Mina, le Héros et les autres à la plage

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Faut se le dire : il y a peu de sports qu'appréciait le Héros. Il préférait, sans aucune honte et aucune gêne, glander chez lui, à fixer le plafond ou à jouer aux jeux vidéo qu'à transpirer à la lumière du ciel. Heureusement que cette lumière créée magiquement ne produisait aucune chaleur sinon il aurait déjà fait une insolation.

Cependant, il ne regrettait pas une seule seconde d'être venu, pour une seule et unique raison : la plage de Sylvania ! Il en avait entendu parler grossièrement mais n'y avait pas cru.

« Comment ça sur une tortue géante il peut y avoir trois quartiers distincts, une prison, un lac souterrain, un arbre géant, un hôpital suréquipé, une sorte de montagne, plus une plage ? » s'était dit le Héros. Et d'une certaine façon, il avait raison d'en douter car il n'y avait effectivement pas de plage à Sylvania : comme pour le ciel, cette plage avait été créée artificiellement grâce au sable du précédent lieu où ils résidaient avant, magiquement ils chauffaient l'eau et ils avaient leur propre plage... sur une tortue géante... En vérité, ça tenait plus de la piscine géante que la plage. Non c'est médisant, ça correspondait plus à un lac de taille moyenne.

Néanmoins, quelle ne fut pas surprise lorsqu'il saisit ce que cela signifiait d'être sur une plage : les filles en bikini ! Il n'en avait vu que dans des spots ou des affiches publicitaires pour une quelconque horrible boisson chimique ou pour encore un nouvel univers artificiel, ou dans des anciens magazines dans la Bibliothèque Universelle, mais jamais dans la réalité. Il avait déjà vu certaines femmes ou femelles habillées de la sorte dans certains bars lugubres mais les voir en plein soleil donnait un tout autre aspect à la chose. Elles n'étaient pas les seules, les garçons aussi revêtaient des maillots de bains, montrant leur musculature bien taillée et émoustillant toutes les demoiselles aux alentours. Bizarrement, il ne vit pas beaucoup d'adultes.

Était-ce encore un moyen pour la reine de rapprocher les champions entre eux ? Le Héros ne pensait pas que c'était le cas puisqu'il y avait la présence de nombre de visages qui ne lui étaient pas familiers. Ces personnes ne semblaient pas être des guerriers bien qu'elles continuassent à montrer leur noblesse.

Bien que tous étaient en maillot de bain de tout type : pas seulement des shorts de bain, bikini deux pièces ou maillot une pièce, il fallait bien des maillots pour tous les types de race, le Héros resta habillé, se protégeant du ciel lumineux avec un parasol et la Bible offerte par la Fée. Elle lui avait demandé de venir mais elle n'avait aucunement précisé qu'il devrait s'atteler à une quelconque activité avec ses camarades. Pour lui tenir compagnie, il avait Mina, la naine, qui elle aussi ne portait pas de maillot de bain et qui se cachait sous son parasol.

- Mina ? l'appela le Héros.

- Oui.

- Va t'acheter un parasol, c'est le mien.

- C'est cela que tu apprends dans ton livre religieux ? La radinerie ? lui rétorqua la naine.

- Non, c'est moi seul qui t'ordonne de te procurer un parasol pour pas t'avoir dans les pattes.

- Oh c'est bon ! Tu vas m'en vouloir parce que j'étais méfiante à ton égard ?

- Si je te réponds oui, tu vas partir ?

- Non.

- Alors non, je veux juste être tranquille aujourd'hui.

- Pourtant tout le monde s'amuse, y a des filles de partout, avec des jolis bikinis et de beaux corps avec l'eau qui s'écoule par endroit..., dit-elle la voix lascive.

- Sœurette, ressaisis-toi, tu baves !

Mina secoua la tête et reprit un visage neutre.

- Non mais je dis ça pour toi, lui dit Mina, peut-être que parmi toutes ces belles nobles tu vas peut-être trouver l'amour de ta vie et accéder à la noblesse.

- Pas besoin, j'ai déjà accès à la royauté.

- C'est cela, tu vas me faire croire que tu es prince.

