Chapitre 1 : Les gens bruyants et moi
Je n’aime pas les gens.
Enfin, ce n’est pas vraiment qu’ils me dégoûtent ou qu’ils me rendent folle. C’est juste que la plupart d’entre eux sont bruyants, imprévisibles, et ne savent pas s’arrêter de parler même quand c’est inutile.
Moi, je préfère les livres.
Les livres, eux, ne trahissent pas. Ils ne jugent pas. Ils ne posent pas mille questions sur ta coupe de cheveux, ton sweat troué ou ton carnet de citations. Ils sont là, silencieux, mais pleins de tout ce qu’il faut : des aventures, des secrets, et parfois, des vérités qu’aucun humain ne sait dire.
Je m’appelle Maya, j’ai 14 ans, et dans mon collège de Los Angeles, je suis la fille qui lit pendant la récré.
Et ça ne dérangerait personne, si Leo Carter n’existait pas.
Ce jour-là, j’étais tranquillement assise sous le grand sycomore, mon sac posé à mes pieds, mon exemplaire de Jane Eyre dans les mains. Il faisait chaud, mais pas trop. Le genre de jour parfait pour lire en paix.
Puis je l’ai entendu.
« Salut, Reine des Mots. »
Leo Carter.
Je ne l’ai pas regardé. Peut-être que s’il ne voit pas mes yeux, il disparaîtra.
« Tu sais que t’es la seule à qui j’ai pas encore piqué un stylo cette semaine ? » dit-il en s’asseyant à côté de moi, comme si on était amis. « J’me sens presque coupable. »
Je tourne une page.
« Tu devrais. »
Il sourit. Je l’ai senti, même sans lever les yeux. Leo sourit tout le temps. Un sourire un peu trop sûr de lui. Il a ce genre de visage qui ferait presque croire qu’il est gentil. Presque.
« Tu lis quoi aujourd’hui ? Une histoire d’amour dramatique ? Un meurtre au XIXe siècle ? Ou les deux ? »
Je soupire. Fort.
« Jane Eyre. C’est un classique. Tu devrais essayer. »
Il se penche, essaie de lire par-dessus mon épaule.
« Oh. Le genre de fille qui tombe amoureuse d’un gars louche avec un secret dans le grenier ? J’adore. »
Je referme le livre d’un coup sec.
« Tu peux aller embêter quelqu’un d’autre, maintenant ? »
Il rit doucement.
« Mais c’est toi ma préférée, Maya. »
Je crois que c’est là, exactement là, que j’ai compris que je ne m’en débarrasserais jamais.
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