Chapitre 1: sortie des cours

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Le ciel. Les nuages. Les sapins. L’hiver. Noël. Les pensées s’enchainent à toute vitesse dans ma tête. J’ai toujours eu mille choses en tête et des pensées qui se télescopent de cette façon, et ça ne s’améliore pas avec l’adolescence. Mes parents ont même pensé que j’avais un genre de TDAH de cerveau, mais non. Je suis juste de même.

Je m’appelle Laurie-Ann Ray, j’ai 13 ans et je suis pathétique. J’aimerais bien qu’on m’appelle juste Laurie. Mais non, on dirait que tout le monde dans cette école met un point d’honneur à bien prononcer Laurie-Ann dans son entièreté. Et ça ne devrait pas me déranger. Mais ça me dérange pareil.

Je n’ai pas d’amis. J’en avais, au primaire. Mais ce n’étaient pas des vrais amis. Pas le genre à qui tu peux tout confier. Juste des gens avec qui je gravitais et que je complétais. Eux ne me complétaient pas, et encore heureuse. J’étais déjà une personne complète, merci bien. Je suis bien comme je suis, une rejet dans toute sa splendeur. Je suis juste bien de même, toute seule.

Non, j’avoue, des fois, j’aimerais ça avoir des amis. Mais des vrais amis. Bof… C’est pas près d’arriver, donc autant ne pas trop y penser.

Je sais, je sais. Je ne devrais pas penser à tout ça tout court. Je suis à l’école, je devrais me concentrer sur ce que dis la prof. Je devrais prendre des notes sur les façons de conclure un texte descriptif. Mais non. De toute façon, c’est juste français. Je n’ai jamais eu en bas de 90% et c’est pas en n’écoutant pas la prof un cours, un vendredi dernière période en plus, que ça va changer. C’est rare que je ne sois pas concentrée sur un cours. Mais pour cette fois, je m’octroie une pause. Une pause en avance, vu que c’est la fin de semaine dans quelques minutes.

Huit, en vérité. C’est vraiment barbant, tout ça.

J’avoue, je suis un peu déprimée. Mon frère a une pratique de handball ce soir pis c’est un peu poche, vu que lui et ma mère vont rentrer tard. Encore une soirée à tuer le temps.

Bon, je vais pas me plaindre, je pourrais être obligée d’aller voir mon frère jouer. Et ça, c’est encore plus ennuyant. Je devrais être contente que ma mère me fasse confiance pour rester seule à la maison.

Les minutes passent tellement lentement que je comprends presque ceux qui se sont endormis. Quand la cloche sonne, tout le monde se lève comme dans les films pour ados pas réalistes.

Je me dirige vers mon casier. L’école JFP est le meilleur endroit où s’endurcir sur le plan physique : entre les gens qui essayent d’atteindre leurs casiers, ceux qui sortent de leurs classes et ceux qui attendent leurs amis, on a de la chance si on ne se prend pas un coup d’épaule ou de sac ou de classeur dans la face. C’est le bordel. Et tout ça se décuple le vendredi soir.

Je réussis à me faufiler jusqu’à mon casier et tente de débarrer le cadenas en tirant dessus, comme si ça allait marcher. Spoiler : ça ne marche pas. Je dois refaire la combinaison (0-33-18) 4 fois pour que ça marche enfin.

Mon casier est mieux rangé qu’à peu près 95% des casiers d’élèves. L’organisation, c’est une de mes forces. Je bataille pour ranger mon cartable de français au bon endroit. J’ai pas trop de devoirs pour la fin de semaine, c’est bien.

J’extirpe mon sac du casier et je mets mon manteau sur mon dos.

J’ai dans l’idée de marcher jusque chez ma mère. C’est un peu loin, mais ça va me faire du bien. Je pourrai mettre ma musique et penser à la vie, comme toujours. Et c’est peut-être une des dernières fois que je pourrai le faire avant le printemps prochain.

Rendue dehors, je me rends vite compte que mon plan est irréalisable. Premièrement parce qu’il fait déjà super froid en ce mois de novembre où la température oscille entre -10 et 10. Deuxièmement parce qu’en moins de 10 mètres, je manque de tomber deux fois à cause de la glace par terre. On dirait que l’hiver est plus proche que je ne le pensais. Ciao la belle température!

Reprenant mon équilibre, je marche prudemment vers le trottoir tout en observant les gens.

Trop absorbée par Thomas et Isabelle qui parlent intensément ensemble, je glisse une troisième fois.

Parfois, on se sent chuter au ralenti. C’est exactement l’impression que j’ai. Au moment de toucher le sol et de me péter la gueule, pourtant, je me sens déposée sur le sol glacé. Aucune douleur. Juste comme si j’avais moi-même décidé de me coucher par terre.

Je suis perplexe et troublée. C’était ben space, ça! Sentant le gravier sous ma joue, je prends conscience que je dois avoir l’air complètement tarée, à rester couchée par terre.

Je me relève vivement et époussette mon manteau du mieux que je peux. Heureusement, personne ne semble avoir été témoin de mon moment de bug.

Ah non, merde. V’là que Jacob m’a vue.

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