- Hé oui, ma chère et tendre Mina, appuya-t-il en posant son livre sur la table, et de toute manière, quand je demande qu'on me présente une donzelle qui me plaît, on me met des bâtons dans les roues.

- Camélia ? demanda la naine.

- T'es au courant ? Forcément la fée aptère est ton amie, après tout.

- Et Marina aussi.

Le Héros se claqua le visage. Ça ne le surprenait même pas. Si elles étaient toutes les trois en accord sur le fait de l'empêcher de fréquenter cette Camélia, elles allaient tout bonnement réussir, et lui n'avait pas vraiment l'éloquence ni le physique pour jouer au coureur de jupons comme son « prestigieux » frère.

- Un trio infernal, c'est pas possible ! désespéra-t-il.

- Elles ont eu raison de te stopper dans ta démarche, ce n'est pas une bonne fille.

- Qu'est-ce qui est bon ou mauvais en ce bas monde ?

- En plus, elle a des goûts douteux en termes de garçon à côtoyer.

- Mais je suis une personne douteuse ! Laissez-moi plonger dans ce marasme de douterie.

Un mot provenant tout droit de son imagination.

- Tu t'es emmêlé les pinceaux, là, rit la naine, ça ne veut plus rien dire ce que tu dis.

- J'ai perdu mon sang-froid devant tant d'absurdités.

- Tu veux que je demande à la fée aptère de quand même le faire ?

- Ça serait sympa.

Mina se leva et partit sur le terrain de « repousse-balle », comme ils l'appelaient ici, et interpella la Fée pour qu'elle puisse jouer aux entremetteurs pour la cause de son champion. Elle se tourna vers le Héros qui lui fit signe de la main. Portant ses lunettes, il vit qu'elle avait le visage renfrogné, avant de découvrir un large sourire qui n'augurait rien de bon s'afficher sur la face de la Fée. Mais il fit confiance à la naine qui lui avait fait gentiment la proposition.

La Fée alla voir Camélia et lui parla quelques secondes avant que celle-ci vint le voir, il n'eut même pas le temps de se présenter qu'il reçut une gifle et la grande fée s'en alla hors du terrain de repousse-balle. Mina vint revoir le Héros qui était sous le choc de ce qui venait de se passer.

- Satisfait ?

- Tu te fous de ma gueule ? Pourquoi elle a fait ça ?

- Aucune idée. C'est Princesse qui a intercédé en ton nom.

- Quelles conneries elle a dû lui dire ?

- Que tu pensasses que c'était une fille facile avec qui tu pourrais passer facilement la nuit.

- QUOI ? beugla le Héros, mais j'ai jamais dit ça !

- Ce n'est pas ce qu'elle avait l'air de penser, répondit Mina.

- C'est bon je lâche l'affaire.

- Youpi !

Elle fit un pouce en direction de la Fée qui le lui rendit.

- Tout de même, les femmes sont d'une méchanceté à toutes épreuves.

- Tu nous y pousses. En plus, ce qu'a dit Princesse est relativement vrai. Elle est une fille facile. Y a juste à voir pour quelle raison son champion a accepté de défendre son honneur. Ce vampire a juste profité d'elle en sachant très bien qu'il n'avait aucune chance.

- Genre lui il a le droit et pas moi ?

- Mais lui n'est pas notre ami.

- Pourtant, elle, elle est votre amie, et vous parlez ainsi d'elle...

- Bah, c'est pas mon amie à moi ! répliqua la naine, et de toute façon, tu ne peux pas saisir les critères sociaux des femmes.

Il la fixa longuement du regard avant de soupirer et de s'allonger dans sa chaise de plage pliante.

- Votre condescendance auprès de votre genre m'en touche une sans faire bouger l'autre, dit-il en Franca.

- J'ai compris ta phrase mais pas le sens.

- En gros, je m'en fous.

- Roh ! Je te déclare la flamme de mon amitié tu la boudes ? se moqua-t-elle.

- On va dire que j'apprécie une partie du geste...

- Hé bah voilà !

- Mais qu'entre filles, vous êtes de sacrées hypocrites !

