6.1.5 Enfin

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Pendant plusieurs jours, nous sommes tous sous le choc. Papa me raconte tous les détails des trois dernières années. Maman donne sa version. Je ne lui omets aucun détail. Nous reparlons de la discussion que nous avions avant son arrivée. Sur les patronus. Mon père ricane et me traite d'idiot. Je m'énerve.

- Mon patronus est devenu un serpent le jour où j'ai embrassé ta mère pour la première fois. Mon chéri.... Le patronus est lié à notre cœur. À ceux qu'on aime. Quant aux mouvements que faisaient les dragons.....

Papa se lève et va chercher un livre dans la bibliothèque. Un livre sur les dragons. Il l'ouvre à la page «Parade amoureuse des Magyar à pointes» Il est dit que le mâle et la femelle se querellent pendant des mois voire des années. Ils se mordent, se griffent, s'envoient des boules de feu, avant de s'accoupler. Je le regarde abasourdi. Papa prend alors la parole.

- Toi mon garçon, tu es fou d'amour pour elle et je pense que c'est réciproque.

Je reste silencieux. Je refuse de croire ce que me dit mon père. Pourtant, je sens qu'il a raison. Maeve m'énerve au plus haut point. En même temps, je ne peux m'empêcher de la consoler quand elle ne va pas bien. Je lui suis si reconnaissant d'avoir sauvé ma mère. Je suis en colère contre elle d'avoir abandonné Charline.

Je relis le livre plusieurs fois. Les illustrations ne laissent aucun doute. Horace est lui aussi d'accord. Nos deux patronus étaient en pleine danse de séduction. La nature même de mon patronus est une indication. J'aime Maeve. Reste à savoir si, comme le croît Papa, ce sentiment est réciproque.

Non, je ne peux pas le croire. Ils se trompent tous. Nous n'arrêtons pas de nous disputer. On ne tient pas plus que quelques heures dans la même pièce sans s'étriper. Plus on grandit, plus on se crie dessus. On ne peut pas s'aimer. Maeve câline Benoît. C'est de lui qu'elle doit être amoureuse.

Non. Ils font erreur. Mes souvenirs ne sont pas sûrs. À trop vouloir comprendre, j'ai dû modifier les véritables gestes des dragons. Horace veut tellement avoir raison qu'il doit lui aussi modifier la réalité inconsciemment. Oui. On déforme notre mémoire. Après tout, les parades d'intimidation pour la défense du territoire sont très ressemblantes.

Poudlard est le territoire que nous nous disputons. C'est plus logique. Maeve et moi, nous nous battons pour obtenir Poudlard. Ca, je peux y croire. C'est plus cohérent. On agit avec notre partie sauvage et primitive, comme deux reptiles luttant pour leurs survies. Ouais. Rien à voir avec les parades amoureuses. Papa et Horace font erreur.

Fort de mes réflexions, j'essaye de convaincre mes parents et mon pote qui se tapent la tête quand j'expose mes arguments. Personne ne croit mon hypothèse et tous se rallie à la version de Horace. Quelle bande de sentimentalistes. Ils m'énervent. Ils ne comprennent pas que cela n'est pas possible. Maeve me déteste. C'est une mage noir comme Benoît.

Horace veut vérifier si je n'ai pas de nouveau une Morticia dans la tête devant ma colère. Comment peut-il le savoir, cette abomination est invisible. J'enrage, toutefois, je le laisse faire. C'est le professeur Bordial qui m'examine à l'aide d'une sorte de loupe au verre noir. Je n'ai pas de sale bestiole. Je suis juste con, conclut Horace.

Devant leurs mauvaises volontés, je perds patience. Je dois me vider l'esprit. Je vais courir en plein air. Il y a une forêt pas loin. Je fonce sous la cime des arbres et mes foulées me font m'enfoncer au plus profond de ce dédale vert. Au bout d'une heure, je m'écroule de fatigue au bord d'un étang bien caché. Des oiseaux chantent au loin. J'aperçois quelques écureuils par moment. Mon immobilité et ma cachette au milieu des fougères finirent par rassurer les animaux qui sortent et reprennent leurs activités.

Tout est si calme. Je m'endors doucement. Soudain, l'eau se met à frémir. Quelque chose d'assez gros nage sous la surface. Je saisis ma baguette et me fais tout petit. La chose se dirige vers le rocher qui dépasse au milieu de l'étendue liquide. Je scrute le moindre frémissement.

