Chapitre 26

15 minutes de lecture

Layla

Je contemple mon reflet dans le miroir pour la cinquième fois. Mon teint brille toujours d'un léger éclat doré et mon mascara n'a pas coulé. Ce qui est un miracle, compte tenu du nombre de larmes que j'ai retenues à la mairie ce matin. Le discours sur les droits et les devoirs des époux m'a particulièrement touchée, et lorsque Chahine m'a passé la bague au doigt, j'ai dû puiser dans toutes mes forces pour ne pas m'effondrer.

Jasmine ajuste tendrement une mèche rebelle sans me quitter des yeux.

  • Tu es magnifique, me susurre-t-elle.

Je lui offre un sourire fragile, sans grande conviction.

Mes cheveux sont coiffés en un chignon bas et deux ondulations encadrent mon visage. Propre, élégante, maîtrisée. La coupe parfaite pour une mariée.

Pourtant, je ne peux m'empêcher de douter.

À l'origine, j'étais censée garder mon voile pour la cérémonie. En effet, même si nous avions choisi de séparer les filles des garçons, la salle que nous avions réservée possédait un vis-à-vis. Il m'était donc impossible de l'enlever.

Cependant, au dernier moment, Jasmine a eu l'idée d'installer des rideaux. Résultat : plus besoin de foulard et davantage d'intimité. Une perspective qui, sur le coup, m'avait ravie, mais qui maintenant me terrifie. Parce que j'avais oublié que Chahine me verrait dès notre entrée. Et je ne sais pas si je suis prête à lui dévoiler ma vulnérabilité.

  • Et s'il était déçu ? lancé-je, d'une voix tremblante.
  • Déçu par quoi ? me questionne Jasmine, déroutée.
  • Par... par mes cheveux.

Elle se fige, les yeux ronds.

  • Par tes cheveux ? répète-t-elle. Mais ils sont incroyables, Layla !

Je baisse la tête, gênée.

  • Ils sont bouclés, ce qui peut donner un air un peu... sauvage, non ?
  • Sauvage ? s'étouffe-t-elle. Tu plaisantes, j'espère ?

En constatant que je suis sérieuse, son expression s'adoucit.

  • Bon, écoute-moi bien...

Elle prend alors mes mains.

  • Je sais que tu as vécu des choses difficiles à cause de ces boucles.

Je lui avais effectivement raconté les moqueries que j'avais pu subir à l'époque.

  • Je sais aussi à quel point les injonctions aux cheveux lisses, soi-disant plus classes, sont fortes dans notre communauté.

Elle serre légèrement mes doigts entre les siens.

  • Mais est-ce que tu as la moindre idée d'où cette réflexion provient ?

J'arque un sourcil, incrédule.

  • Non.

Elle ancre alors son regard profond au mien.

  • D'un héritage colonial, Layla. D'une déshumanisation de nos peuples, perçus comme plus proches de la nature animale.

J'écarquille soudain les yeux, stupéfaite par son aveu.

  • Alors je vais te poser une seule question, Layla... souffle-t-elle. Et je veux une réponse honnête.

J'opine du chef, sur la réserve.

  • Est-ce que tu détestes vraiment tes cheveux, ou est-ce que tu détestes le regard que certaines personnes peuvent porter sur eux ?

Un frisson me parcourt l'échine.

Je plonge dans les méandres de mon passé, ressassant toutes ces fois où j'ai pu admirer des ondulations. Pas les miennes, uniquement celles des autres. Un paradoxe que je n'avais jamais réussi à élucider... jusqu'à maintenant.

Je relève alors mon regard vers celui de Jasmine avec une nouvelle détermination.

  • Je ne déteste pas mes cheveux... murmuré-je.
  • Ah oui ?
  • Je les aime, et je crois que je suis enfin prête à assumer mon identité.

Un sourire de fierté se dessine sur le visage de mon interlocutrice.

Je m'apprête à la remercier, lorsque la sonnerie de mon téléphone me coupe dans mon élan. Face au prénom affiché sur l'écran, je décroche spontanément.

  • Layla ! s'exclame ma cousine. Allume la caméra !
  • Attends, protesté-je. Jasmine n'a pas fini de...
  • Dépêche-toi ! insiste-t-elle cependant. Allez ! Je veux voir la mariée !

Je pousse un soupir, exaspérée, avant de finir par obtempérer.

Je lui dévoile alors ma tenue du jour.