- Roh ! s'exclama la naine.

- Sinon pourquoi tu vas pas jouer avec les autres ?

- Parce que je sais pas jouer au repousse-balle.

- Ça s'appelle du volleyball.

- On change le nom à chaque fois qu'on découvre une activité humaine.

- Pourtant la reine m'a bien donné une holovision et ne pas l'a pas nommée différemment.

- Le changement de nom est exceptionnel, c'est surtout pour les sports qu'on le fait.

Je saurai pas dire si c'est ridicule ou pas, se dit le Héros.

Après cette pensée, il y eut un blanc entre les deux. Le Héros ne savait plus quoi lui dire, c'était la première fois qu'ils parlaient tous les deux sans animosité. Il envisagea de faire semblant de dormir, mais c'était risible comme comportement, il valait mieux qu'il fasse mieux connaissance avec elle étant donné que la situation s'y portait. Il réfléchit alors au conseil que lui avait donné son grand-frère dans ce genre de situation : « Demande-lui des trucs à son sujet. ».

Ah oui c'est ça ! Merci cerveau.

Il pouvait bien être une personne extrêmement intelligente, mais quelques fois, il était aussi con qu'un cul de bouteille.

- Depuis quand vous vous connaissez vous tous ?

- Je dirai depuis notre tendre enfance. Sauf pour Lin. Lui est arrivé quelques années plus tard. C'est la reine qui nous le présenta.

- Personnellement ?

- Oui. C'est parce qu'apparemment il viendrait d'un royaume déchu et que la reine l'a recueilli alors qu'il traînait sur un champ de bataille ne sachant pas où aller.

- Ses parents sont morts ?

- Sûrement. Personne n'est jamais allé voir s'il y avait des survivants de cet endroit. À peine accueilli dans une famille que sa mère adoptive perdit la vie à cause d'une maladie inconnue. Même si cela faisait un an qu'il l'a connue, il en a été grandement attristé.

- Compréhensible.

- Malgré cela, il reste toujours une personne souriante et accueillante.

- J'ai vu cela à la réception, et même quand il est venu me chercher pour jouer avec vous.

- Il pense toujours aux autres. C'est ce genre de personne qu'il est.

- Je dois t'avouer que je le prenais pour un idiot fini avec ses jeux de mots pourris avec son nom de famille, mais c'est juste qu'il est bien trop gentil par rapport à moi et des personnes que j'ai pu croiser sur ma route. Et toi ? Quelle est ton histoire ? dit-il en lui tendant un stylo qui fit office de micro.

- Moi ? Hé bien, je suis une réfugiée venant du nord d'Eden. À cause des nombreux conflits qui se trouvaient sur notre terre, nous avons quitté notre pays pour venir ici et sur notre route avons trouvé cette tortue géante qui marchait face à nous. C'est ce que m'ont dit mes parents, en tout cas.

- T'es bien la première personne hormis ma mère qui provient directement d'Eden.

- C'est vrai que c'est rare de croiser des personnes de ce continent, concéda-t-elle.

- Bien que je te ressemble pas, moi aussi je viens de là-bas, apparemment, lui confia-t-il.

À cette annonce la naine sursauta, elle ne s'attendait vraiment pas à rencontrer un congénère provenant d'une contrée aussi lointaine que la sienne. Elle se jeta sur lui pour l'examiner sous toutes les coutures.

- Oh là ! Calme-toi, dit le Héros, amusé par la réaction de Mina, je vais te montrer.

Il lui tendit le dos de sa main et fit reculer la Noirceur de celle-ci jusqu'à son poignet, dévoilant une main pleine de cicatrices, mais surtout de couleur ébène. Mina en fut encore plus surprise, mais il sentit une pointe de déception dans son regard.

- Quand je t'ai dit que je venais du même continent que toi tu pensais de façon plus proche...

- C'est ça. Mais toi, tu es encore plus rare que moi.

- À l'intérieur de ces murs, peut-être, mais à l'extérieur, je ne suis pas le seul à avoir cette couleur de peau. Et après je reste humain, nous sommes toujours plus que vous.

