Chapitre 63 Ludovic

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Evie raccroche, je prends plusieurs inspirations profondes et compte mentalement jusqu’à dix pour réguler la giclée d’adrénaline que m’a procurée son coup de fil. Je me tourne vers Marko, nous sommes à dix minutes du point de récupération que j’ai fixé à Aleksander.

— Evie vient de se constituer prisonnière des djihadistes. Elle a suivi la copine de Djalil. Elles ont remonté les traces jusqu’au monastère, je lui annonce d’une voix blanche.

— Quoi ?! s’exclame Marko, aussi atterré que moi par la bêtise d’Evie. Mais à quoi pense-t-elle ? Qu’il lui suffit de se pointer pour qu’ils libèrent les otages ?

— Je ne l’aurais jamais cru capable de ça, je lâche, amer. Je vais y retourner. Je veux savoir quelles sont leurs défenses et où sont positionnés les postes de garde. Je souhaitais laisser cette mission à Aleksander, mais là, je ne peux pas. C’est toi qui vas organiser l’assaut.

— Tu dérailles, ou quoi ? me tacle mon second. Aleksander est apte à remplir le job, c’est un bon éclaireur et un bon tireur. Tu ne lui fais pas confiance ?

— Si, bien sûr. Mais Evie pense que c’est un traitre. Alors s’il doit agir, elle ne croira pas qu’il est de notre côté. Tu sais que ce genre de conneries peut flinguer une mission.

— C’est toi le spécialiste des opérations de libération d’otages, Ludo. On n’a pas le droit à l’erreur.

Je réfléchis. Certes, il a raison. Je vais examiner les données satellites pour élaborer mon plan d’intervention : où allons-nous cibler notre attaque et avec combien d’hommes.

— Je vais y aller, offre mon compagnon. Comme cela, tu seras sûr qu’Evie ne paniquera pas si ça tourne mal.

J’hésite à peine une fraction de seconde et m’incline. Sa proposition me réchauffe le cœur.

— On fait comme ça. Fais gaffe à toi, mon ami.

Toujours à l’affut, me répond Marko, qui emploie la devise du 27e bataillon des chasseurs alpins, que nous avons eue en commun pendant quatre ans.

Vivre libre ou mourir, je lui réplique. J’attendrais ta COM radio à partir de dix-huit heures.

Lui livrer davantage mes émotions ne se fait pas avant une opération extérieure. Ça porte la poisse. Marko me fait un check, et se détourne. Il n’a aucune provision sur lui, donc il va devoir se passer de repas ce soir. Nous sommes entraînés à la survie en milieu hostile, habitués aux privations de nourriture, d’eau et de sommeil. Ce qui parait extraordinaire au commun des mortels constitue la routine pour nous. Bien que chaque opération extérieure met en danger nos vies, notre formation nous permet de ne pas ciller lorsqu’une grenade explose, ou d’endurer les pires conditions climatiques.

À mon tour, je m’élance vers le point de rencontre avec Aleksander.

Lorsque je l’atteins, je m’aperçois tout de suite que quelque chose ne va pas. Aleksander et Gregory sont chacun sur leurs motoneiges, mais un troisième engin les accompagne. Dès que le visuel se précise, je constate la présence de Vladimir et d’un autre de ses soudards. Immédiatement, une bouffée d’inquiétude me gagne. Si les mercenaires sont sur le coup, c’est qu’ils comptent nous coller aux basques pour l’assaut. Cela implique qu’ils espèrent obtenir un bénéfice de cette action. Ces types ne travaillent pas pour la gloire, mais sur ordre du chef du Kremlin. Ce qui signifie que la Russie cherche un prétexte pour envahir la Géorgie. Qui aurait pu imaginer qu’elle essaierait de s’engager sur un deuxième théâtre de guerre en Europe ?

— Capitaine, me salue Aleksander.

Il n’a aucune obligation de m’appeler ainsi, car il n’est pas mon subordonné, mais un collaborateur volontaire pour cette mission. Il marque de la sorte le lien indéfectible qui unit son pays à l’OTAN.

— Que font ces types ici, je lui demande en désignant les Russes ?

— Je n’ai pas pu me défaire de ces deux-là. Les hommes de Roman ont envahi le village. Ils sont à l’auberge actuellement. Or le patelin doit beaucoup trop à ton oncle pour qu’il soit possible de chasser ses gars.

— Tu m’expliqueras ça au rapport.

— Bien, mon capitaine. Si je peux me permettre, où se trouve Marko ?

— Je l’ai laissé en surveillance étroite.

Aleksander opine du chef puis démarre sa motoneige. Je grimpe en selle derrière lui. Les soldats Wagner ne font pas de commentaires. Je suppose qu’ils sont présents pour avoir une idée de la direction de la planque où se cachent les djihadistes.

Je vais avoir une conversation très sérieuse avec Roman dès que possible.

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