Le dernier jour

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Il regarda le lac une dernière fois et déploya ses ailes. Il ne servait plus à rien de rester, tout la lui rappelait. Elle. Son grand amour. Maintenant tout n'est que dévastation et désolation. Le feu avait tout emporté sur son passage et nul être vivant n'aurait pu savoir qu'avant, ici même, il y avait de la vie, une ville! Mais maintenant tout était fini, calciné, emporté pour toujours. Ces fichus hommes n'en finiront donc jamais avec leurs guerres ? En tout cas, pour Aléziel, ce serait la dernière, car désormais, il n'était plus que l'ombre de lui-même. Depuis plus de six cents ans qu'il était un ange, il avait l'impression d'avoir tout vu, trop vu. Cette fois-ci, les américains avaient décrété qu'ils seraient une suprématie ou qu'ils ne seraient pas. Leur arme de destruction massive avait démontré leur supériorité militaire. En revanche, au niveau mental, on en était loin évidemment. Une grande partie de l'Europe avait donc disparu en une fraction de seconde : les humains, les orques, les elfes, tous n'étaient plus que cendres. Il ne restaient plus que les anges, impuissants face à ce néant.

Quand l'attaque fut lancée, Aléziel était en France, dans la Drôme. Il a toujours aimé ses paysages si différents : parfois collines, parfois champs de lavande ou plaines au bord du Rhône. Le calme et la solitude qu'il y trouvait le rendait heureux, serein, plein d'un bonheur simple mais essentiel, existentiel. Il avait suivi de loin les débats houleux des humains car au final, cela tournait toujours autour des mêmes sujets : terres et pouvoirs. Pas besoin de sortir de Saint-Cyr ou d'avoir vécu deux cents ans pour comprendre ça ! Les négociations avaient échoué à chaque fois tant le caractère têtu du Président américain (enfin, si on disait dictateur ce serait plus juste) ne laissait aucune solution possible. Les européens et les africains s'étaient unis pourtant, quitte à y vendre leurs mères aurait-on cru mais rien n'allait. Les asiatiques n'arrivaient pas à s'entendre entre eux, certains en faveur d'une issue pacifiste et d'autres pour la guerre. Alors l'Amérique avait tranché d'une certaine manière. Un peu abrupte, certes. Les dragons qu'ils avaient élevés en cachette avaient été bien dressés et n'avaient faillis d'aucune façon dans leur mission. On aurait dit qu'on leur avait intimé l'ordre, tel les devantures des boutiques en périodes de soldes, "tout doit disparaitre".

Aléziel était donc parti là bas pour y trouver un peu de tranquilité. Il contemplait la cascade blanche lorsqu'un bruit lui semblant familier s'approcha. Enfin, tout est relatif car il faut savoir que les anges ont une ouïe très fine. Ce qui pour eux est proches est en réalité à des centaines de kilomètres pour les êtres humains. Ce qui l'alerta en premier c'est le grondement qui accompagnait ce son de battements d'ailes. Ensuite, sans raison apparente, toute la nature se tut. On aurait dit une photo tellement tout était figé. Seul le ronron de l'eau de la cascade s'échouant sur les rochers donnait encore un peu de vivant à ce paysage catatonique. Plus Aléziel entendait ce son sourd, plus il lui semblait que des frissons lui parcouraient l'échine. C'était comme si son cerveau reptilien lui intimait de fuir pour sauver sa peau : sacré instinct de préservation ! Il décida alors d'écouter cette voix intérieur et s'éleva du sol pour arriver au-dessus des nuages. Il plissa un peu les yeux et apperçu ce qui aurait pu le faire tomber sur les fesses s'il était encore un humain. Entre stupéfaction et effroi, il apperçu ces créatures mythiques : des dragons. Ils devaient avoir disparu depuis trois cent vingt-deux ans, lors de la dernière guerre opposant les orques et les elfes. Cette pensée avait un goût doucereux. Pourquoi? D'un côté cela avait la première guerre d'Aléziel, d'un autre, celui de la première fois où il l'avait rencontrée. Elle chevauchait un magnifique hongre blanc et gris. Son armure en feuilles d'or et cuir étincelait de mille feux. Sa longue chevelure eben tranchait et surprenait car les elfes sont rarement bruns ou brunes, surtout ceux des eaux de Nord.

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