- Pris au cas par cas, sûrement. Néanmoins, en faisant un amalgame de toutes les races, je ne crois pas, sourit-elle.

Il renoircit sa main et se rassit sur sa chaise de plage. Mina décala la table qu'il y avait entre eux deux, voulant continuer à discuter avec lui. La discussion dériva sur énormément de choses : les aventures macabres et rocambolesques du Héros dans les recoins du pays et de son mini voyage de l'autre côté de l'océan, les magouilles de son frère ainé, les mésaventures de Zelda et de son acolyte de toujours : le Héros pas encore héros de la légende – c'est comme ça qu'il s'est nommé dans ses anecdotes – et encore d'autres histoires. Il avait pris l'habitude de raconter sa vie aux autres car il aimait les faire rire avec ses mésaventures sans jamais aller trop loin en leur parlant de ses nombreux déboires et son mal-être, et aussi les récits où il s'est pris une défaite cuisante sur l'aspect psychologique et mental – comme à la prison d'Oranas.

Il apprit par la même occasion le côté « noir » de Mina qui aimait les choses effrayantes alors que c'était une froussarde. Elle lui relata son projet de devenir le bras armé de son amie lorsqu'elle deviendrait reine et son dur labeur lors de ses entraînements pour être assez forte pour manier son marteau aussi agilement que les plus grands épéistes du royaume.

Un maniement du marteau aussi vif et précis qu'une aiguille, est-ce possible ? se demanda le Héros.

C'était un vrai petit garçon manqué, et cet aspect de sa personnalité plaisait au Héros.

Toutefois, tous ces récits prirent fin à la venue de la princesse sans ailes qui vint prendre une pause. Étant exténuée après tant d'efforts, elle s'assit sur les cuisses du Héros qui poussa une grande expiration vidant ses poumons ne s'attendant pas à subir le poids de sa protégée.

- Dis que je suis grosse.

- Tu m'ôtes les mots de la bouche.

Elle accentua le poids de son corps sur celui du Héros, mais le garçon ne broncha pas, c'était juste le fait qu'il ne s'y attende pas qui l'avait surpris – après tout, il était l'homme qui était capable de se battre en tenant des poutres de six mètres de long. Il fit signe à la naine que son amie était bizarre, elle ne fit qu'hausser les épaules.

- Ton fiancé n'est pas là pour que tu fasses ça ?

- Non, il ne vient jamais à la plage, et jamais à mes matchs de repousse-balle...

- Donc je fais mieux que lui en une seule sortie ? Ne suis-je pas ton véritable prince charmant ? ironisa-t-il.

- Peut-être, rétorqua-t-elle, mais ça sera le cas le jour où t'arrivera à te réveiller plus tôt que dix heures du matin.

- Toujours la même rengaine, soupira-t-il.

- Ce n'est pas ma faute si tu ne fais aucun effort.

- Plus que Beneltig en tout cas, se moqua-t-il.

- C'est vrai. Je te laisse ce point.

- En tout cas, tu as l'air de bien t'amuser.

- En même temps, on est à la plage, je joue à mon sport préféré et il fait beau : que demander de plus ?

Il fait toujours beau dans ce royaume.

C'était grisant d'avoir toujours une météo parfaite comme si on se trouvait au paradis, mais le Héros aimait aussi les temps pluvieux – quand il n'était pas dehors parce que les pluies acides non merci. S'il faisait un petit caprice à la reine allait-elle accéder à sa requête d'avoir de la pluie ou allait-il devoir aller jusqu'aux champs pour en obtenir ?

Néanmoins, ce décor festif le troublait. Il revenait des Basfonds de la ville et y avait vu les choses les plus affreuses qui puissent exister. Une pauvreté extrême, des habitants qui vivaient dans des logements plus qu'insalubres, et un sol nourri au sang de ses habitants.

Cela lui retournait l'estomac rien que d'y penser.

Fort heureusement, il était distrait par la Fée qui interpella sa meilleure amie en lui pointant un groupe de garçons réunissant des fées, des elfes, des bouquetins, et des centaures à la musculature saillante.

- T'as vu les beaux garçons là-bas ?

