Les Raisons du But d’une Vie

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Deux semaines et quatre jours s'étaient écoulés depuis cette discussion en terrasse entre Helmir et le Héros et depuis ce jour, personne ne l'avait revu. Il était juste parti à ses rendez-vous quotidiens à l'hôpital, dans les Basfonds et à la tour d'entraînement, mais dès l'instant où il quittait ces lieux, on ne le revoyait plus. Il ne donna aucune nouvelle ni à la reine, ni à sa fée, ni à Helmir, ni Malalalivia et Lelelitio.

Personne ne savait où il pouvait se trouver le reste de la journée.

Le soir, la reine tentait de savoir à quoi il pensait et où il se trouvait, elle le ressentait chez lui face à son écran d'holovision et il pensait... au patinage artistique ?

C'était plus que... surprenant...

Etc'était la dernière chose qu'il avait demandé à Helmir de lui rapporter de la Bibliothèque Universelle et il lui avait expressément dit que c'était extrêmement urgent donc elle avait dû se faire accompagner de Sawyer qui ne s'était jamais rendu à Vicenti pour le voyage retour.

Absolument personne ne savait ce qu'il était en train de préparer.

Cependant la reine ne le dérangea pas, elle avait ses propres soucis...comme ses études pour devenir archimage.

Elle n'avait jamais pensé que cela serait aussi difficile d'en devenir une. Elle se demandait bien comment la Félonne avait pu l'être.

Il fallait bien être aussi folle qu'elle pour avoir réussi un tel exploit...

La liste des choses à apprendre était phénoménale : il était de source connue que la Félonne Marrynélia était une passionnée de savoir occulte, de science, de philosophie et mêmes de sciences mortes comme l'astronomie... On pouvait facilement la qualifier de plus grande magicienne de son ère avant qu'elle ne s'enfonce complètement dans de la magie « démoniaque » et qu'elle ne devienne une sorcière. À la différence d'Audisélia qui n'était intéressée que par les technologies humaines et tout ce qui a trait au combat. C'est d'ailleurs grâce à tous ces affrontements, batailles et guerres menées, qu'elle a pu acquérir toutes ses connaissances concernant ses pouvoirs, et l'avantage non négligeable de son attribut génétique lui permettrait d'acquérir les compétences nécessaires pour passer sa magie au niveau suprême une fois qu'elle sera adoubée par les autres archimages du royaume.

En attendant, elle devait mémoriser un nombre incalculable de sort, de magies existantes, de potions peu ragoutantes, de runes indéchiffrables, de rituels éreintants et de parchemins inimitable. Même pour elle qui faisait fonctionner son cerveau 24 heures sur 24, cela devenait ardu.

Voilà pourquoi elle était enfermée dans la bibliothèque royale, entourée de bouquins et de parchemins poussiéreux, lieu où la lumière du jour ne passait plus à travers les fenêtres à cause de la crasse qui s'y était collée – les femmes de ménages ne voulaient plus venir dans ce lieu au vu du nombre de fois qu'il a brulé et qu'il a été restauré, désormais, il n'y avait que des torches de luxinite qui l'éclairaient, cependant la bibliothèque royale gardait toujours sa mauvaise presse auprès du peuple, surnommée : le four d'autodafé. C'est pour cela qu'il était rare de trouver plus d'une personne dans cette pièce, les rares fois où c'était le cas, c'était quand les archivistes découvraient de nouveaux documents historiques à archiver, mais tout avait été déplacé dans les nouvelles archives...

- Si on mélange trois gouttes de bave de crapaud taureau avec du miel d'abeille géante de E'M'rio, on peut...

- Ma reine !

Audisélia sursauta d'effroi à en tomber de sa chaise. Elle n'avait senti personne arriver. Elle était si concentrée dans son texte qu'elle avait oublié de faire attention à ce qu'il se passait dans le royaume ou qui pouvait tenter de l'assassiner. La reine se releva dignement en essuyant sa robe et remettant sa couronne sur sa tête à la longue et brillante chevelure pastel, puis s'adressa à son interlocuteur qui n'était autre que la Fée.

- Comment m'as-tu trouvée ?

- C'est Sawyer qui m'a amenée, expliqua-t-elle en pointant de son index la porte spatiale derrière elle.

Et avant qu'Audisélia puisse dire un mot, celle-ci se referma instantanément.

- Enflure..., siffla-t-elle.

En tout cas, il l'utilise de plus en plus, cela veut dire que les évènements se mettent en branle.

- Vous vous préparez à l' « Épreuve Suprême de Magie des Archimages » ? se lança timidement la Fée.

- Que me veux-tu, Princesse-Sans-Nom ? la coupa la reine.

- En fait, je suis à la recherche de Nalo, lui dit la Fée.

- Toi aussi tu t'es mis à l'appeler ainsi.

- Tout le monde le nomme comme ça, quel autre nom pourrais-je lui donner ?

- « Mon fils », s'exclama la reine.

La Fée ouvrit de grands yeux ne savant pas comment prendre la remarque de la reine. Était-ce un reproche ou...

