Chapitre 3 : L'appel du blizzard

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Après tout, il peut bien s'imaginer ce qu'il veut de moi. Je suis prête à assumer les pires aspects de ma personnalité, même si cela entend aussi ma fâcheuse tendance à m'embraser lorsque je convoite ardemment quelqu'un. Lui ? Je l'ai rencontré par pur hasard alors qu'il sortait de son travail.

Il avait une mine de six pieds de long, semblait n'être présent que physiquement sur ce monde. Mais bon sang, je me souviens encore de la sensation qui m'avait retourné l'esprit ce jour-là, alors que je vais justement à sa rencontre. Cette fameuse journée, je m'étais abandonnée dans le blizzard qui hurlait dans son regard perdu, délavé. Je m'étais laissée emporter par l'aura glaciale qui émanait de lui.

J'y repense, et je fonds. J'imagine l'atmosphère qui l'entoure et je vacille. Je m'accroupis, secouée par un bourdonnement intense qui remue mon cerveau et mon bas-ventre. Cela ne va pas être simple de me tenir ce soir. Si encore ce feu intérieur s'était éteint quelques mois plus tôt. Mais non. Rien n'y a fait.

Son crédo est simple, il m'ignore tout bonnement. Aussi, à chaque fois que je le vois, il détourne son regard de moi, m'évite, il esquive mon monde, mon aura. D'habitude, cette manœuvre séductrice ne me fait ni chaud ni froid. Mais venant de lui, sans savoir l'expliquer, j'y suis vulnérable. J'ai donc essayé, parfois subtilement, et parfois moins, c'est vrai, de l'inviter à venir prendre un verre avec moi, voire même de le séduire. Mais à chacun de mes essais, la réalité m’a rattrapée tandis qu'il refusait catégoriquement.

Je ne m'explique pas exactement ce qui l'a amené, cette fois-ci, à daigner accepter ma proposition. Toujours est-il qu'il a accepté. Je lui ai donc donné rendez-vous dans un petit restaurant, chic mais sans être pompeux, bon mais sans être prétentieux.

Je viens d'ailleurs d'arriver devant la devanture dudit restaurant, je regarde ma montre, il est 19h55, je suis un peu en avance, et lui n'est pas arrivé. Cela ne me surprend pas. Peut-être qu'il ne va pas venir du tout, puis-je vraiment être surprise de cela, le cas échéant ? Je ne crois pas. Je sais me faire plaisir toute seule, quoi qu'il en soit. J'attends cinq minutes de plus dans la fraîcheur, il n'est pas là. Tant pis.

Je décide donc de rentrer dans le vestibule du restaurant, un serveur m'accueille et m'adresse un regard envoûté. Oui, je sais, je suis resplendissante, mais conduisez-moi à ma table, je ne viens pas barboter avec du menu fretin, me contenté-je de penser.

Je lui donne mon nom, il me conduit à ma table, isolée, comme je le désire. Avant qu'il ne reparte, je lui commande une vodka sèche avec deux glaçons. Il sourit, je l'ignore. Quelques minutes plus tard, l'hôte revient avec un plateau surmonté de mon breuvage. Il est 20h07, je commence à tremper mes lèvres dans l'alcool des steppes sibériennes, je m'évade dans un second blizzard, toujours impatiente de voir la vraie tempête arctique me rejoindre.

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