- J'avoue qu'ils sont pas mal, lui répondit la naine d'une voix monocorde.

L'un d'entre eux fit un clin d'œil à la Fée qui n'en fut pas indifférente.

- Pfff, je les froisse comme je veux, intervint le Héros, et ils sont pas si musclés que ça.

- Plus que toi déjà, lui rétoqua-t-elle.

Il feinta le désintérêt en détournant le regard maugréant que musclés ou pas, leurs muscles n'arrêtaient pas les balles de plasma ou de plomb. Cette phrase fit glousser la Fée ne s'attendant pas à le voir être jaloux d'autres hommes. Mais il était bien normal qu'il le soit avec un corps aussi défectueux que le sien.

Le temps passant elle leur proposa de jouer avec eux au repousse-balle.

- Je ne sais pas jouer à ton sport, lui répondit la naine, et tu le sais bien.

- Tu sais jouer à quel sport ? l'interpella le Héros, parce qu'on a joué au basket, non excusez-moi, au « jet de ballons dans un panier », et t'as réussi à marquer contre ton camp !

- C'est faux ! protesta-t-elle.

- Bien sûr que c'est vrai ! renchérit le Héros, c'est avéré ! C'était la dernière fois que Lin est venu me chercher.

- Bah je ne m'en souviens pas !

- Tu te souviens de ce que tu veux en fait, hein !

- Si tu es meilleur qu'elle en sport, pourquoi ne pas venir jouer avec nous ? lui demanda la Fée en lui faisant les yeux doux.

Il prit pour excuse la lecture religieuse et le fait qu'il n'ait pas de maillots de bain.

- Dis surtout que tu ne voulais pas en acheter.

- Je suis venu, c'est déjà ça, rit-il en croisant les bras derrière sa tête en fermant les yeux.

La Fée se leva et partit fouiller dans son sac et jeta sur la tête du Héros un short de bain.

- J'avais prévu le coup te connaissant.

- Sans déconner..., ronchonna-t-il en Franca.

- Tutut. Arrête de parler en Franca sinon tu vas perdre ton Oli'Ane. Allez, je t'attends sur la piste, dit-elle en fuyant.

- Le terrain, on dit, la corrigea-t-il.

Il regarda le maillot avant de le froisser en boule.

- Quelle chieuse, vraiment...

- Je peux te poser une question ?

- Tu l'as déjà fait.

- Je peux te poser trois questions ? souffla-t-elle.

- T'es pas drôle, ronchonna-t-il, mais vas-y.

- Tu apprécies Princesse ?

- Oui sinon je la défendrais pas au tournoi.

- Comme si les mercenaires appréciaient leurs clients... Je te parle en amour, neuneu.

- Ah ! fit-il semblant de s'en rendre compte avant de parler lentement en étirant chaque syllabe, tu veux dire de cette façon ?

- Oui.

- Hé bien, on va dire que je ne peux pas rester indifférent après toute l'aide qu'elle m'a apporté et qu'elle reste une jolie personne malgré sa bosse sur le nez.

- Un détail.

- Oui.

- Si elle quittait son amoureux, te présenterais-tu à elle ?

- Elle le quittera pas.

- En es-tu sûr ?

- A cent pour cent. De ce qu'elle m'a dit ils se connaissent depuis tout petit et se fréquentent depuis au moins quatre ans. À ce niveau, la prochaine étape, c'est le mariage.

- Ça ne se passe pas toujours comme ça, tu sais.

- Je l'espère pour elle. Je peux pas lui apporter le bonheur qu'elle recherche, et la mêler à ma quête sanguinaire n'apporterait rien de bon, ni à elle, ni à moi. Dans tous les cas, je n'éprouve pas cet amour envers elle que tu attends de moi.

Se levant de son siège, il s'étira et s'apprêta à partir se changer.

- Si tu le dis, c'est toi qui vois.

- Parce qu'elle va le quitter ? l'interrogea-t-il l'air de rien.

- Intéressé ?

- Pas vraiment.

- Alors pas besoin qu'on s'éternise sur le sujet. Toi qui n'aimes pas te montrer comment tu vas faire pour jouer ? changea-t-elle de sujet.