- ... enfin... quand il m'aura dit maman concrètement, enragea-t-elle.

Les lèvres de la reine s'agitèrent, le coin droit de ses lèvres se cripant et ses cheveux s'hérissaient car elle laissait échapper quelques minuscules éclairs de son corps.

- Vous avez d'étranges lubies, ma reine, pouffa de rire la princesse en voyant les mimiques amusantes de la reine.

- Tu verras quand tu seras reine qu'il faut bien s'occuper pour ne pas penser à tout ce qui concerne l'administratif, et les guerres sont bien redondantes, même en temps de paix puisqu'il faut préparer ou se préparer à la suivante. Il n'y a que le combat qui est amusant.

Audisélia amena une chaise avec sa magie de lévitation pour que la Fée puisse s'asseoir en face d'elle. Malgré son visage jouasse, la princesse semblait plutôt inquiète.

- Qu'est-ce qui ne va pas ?

- Vous devez le savoir puisque vous pouvez lire dans les pensées.

- Je ne me le permettrai dans une discussion directe avec quelqu'un, la rassura la reine, et c'est une des idées reçues que je subis ça. C'est compliqué à expliquer mais je ne perçois que les mauvaises intentions des personnes, ce qui me permet de les communiquer aux gardes royaux ou à la Défense, donc non, je ne sais avec quel vêtement tu comptes te rentre chez tes amis !

- C'est rassurant.

- Nous sommes dans une monarchie absolue mais je me donne certaines limites quand même. Cela étant, si tu gagnes le tournoi, tu devras procéder à ta façon, et ne pas suivre aveuglément les pas de tes prédécesseuses.

- Je le sais.

La reine remarqua qu'elle n'avait pas la tête à parler de sa succession, elle referma le bouquin qu'elle lisait et approcha sa chaise de la princesse en sautillant.

- Qu'est-ce qui ne va pas ? C'est ton prince charmant qui te manque ?

- Beneltig ?

- Non ! Il n'est pas prince, lui. Je parle de celui qu'on appelle Nalo-vace.

- Vous trouvez qu'il est charmant ?

- Il s'est proposé pour être ton champion alors qu'il était en « danger de mort », donc on va dire que... oui avec des gigas grosses pincettes.

- Des pincettes énormes comme ça, rétorqua la princesse en écartant grandement ses bras au-dessus de sa tête.

Les pincettes étaient si grandes que les deux les mimèrent avec leurs bras.

Voyant comme elles voyaient le Héros, toutes les deux se mirent à rire. Il n'y avait aucun moyen que le Héros soit un prince charmant, il n'en avait ni l'allure ni les principes. Il était à la limite du sauvageon ! Mais un sauvageon sympathique qui semblait avoir ses propres valeurs et ses propres principes. C'était peut-être cela qu'elles appréciaient chez lui : il était rare les moments où il se comportait un peu plus dignement, si rares que quand ils survenaient la Fée n'en restait pas indifférente.

- Nonobstant, que ça soit Beneltig ou Nalo, les deux ont fini par disparaître, remarqua la Fée.

- Tous les deux ont des devoirs. Ils reviendront une fois ceux-ci terminé, la rassura la reine en lui caressant le visage.

- Je ne sais pas. Je me suis disputée avec Nalo durant la fête du Samarin et depuis, je ne l'ai pas revu mis-à-part aux entraînements qu'il a avec le chef des Saints et une fois en dehors lorsqu'il est sorti de la chambre d'hôpital de Jacob. Mais dans les deux cas, il avait le visage assombri, il ne m'adressa aucunement la parole alors même que je l'aide à améliorer son agilité.

- Mais...

- Et c'est pareil pour Beneltig d'ailleurs ! la coupa la Fée, on dirait qu'il m'évite depuis qu'il est revenue de sa mission avec la garde royale. Je tente de l'appeler, il ne me répond pas. Je pensais qu'il me trompait mais même ses amies féminines ne savent pas ce qu'il fait et où il se trouve.

Pour le Héros, la reine savait pertinemment ce qu'il mijotait, enfin dans la mesure que cela concerne les Adeptes de la Félonne, mais Beneltig qui leur était associé, elle n'avait aucune idée de ce qu'il préparait en leur compagnie.

- Les hommes sont comme ça que veux-tu... On ne sait jamais vraiment ce qu'ils pensent au fond de leur ciboulot, soupira la reine, et ça a l'air de valoir pour toutes les races. Après, en ce qui te concerne, il faut que tu me dises la teneur de tes propos à son encontre qui ont mené à cette dispute.

- Pour quelles raisons, cela serait ma faute ? se défendit la Fée et se levant main sur le cœur.

- Assieds-toi.

La Fée s'exécuta, puis détourna la tête.

- Et de toute manière, vous devez déjà être au courant de la dispute qui a éclaté à cause de nous deux ?

- Je t'ai déjà dit que non !