Il s'agit d'un karakou en velours rouge, orné de motifs dorés délicatement brodés. Le détail du sfifa, travaillé à la main, brille sur le col ajusté de la veste, ajoutant une touche raffinée. La jupe plissée, elle, s'ouvre en corolle, épousant parfaitement ma silhouette.

  • Waouuuh, s'émerveille-t-elle. Tu es une princesse !

Je pouffe de rire devant sa réaction.

  • Merci, Rym.
  • J'aurais tellement aimé pouvoir te voir en vrai, Layla...

Un pincement me serre le cœur.

Rym s'est malheureusement vue refuser son visa. En effet, comme elle avait déjà voyagé en France en début d'année, les autorités ont considéré que sa demande était un peu trop rapprochée. Un refus que je peux comprendre, vu le nombre de demandes, mais qui me laisse tout de même un arrière-goût amer.

  • Ne t'inquiète pas, la rassuré-je. On se verra bientôt, à ton mariage.
  • Oh oui, s'écrie-t-elle. J'ai tellement hâte !
  • Comment ça avance, d'ailleurs ?

Elle se pince l'arête du nez, de l'autre côté de l'écran.

  • Ça prend du temps. Plus que prévu.
  • En même temps, tu veux quelque chose de grandiose !

Contrairement à moi qui me contente d'une fête simple, ma cousine prévoit de sortir le grand jeu. Au programme, arrivée du couple à cheval, accueil par des artistes cracheurs de feu et portage de la mariée en palanquin. Autant vous dire qu'elle ne plaisante pas.

  • Bien évidemment, ajoute-t-elle. Moi aussi, je veux être une princesse !

J'entends Jasmine ricaner derrière moi.

J'entremêle mon rire au sien et déclare à Rym :

  • Ne t'en fais pas, tu seras une reine !

Nous continuons d'échanger sur des banalités avant de finir par raccrocher.

Alors que je m'apprête à demander à Jasmine de m'indiquer l'heure, la porte s'ouvre brusquement.

  • Layla, t'es toujours pas prête ? s'exclame Chahine.

Il entre en trombe dans la pièce, visiblement paniqué.

  • On va être en retard et...

Son regard se pose soudain sur le mien et il s'arrête net, complètement ébranlé.

Au vu de son expression, il ne s'attendait pas à me voir sans mon foulard.

Je reste alors figée, affolée, ne sachant plus du tout où me placer.

Il me décortique de la tête aux pieds, depuis ma chevelure dévoilée jusqu'à mes formes pleinement exposées. Il ne prononce pas un mot, mais l'éclat de ses prunelles parle pour lui. C'est la première fois que j'autorise un garçon à promener son regard sur moi, et contrairement à ce que j'imaginais, ce n'est pas désagréable. Parce que ce n'est pas n'importe quel homme, c'est lui.

Alors moi aussi, je me permets de le scruter. J'observe le blanc immaculé de son jabador contrastant avec sa peau hâlé, ainsi que la broderie argentée hypnotisante qui court le long de ses manches. Ses boucles sombres tombent librement, encadrant son visage avec une simplicité désarmante.

Nous restons là, à nous observer mutuellement, comme suspendus dans un cocon. Le silence qui nous entoure est lourd, chargé d'une tension électrique si forte que je peine à respirer. Chahine ne le brise pas non plus, ses lèvres entrouvertes trahissant seulement son souffle court.

J'en arrive même à oublier la présence de Jasmine à nos côtés, jusqu'à ce que cette dernière nous ramène brutalement sur terre avec sa remarque faussement innocente :

  • Bah alors, Chahine, on a perdu sa langue ?

Nos deux visages virent à un rouge tellement pivoine que la nuance se rapproche presque de celle de mon karakou. Chahine se retourne alors vers son amie, visiblement prêt à l'assassiner.

  • La ferme, Jasmine ! balance-t-il, embarrassé.
  • Oula, faut pas s'énerver comme ça !

Elle lève les mains en l'air en signe de reddition.

  • Sinon, tu vas faire peur à la mariée ! ajoute-t-elle malicieusement.
  • Espèce d'enflure...

Le brun passe une main sur sa nuque, tout en grommellant des choses inaudibles dans sa barbe inexistante. Jasmine éclate alors de rire et même si mon malaise ne s'est pas totalement estompé, je ne peux m'empêcher d'apprécier la familiarité de ce genre de moment.

Alors lorsque Chahine me tend la main pour m'intimer à y aller, je m'empresse de l'attraper, savourant pour la première fois la chaleur réconfortante de ses doigts.

* * *

La salle bat son plein.