- Mes jambes sont bandées et je vais garder mon haut, je pense que c'est suffisant pour que les gens soient pas dégoutés par mes jambes contusionnées.

- Tu te prends vraiment la tête pour beaucoup de choses. Tu es déjà humain, c'est déjà dégoûtant !

- Je pue la magie, ça atténue l'odeur !

- On va dire ça comme ça.

Laissant Mina seule sous le parasol, celle-ci se fit une simple réflexion qui l'amusa en le voyant partir se changer : « Quel trouble-fête. »

Le fils d'Elena pouvait dire ce qu'il voulait mais quand un sport ne lui plaisait pas, il ne faisait aucun effort pour se démener surtout s'il ne savait pas y jouer, mais plus la partie s'éternisait plus il s'améliorait au point de pouvoir devenir un pilier de l'équipe adversaire de la Fée. Une fois les changements d'équipe faits, tous les deux du même côté devinrent invincibles, se couvrant du mieux qu'ils le pouvaient. L'un arrêtait les tirs et l'autre renvoyait les balles à pleine puissance : en somme, elle était son bouclier et lui son épée.

Leur petit jeu avait dû durer deux heures tout au plus, le temps que la lumière du ciel s'atténue. Les gens se mettaient à quitter la plage pour rentrer chez eux, c'est la Fée qui dut soutenir le Héros qui s'était épuisé vaillamment pour être à la hauteur des attentes de sa protégée, tout en contrôlant sa force et ne pas user plus de puissance pour que le jeu reste équitable.

- C'était un beau match, commenta le Héros.

- À qui le dis-tu, lui rétorqua la Fée, en tout cas, merci d'avoir voulu jouer avec moi, et surtout d'être venu.

- T'inquiète, ça me fait autant plaisir que ça te fait plaisir. Et pour te faire pleinement plaisir...

Il la souleva de terre et la porta sur ses bras.

- ... et si je te portais jusqu'à Java-Aleim ?

- Ne fais pas ça ! C'est honteux !

- Te porter comme la princesse, c'est honteux ? Première nouvelle.

La princesse rougit, mais ni une, ni deux, le Héros se mit à courir à toute vitesse jusqu'au bas de l'arbre résidentiel de toutes les fées au sang bleu.

- Et tu n'éprouves rien pour elle..., dit Mina.

Ayant ramené sa demoiselle chez elle, le Héros réfléchit à cette après-midi de jeu qu'il avait eu avec les gens de Haute-Ville et du Sanctuaire. Il est vrai qu'il les appréciait, et eux avaient l'air de l'apprécier aussi, à la même hauteur que lui, mais le malaise qu'il ressentait est qu'il n'appartenait pas à ce milieu. Il n'était aucunement en quête d'élévation sociale, mais avait accédé aux plus hautes strates de cette société par coup de chance, échappant à son milieu social d'origine. Cependant, voyant ces enfants désœuvrés dans les Basfonds de Sylvania, il ne pouvait se sentir que sale après avoir joué avec ces bourgeois et en oubliant ces enfants qui crevaient de faim et de soif.

Quel genre de héros était-il pour ne pas faire profiter à chacun le bonheur ressenti par d'autres ? Était-ce mal de s'amuser alors que d'autres crevaient de faim ?

Dehors, ce genre de réflexion ne lui était jamais venu car il était un mercenaire, un chasseur de monstres, de prime, celui qui était à la recherche de l'homme qui tua sa mère. Mais ici, c'était autre chose, bien qu'on le détestât à cause de son humanité, les gens avaient fini par l'oublier et plus s'intéresser à qui il était. C'était avantagé car la reine le traitait comme son fils, mais pas seulement : sa nature de gentil garçon et aimable, aidait à ce qu'il se fasse accepter.

Néanmoins, trahissait-il Malalalivia en s'amusant avec les nobles ? Et plus profondément, trahissait-il ses attentes en voulant réaliser le rêve de la Fée ?

- Rah ! J'ai pas à penser à cela. Ce pays n'est pas le mien, ils se débrouilleront bien tout seul ! enragea-t-il.

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