Le ciel s’était couvert ce jour-là, comme si même le soleil hésitait à sortir. Dans la salle 103, Maya avait tout préparé. Deux extraits imprimés, quelques surligneurs, des fiches avec des notes griffonnées à la main. Leo, lui, arriva deux minutes en avance. Cela méritait presque un trophée.

« Aujourd’hui on lit quoi ? » demanda-t-il en posant son sac à terre. Il portait un hoodie gris trop grand, ses cheveux en bataille comme s’il avait couru jusqu’ici.

Maya ne releva pas les yeux.

« Un passage de Nos étoiles contraires. »

« Ah. Je connais que le film. J’ai pleuré, je crois. » Il s’installa. « Enfin… un truc dans l’œil. »

Elle esquissa un sourire discret.

Il prit la feuille, la parcourut du regard. Puis il lut à voix haute.

« Je t’aime d’un amour qui dépasse l’amour. Mon amour pour toi est une étoile, une infinité de lumière sur une mer sombre. »

Il marqua une pause. Son ton avait changé. Plus lent. Plus… sincère.

Maya le regarda à travers ses mèches sombres. Il était concentré. Il lisait sans jouer. Sans ironie.
Et pour la première fois, elle entendit dans sa voix quelque chose qui ressemblait à… de la peur.

Il reprit, un peu plus bas :

« Tu m’as donné une éternité dans des jours limités, et pour ça, je t’en remercie. »

Quand il eut fini, le silence s’installa.

Maya posa sa feuille. Elle sentait un picotement derrière les yeux. Elle cligna vite, pour ne pas fondre. C’était idiot. C’était juste un texte. Mais quelque chose avait bougé.

Leo parla le premier, d’une voix plus basse que d’habitude :

« Tu choisis jamais des textes légers, hein ? »

« Pas aujourd’hui. »

Il regarda par la fenêtre.

« Ça m’énerve… ces phrases. C’est comme si elles disaient un truc qu’on… qu’on n’ose pas sortir. »

Maya baissa les yeux.

« C’est pour ça que j’aime lire. Les livres disent les choses à notre place. »

Il la fixa un instant. Longtemps.

« Et toi, Maya… tu dirais quoi, si t’osais ? »

Elle sentit sa gorge se nouer.

Mais elle ne répondit pas.