A la seconde où nous posons le pied sur le tapis, tous les projecteurs se braquent sur nous et les applaudissements éclatent dans un tonnerre assourdissant. La lumière est si forte que je suis incapable de distinguer nettement les visages, fondus dans la clarté. Mais je devine tant bien que mal les silhouettes familières des membres de ma famille, drapés dans leurs plus belles tenues et m'acclamant fièrement.

La photographe s’empresse d’immortaliser chacun de nos pas, enchaînant les déclenchements sans relâche. Le stress qui m'entoure est à son paroxysme, mais la poigne ferme de Chahine m'aide à rester concentrée. Alors lorsqu'il me relâche finalement pour s'éclipser vers la salle des hommes, je me sens légèrement chagrinée.

Je n'ai cependant pas le temps de me morfondre que l'animatrice de la soirée m'attrape, m'intimant à danser. J'obtempère instinctivement, et toutes les femmes se mettent alors à m'encercler, claquant des mains au rythme effréné des percussions. Les youyous fusent, les tissus virevolent, et peu à peu, mon trac se dissipe, remplacé par une frénésie qui me confère une énergie insoupçonnée.

Tout au long de la soirée, l'ambiance est déchaînée. On ne s'accorde des pauses que pour grignoter des petits fours, ou siroter un cocktail entre deux éclats de rire. Il faut dire que l'animatrice que Jasmine m'a recommandé joue grandement dans ce succès, enchaînant les battles de danse, les jeux et tout un tas d'autres défis qui ne cessent de nous étonner.

Elle arrive même à me convaincre d'effectuer une Reggada. Avec sa crosse en bois incrustée de motifs ciselés, le long fusil que je tiens dans les mains est une véritable œuvre d’art. Je prends alors une profonde inspiration, avant de lever l'arme en l'air et de tirer une salve à blanc.

L'odeur âcre de la poudre sature instantanément la pièce, et c'est au même moment que Chahine choisit de réapparaître.

  • Waouh, siffle-t-il en affichant un sourire. On dirait qu'il y a de l'ambiance, ici.

Je lui rends son sourire, tentant de masquer le rouge qui me monte aux joues.

Mon regard glisse ensuite vers l'horloge imposante accrochée au mur, et je comprends aussitôt que l'heure de la pièce montée a sonné.

Chahine et moi nous installons alors côte à côte, juste derrière la table où trône le majestueux gâteau. Son parfum de mangue sucrée enveloppe déjà mes narines et je n'ai qu'une envie, c'est d'y plonger ma fourchette pour le savourer à pleines dents.

Néanmoins, la tradition veut qu'avant de goûter le gâteau, nous échangions un verre de lait. En signe de douceur, de partage des liens et de prospérité. Chahine s'exécute donc, attrapant le verre et me le tendant délicatement. Je le porte à mes lèvres avec une lenteur calculée, sous son œil attentif qui manque de me faire trembler, avant de le lui offrir en retour. Il boit une gorgée d'un air complètement détaché et je commence à me demander si je lui ai fait vraiment fait un effet, tout à l'heure dans la loge, ou si je l'ai simplement imaginé.

Il se met alors à couper le dessert, la crème onctueuse fondant presque sous sa lame. Puis il porte un morceau à sa bouche, visiblement trop impatient pour résister à la saveur de son fruit préféré.

Un éclat de crème lui échappe, et sans réfléchir, j'attrape son menton et l'essuie du bout des doigts. Mon pouce s'attarde sur sa lèvre inférieure, la caressant tendrement. Je m'apprête alors à porter le bout de crème à ma langue pour le lécher, et ce n'est que lorsque je sens sa main m'empoigner brusquement le bras pour m'intimer d'arrêter que je réalise ce que je viens de provoquer. Mon regard croise celui de ses prunelles écarquillées ainsi que de ses joues embrasées, et à cet instant précis, je ne doute plus du tout de l'intensité de l'effet que je suis capable de lui procurer.

  • Chahine ! s'exclame soudain Jasmine en brisant le moment. Dépêche-toi, on crève de faim !

Ce dernier cligne des paupières, comme s'il revenait brutalement sur terre.

Puis il s'éclaircit discrètement la gorge, avant de se remettre au boulot.

Lorsque la fête s'achève enfin, la plupart des invités se sont éclipsés. Seule une poignée de vaillants résiste encore, occupée à discuter ou grignoter les derniers amuse-bouches. Parmi eux, je distingue certains garçons, dont mon père et mon frère, qui en ont profité pour rejoindre notre côté.

J'en profite alors pour troquer mon karakou contre une tenue plus confortable ainsi que pour rabattre mon voile, avant de les rejoindre à nouveau.

