnon aux yeux rouges.

-J’ai commis l’impensable.

A ces mots, Quentin compris aussitôt de quoi il était question. Il se leva et s’agenouilla face à Junker, lui saisissant les mains avec douceur. Tous deux se regardèrent dans les yeux. Alors, Quentin l’enlaça.

-J’en suis navré, dit-il simplement.

Junker se contenta d’un soupir.

-Je suis un monstre.

- Ne dis pas ça.

- Cette puissance que j’ai utilisée… elle est si destructrice.

- Alors fais-moi une promesse.

Quentin se recula, avisant l’être de métal. Il lui retira sa capuche et lui attrapa le visage à deux mains, passant ses pouces sur les rainures bleutés qui descendaient de ses yeux.

-Si comme tu le dis, tu as utilisé un grand pouvoir, alors tu ne dois jamais t’en servir. Sauf dans un cas précis.

- Lequel ?

-Si la vie d’autruit est grandement menacée, tu pourras en faire usage. Junker, aujourd’hui, tu as tué un humain. Et que tu le veuilles ou non, cette liste s’allongera.

- Merci, c’est rassurant…, dit Junker en détournant la tête.

- Eh, j’ai pas fini.

Lui empoignant le menton, il l’incita à le regarder.

-Je te l’accorde, c’est contraire à tes valeurs. Personne ne mérite d’être tué. Mais parfois, les circonstances font que nous sommes obligés de faire abstraction de nos principes. Moi-même j’ai dû… faire des choses que je ne voulais pas et pour lesquels je m’en veux. Mais tu vas surmonter ça. Nous allons surmonter ça. D’accord ? Toi et moi.

Junker esquissa un petit sourire. Quentin déposa un petit baiser juste sous sa lèvre inférieur.

-Toi alors… tu sais me remonter le moral.

- A ton service.

- Qui aurait cru qu’un gamin flirterait avec un robot de l’espace ? Ricana Alexander.

- Il y a bien des gars qui sortent avec des nana à queue, répliqua un autre. Sans oublier les cyborgs.

- Mouais.

Cela fit sourire les deux compères. Mikaëla ne fit aucune remarque quant à cette étrange relation. Alors, une petite trappe s’ouvrit.

-On arrive bientôt, dit le conducteur à travers celle-ci.

- Merci, Al’. Junker ?

- Oui, monsieur Alexander ?

- Au moindre problème, tu devras escorter la demoiselle au parlement, d’accord ? Tu es le plus à même de veiller à sa sécurité.

-Mais… cela voudra dire que les gens…

- Alors soit aussi discret que tu puisse l’être. Il est évident que tu as des facultés bien supérieures aux nôtres. Tu vaux largement toute notre équipe. C’est pourquoi nous comptons tous sur toi.

- Je… d’accord.

Il fut décidé que Quentin ne les accompagnerait pas, bien que cela lui déplaise un peu. Néanmoins, il comprenait qu’aux côtés de l’être métallique, il constituerait plus un fardeau qu’une aide. Il posa une main sur son épaule dans l’espoir de lui apporter un peu de soulagement. Junker esquissa donc un sourire à peine visible. Ils ne tardèrent pas à approcher, traversant pour cela la périphérie. Mikaëla put se rendre compte par elle-même de ce qu’elle avait lue dans le carnet de Junker. Elle aperçue même deux femmes nues, à l’ombre d’une ruelles, en train de s’adonner à leur plaisir. Alors, le camion s’arrêta.

-Euh… chef ? On a un problème devant.

- Qu’est-ce qu’il y a ?

Alexander jeta un œil par la petite trappe. Un barrage s’était formé. L’homme lâcha un juron. Bientôt, les curieux s’approchèrent. Certains étaient même équipés pour dépouiller l’escorte.

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