Deux bras sortent de l'eau et s'agrippent au rocher. Une tête aux longs cheveux noir de jais ruisselant et un buste suivent rapidement. Enfin, une immense queue de poisson vert émeraude. Une sirène. Je vais voir une sirène pour la première fois de ma vie. Je n'ose plus bouger, fasciné par le spectacle.

La créature me tourne le dos et s'amuse avec des grenouilles et des petits poissons. Les animaux sautillent et passent à travers de petits ronds d'eau que forme la jolie poissonne. Son rire est si cristallin et enfantin. J'oublie mes soucis quelques instants, émerveillé par ce que je vois.

D'autres créatures s'approchent du rivage, de l'autre côté de ma position. Des nymphes des bois viennent rafraîchir leurs pieds dans l'eau et se font arroser par la demoiselle aquatique. Les filles se chamaillent joyeusement, insouciantes.

Elles sont très belles et troublantes. Celle qui attire le plus mon regard est la sirène. Je n'ai beau voir que son dos, ses courbes affolent mes sens. Le plus perturbant est que j'ai l'impression de connaître ce rire. Cette façon de bouger et de contrôler l'eau. J'ai déjà vu ce genre de choses. Me voilà avec une nouvelle obsession. Je n'ai jamais vu de sirène auparavant alors pourquoi j'ai l'impression de savoir qui est là.

Je me demande si quelqu'un aurait pu effacer des souvenirs. Aurais-je déjà croisé cette jeune fille ? Les nymphes des bois l'appellent Princesse ou Altesse. Comment pourrais-je avoir été en contact avec une créature si importante sans m'en souvenir ? Je reste immobile, espérant que la demoiselle finisse par se retourner.

J'ai des crampes aux bras à force de me tenir sur mes coudes. Une grenouille vient vers moi, attirée par les mouches qui me tournent autour. Espérons qu'elle me débarrasse de ces insectes bruyants qui m'empêchent d'entendre clairement les discussions des jeunes filles. Le batracien atterrit sur ma main et me regarde en coassant.

- Que se passe-t-il Kermit ? Tu as un souci ?

Bon sang. Cette voix m'est familière. Ce n'est pas possible. Cette impression de déjà vu. La grenouille va finir par me trahir. J'essaye de la faire fuir sans faire de bruit. Le batracien ne me lâche pas et se rapproche de mon visage, lançant sa langue baveuse vers les mouches qui volent autour de moi.

- Un humain qui nous mate ? Et bien ! Quel vilain garnement. Et il ressemble à quoi ce chenapan ? Rigole la sirène tandis que les nymphes s'immobilisent.

La grenouille coasse de plus belle, faisant rire aux éclats la poissone, et calmant les nymphes. Je me demande bien pourquoi ma description est si risible. Puisque je suis démasqué, je me lève doucement et me montre en levant les bras en signe de non-danger.

- Oh non ! Féche. Pas lui. Vous ne craigniez rien les filles. Ce sorcier ne vous fera aucun mal. Par contre, je me casse. Je ne veux pas qu'il me voie dans cette tenue indécente.

La sirène se retourne et me tire la langue. Deux énormes coquillages cachent la partie rembourrée de son buste. Maeve ! Elle disparaît dans un nuage de fumée violet. Non ! Ce n'est pas possible. Je suis fou. Maintenant, j'en suis certain. Je suis atteint de folie. J'ai dû sniffer des spores de champignons hallucinogènes. Voilà. C'est ca ! J'ai absorbé des substances provoquant des visions délirantes.

Je raconte mes péripéties à Horace qui part dans un fou rire et me parle d'obsession. Pour se foutre de moi, il demande au professeur si des plantes hallucinogènes sont présentes dans la région. Surpris, le professeur réfléchit et nous confirme qu'aucune plante de cette sorte n'est présente dans la région. Il se propose d'aller voir dans le bois avec moi.

Quand je parle des nymphes et de la sirène, le professeur prend une mine réjouie. À ma grande surprise, il nous apprend que Maeve peut, à l'aide la formule interdite, se transformer en sirène. D'après lui, je n'ai pas rêvé et j'ai bien vu Maeve qui devait être en train de pratiquer sa magie. Ce constat ne m'aide absolument pas à me calmer.