Une vague d'émotion me saisit en les observant. Je n'arrive pas à croire qu'à partir de ce soir, je ne me réveillerai plus auprès d'eux. Je ne partagerai plus de petit déjeuner à leur table, je ne me disputerai plus avec Wiam pour savoir lequel d'entre nous choisira le programme de la télévision.

Comme s'il avait entendu le fond de mes pensées, mon père s'avance vers moi, les yeux brillants. Sans un mot, il me serre dans ses bras, et je m'abandonne à la chaleur de son étreinte. Il s'écarte ensuite d'un pas pour me laisser respirer et sort un petit coffret en bois sombre de sa poche.

  • Qu'est-ce que c'est ? demandé-je, intriguée.
  • Elle appartenait à ta grand-mère, répond-il en ouvrant le couvercle.

À l’intérieur repose une montre à gousset ancienne, délicatement gravée.

  • Elle ne vaut pas grand-chose, mais elle se transmet de génération en génération...
  • Elle est magnifique, souligné-je en la scrutant.
  • Comme ça, tu penseras toujours à ton vieux père, de temps en temps.

Ma gorge se serre et une larme perle sur ma joue.

  • Oh, arrête... soufflé-je. Tu sais bien que je penserai toujours à toi, Papa.

Sur cette remarque, il me reprend dans ses bras, un peu plus fort cette fois.

  • Olala, moi j'ai trop hâte que tu partes, lance alors Wiam en s'approchant. Je vais avoir une deuxième chambre, rien que pour moi !

Je lève les yeux au ciel.

  • Merci pour cette charmante déclaration d'adieu, hein !

Mon petit frère esquisse un sourire malicieux, mais ma mère apparaît alors, juste derrière son dos.

  • Oui oui, Wiam... soupire-t-elle. C'est sûrement pour ça que tu t'es caché dans les toilettes pour pleurer, tout à l'heure ?

J'écarquille les yeux, tandis que le visage de Wiam vire au rouge.

  • J'ai... j'ai pas pleuré ! se défend-il. J'avais de la poussière et...

Je ne lui laisse pas le temps d'achever sa phrase que je le soulève pour le prendre dans mes bras.

  • Oh, mon bébé... déclaré-je en le mitraillant de baisers. Tu vas tellement me manquer.
  • Beurk ! s'agite-t-il. Arrête, c'est dégoûtant ! Lâche-moi, Layla !

Je finis par le reposer, incapable de retenir un éclat de rire.

Mes parents m'imitent aussitôt, et nous nous retrouvons à ricaner tous ensemble, profitant de ce dernier moment, juste tous les quatre, comme si rien n'allait changer.

Je reporte ensuite mon attention sur Chahine, occupé à discuter avec Jasmine et Madi. Je les rejoins sans réfléchir, mais regrette instantanément mon impulsion lorsque je vois le duo maléfique m'adresser un sourire mutin.

  • Oh, justement, la voilà ! s'écrie la rousse, avec un peu trop d'entrain à mon goût.
  • Tu me cherchais ? questionné-je, sur la réserve.

Elle opine du chef et me tend un paquet cadeau emballé dans un papier rouge brillant.

  • Oh non, Jasmine, tu n'aurais pas dû... Tu as déjà fait tant.
  • Mais si, mais si...

Son sourire s'élargit dangereusement.

Je jette alors un coup d’œil à Chahine, qui a l'air aussi dérouté que moi.

  • Allez Layla, insiste-t-elle pourtant. Ouvre-le.

Avec un soupir résigné, je défais le ruban et soulève le couvercle.

Mon cœur rate alors un battement lorsque je découvre trois nuisettes en satin, ornées de fine dentelle, dans des couleurs vives criant lune de miel à plein volume.

  • Oh. Mon. Dieu.

Je referme la boîte d’un geste sec et m'empresse de la lui fourrer dans les mains, comme si elle contenait une bombe.

  • Mais tu es complètement folle !
  • Non je ne suis pas folle, rétorque-t-elle avec un clin d’œil. Crois-moi Layla, vu comment il t'a regardée tout à l'heure, tu vas en avoir très vite besoin.

Dîtes-moi que c'est un cauchemar et que je vais me réveiller.

Je me tourne machinalement vers les garçons, à la recherche de soutien. Cependant, Madi est en train de s'esclaffer, plié en quatre près d'une des tables, tandis que Chahine manque de se liquéfier.

  • Jasmine, je vais vraiment finir par te tuer, grogne-t-il en se frottant la nuque.
  • Oui, tu m'as déjà dit ça au moins dix fois... et pourtant, je suis toujours là !