Je préfère ma théorie des champignons hallucinogènes. Ma santé d'esprit serait moins mise en doute. Tout le monde, mis au courant de ma mésaventure, en profite pour se moquer de moi encore plus. J'enrage. Et si c'est elle, que faisait t'elle aussi près de la maison. Je leur dis de faire attention, qu'elle doit nous surveiller pour le compte des mages noirs. Je n'obtiens aucun soutien de leur part.

C'est la nuit. J'ai horriblement soif et Horace est encore en train de faire un rêve érotique. Il fantasme sur Sarah la sœur de Jamie. Je suis le seul à le savoir. Je ne manquerais pas de me moquer de lui demain matin. Ses petits gémissements et ses mots d'amour sont pitoyables. Vu la gêne qu'il a certains matins, je le soupçonne de salir ses draps en pensant trop fort à Sarah. J'ai l'occasion de me venger un peu et je ne la laisserais pas passer.

Je descends à la cuisine pour boire un peu d'eau. Il y a une faible lumière dans le salon. Le feu est allumé. C'est étrange vu qu'on est en été et qu'il fait super chaud. Je me rapproche pour voir de qui il s'agit. J'entends pleurer et sangloter.

- Pourquoi vous me demandez ça reine Morgane ? Pourquoi m'avez-vous doté de sentiments aussi cruels que l'amour et la compassion ?

Maeve est assise par terre dans un coin et ses yeux sont remplis de larmes. Elle ne me voit même pas. J'ignore ce qu'elle fait là. Elle regarde la petite flamme qu'elle fait crépiter dans la cheminée. La voir ainsi me brise le cœur. Je n'ai pas envie de la chasser même si elle ne devrait pas être ici.

Je prends un plaid et lui pose sur les épaules en m'asseyant à côté d'elle. Elle me regarde en continuant de sangloter. Elle veut parler, mais ses mots lui restent dans la gorge. Je lui prends la main et lui serre. J'oublie ma colère des derniers jours et mon après-midi. Je prends Maeve dans mes bras et lui embrasse les cheveux, comme quand elle faisait des cauchemars.

Elle se blottit contre moi et cache son visage dans ma nuque. Je lui caresse le dos doucement tandis que ses bras entourent mon cou. Je sens ses larmes qui coulent le long de mon torse pour s'écraser sur mon short de nuit. Je ne sais pas ce qui se passe, Maeve est effondrée. Au bout d'un moment, ses pleurs cessent. Elle se calme et renifle. Elle relève la tête, ses yeux toujours larmoyants.

- Pardon. Je ne savais pas comment le dire à Charline. Je voulais juste la protéger. Elle est si fragile.

Nos yeux plongent l'un dans l'autre. Nos visages se rapprochent. Je pose ma main sur sa joue pour essuyer une dernière larme avec le pouce. Sa tristesse m'émeut. Je ne sais pas qui faire ou dire pour soulager sa peine. De telles larmes ne peuvent pas être simulées. Partageant ses émotions, Maeve me fait comprendre qu'elle s'est disputée avec Charline à cause de ce secret. Elle est dévastée, pensant avoir perdue l'affection de sa sœur.

- Vous pouvez le dire majesté. Je sais que vous en mourrez d'envie. Je ressemble à un lapin ayant la myxomatose.

Elle rit doucement et s'essuie l'autre joue en tentant de reprendre ses esprits. Elle est si triste et si belle. Je ne peux détacher mes yeux de ses prunelles lavande et sans réfléchir, je pose mes lèvres sur les siennes, tout en l'attirant contre moi en la serrant dans mes bras. Je l'embrasse avec douceur. La flammèche devient un feu ardent.

Maeve ouvre des yeux ronds, se relève et s'enfuit en courant. J'essaye de la suivre. Elle disparaît dans la nuit. Horace et Papa ont raison. Je suis dans la merde. Je suis amoureux de Maeve. Tout l'été, j'essaye de relancer notre connexion mentale et je l'appelle. J'envoie Shadow, mon hibou, à sa recherche.

Je ne la revois qu'une fois arrivé à Poudlard pour la rentrée. Elle m'évite et se comporte exactement comme avant. De toute manière, je ne saurais pas quoi lui dire. Je ne suis même pas sûr que ce fût réel. C'est un bordel innommable dans ma tête.

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