Elle ponctue sa provocation par un grand sourire et le brun puise dans toutes ses ressources pour ne pas céder à l'envie de la calciner avec le fusil de la Reggada, sous les rires encore plus bruyants de Madi.

Je m'éloigne ensuite pour siroter un cocktail et calmer mes joues encore brûlantes, et Jasmine me rejoint.

  • Continue à faire la maligne, murmuré-je. Tu verras à ton mariage, je serai sans pitié.

Elle laisse échapper un rire franc.

  • Tranquille, étant donné que ce n'est pas près d'arriver.

Je prends une expression plus sérieuse.

  • Tu n'en sais rien.

Elle hausse les épaules, nonchalamment.

  • J'ai l'impression qu'il ne sait pas ce qu'il veut.
  • Il lui faut peut-être encore un peu de temps...
  • Encore combien ? se crispe-t-elle. Je suis fatiguée d'attendre, Layla. Fatiguée d'avoir l'impression d'être la seule à me battre, dans cette relation.

J'entremêle mes doigts dans les siens.

  • Il t'aime, Jasmine. Ne doute pas de ça.
  • Je sais que Madi m'aime, Layla. Mais parfois, l'amour ne suffit pas.

Je reste silencieuse, approuvant la véracité de ses propos.

  • Peu importe ta décision, sache que je te soutiendrai.
  • Je sais, beauté. Je sais, répète-t-elle. Je suis tellement heureuse de t'avoir dans ma vie.

Elle repose sa tête sur mon épaule et je ferme les yeux, savourant la fragilité de ce moment qui nous unit.

* * *

Les derniers invités filent finalement, et pour la première fois de la soirée, je me retrouve seule avec mon mari. Je l'attends patiemment, assise confortablement sur le siège de la voiture, tandis qu'il effectue un dernier tour de la salle, vérifiant que personne n'a rien oublié.

Lorsqu'il ouvre la portière, une bouffée d'air s'engouffre, et je n'ai pas le temps de remarquer le hérissement de mes poils qu'il me tend sa veste instinctivement.

  • Ce n'est pas la peine...
  • Prends-la, insiste-t-il néanmoins. J’ai pas envie de passer nos noces à soigner le rhume que t’auras bêtement attrapé.

À l'emploi du mot noces, je ne peux m'empêcher de m'empourprer.

J'attrape sa veste en priant intérieurement pour qu'elle puisse me cacher, mais le regard qu'il m'adresse me fait comprendre que rien ne peut lui échapper.

Un silence s’installe alors entre nous durant quelques secondes avant qu’il ne reprenne, plus doucement :

  • Tu sais... à propos de ce qu’a dit Jasmine…

Je relève la tête, timidement.

  • On n'est pas obligé de... de faire quoi que ce soit... si tu ne te sens pas prête.

Un sourire se dessine sur mes lèvres.

  • Je ne t'obligerai jamais à... enfin, tu sais... bredouille-t-il.

Je pose une main sur sa joue et l'effleure tendrement.

  • Je sais, Chahine, susurré-je. Je sais, ne t'en fais pas. J'ai tellement confiance en toi.

Il se penche légèrement vers moi, sa main venant se poser sur la mienne.

  • Tu peux, Layla. Je te promets que je te protégerai toujours, quoi qu'il arrive.

Il continue de serrer mes doigts, sa tête s'inclinant encore vers moi.

Je devine ce qu'il s'apprête à faire et mes paupières se ferment d'elles-mêmes.

Ses lèvres trouvent alors les miennes dans un contact doux, presque hésitant. Mais lorsque j'enroule mes bras autour de son cou pour lui intimer de poursuivre, il ne se retient plus. Il approfondit alors notre baiser avec une facilité aussi déconcertante que son intensité, et je me perds dans le tourbillon vertigineux de notre passion. Les vagues d’amour qu’il me transmet sont si puissantes, et pourtant je parviens à garder le cap. Comme si cet océan avait été créé spécialement à mon occasion, pour que je navigue dedans.

Lorsqu’il écarte finalement sa bouche de la mienne, il prend un instant pour reprendre son souffle ardent, avant de coller de nouveau son front au mien.

  • Je t'aime, Layla, murmure-t-il.

Je souris, aussi pantelante que lui, avant de souffler.

  • Je t'aime aussi, Chahine.

Et à cet instant précis, je ne suis plus du tout effrayée à l'idée de plonger.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 90 versions.

Vous aimez lire Enyris ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0