La reine se frappa le visage avec la paume de sa main se demandant si toutes les jeunes filles de son âge étaient aussi enquiquinantes qu'elle. Elle ne pouvait même pas faire le comparatif avec Malalalivia puisqu'elle était âgée de vingt-six ans, et les autres princesses paraissaient être de la même teneur. Puis elle se demanda si au temps où elle vivait avec Sawyer et son père, elle était pareil. Il est vrai que dans leur tendre jeunesse, elle n'a pas été des plus sympathiques avec eux.

Ce simple souvenir lui esquissa un sourire sur le visage. Alors, elle fit preuve d'un peu de mansuétude avec sa favorite.

- Je suis au courant de la bagarre qu'il y a eue, les gardes me l'ont rapportée mais le reste, ce qui est privé entre vous deux, je ne le sais pas. Je te l'assure !

- Je vous crois, c'est juste que... j'aurais préféré que vous le sachiez parce que j'ai moi-même du mal à comprendre ce qu'il me reproche.

- Mais qu'est-ce que tu lui as dit, nom d'un lapisdère ? s'énerva la reine perdant patience.

Une exclamation qui prendra tout son sens dans quelques temps.

- Mais c'est juste... ! s'exclama la Fée, c'est juste que je lui ai fait une remarque qui ne lui a pas plu et... je ne comprends pas. Je trouve qu'il n'y a rien d'anormal dans ce que j'ai affirmé.

- J'attends.

- Je n'ai juste qu'exprimé le fait que les habitants des Basfonds n'ont pas nos responsabilités en tant que princesse du Sanctuaire et que je les ai enviés de pouvoir se trémousser dans la crasse et la boue sans penser au lendemain. Nous nous devons toujours nous pomponner pour correspondre à ce qu'on attend de nous, surtout moi qui n'ai pas d'ailes, et je trouvais chanceuse mon homologue des Basfonds. Je ne vois pas ce qu'il y a de si dérangeant à le dire ! Doit-elle supporter les moqueries de ses comparses fées alors qu'elle n'a rien à se reprocher ? Lui reproche-t-on son existence ?

Devant la crise de sa favorite, la reine se malaxa les joues pour réfléchir à ce qu'elle pourrait dire de constructif à son égard pour qu'elle comprenne. Elle connaissait bien les fées du Sanctuaire et avait conscience du mépris qu'elles avaient pour elle, mais ne leur en tenait pas vraiment rigueur – après tout, elle peut détruire le Sanctuaire et tout Sylvania en un seul levé de bras. Néanmoins, la frustration de la Fée n'était pas anodine et venait bien de quelque part. Elle ne dit rien alors pour la laisser exprimer toute la rage qu'elle avait en elle, elle sentait que plus elle parlait, plus elle avait envie d'exploser.

- Et puis les champions... Quelle stupidité ! Pourquoi vouloir se sacrifier pour sa protégée ? Mourir leur convient si bien ? Comme si leurs vies étaient irremplaçables ! Eux sont remplaçables par leurs vies. Leurs protégées ne vont pas les pleurer éternellement, ils ne seront que de vagues souvenirs du passé qu'on se remémorera une fois par jour, ensuite une fois par mois puis une fois par an jusqu'à totalement les oublier. Et Nalo ! Lui qu'est-ce qu'il peut bien m'énerver ! Je ne lui dis pas pour qu'on ne se dispute pas et qu'il se mette dans une colère noire mais pourquoi tient-il tant à partir alors qu'il est très bien ici ? Il pourrait habiter ici, au Sanctuaire ou même au palais puisqu'il est votre fils adoptif. Il a la chance d'avoir la vie de prince mais il préfère repartir dans ce désert néfaste où aucune vie n'est bonne, où le mal et la mort règnent en maitres et sans partage. Ne peut-il pas accepter que sa mère soit morte et accepter qu'il faille passer à autre chose au lieu de perdre sa vie inutilement ? éclata la Fée.

Dans sa colère, elle se leva de sa chaise les poings serrés, se mordant la lèvre inférieure, elle était devenue furieuse au point que son visage rosé finisse par devenir complètement rouge. La reine ne l'avait jamais vue dans un tel état, elle s'était même demandé si un jour elle serait capable de se révolter contre ce qu'elle subissait – il faut avouer que c'étaient les ordres de la reine qui l'avaient conduite à ne jamais protester lorsqu'on l'insultait pour son handicap.

- Ou du moins... me demander mon aide... même si je ne suis pas la fée de la légende... Je ne sais jamais à quoi il pense. Il disparaît pendant des semaines puis réapparaît comme une fleur de vlasy...

- Ah ! Mais c'est une fleur de vlasy qui manquait à ma potion ! s'exclama la reine.

Elle retourna sur ses parchemins et nota le dernier ingrédient de sa recette pour sa potion d'invisibilité, il est logique que cette fleur fasse partie des ingrédients puisque lorsqu'on s'en approche ses pétales confinent ses pistils en son sein avant de rendre sa fleur invisible la faisant se confondre avec une simple herbe. Ensuite, une fois notée, elle revint vers sa favorite, les bras croisés sur ses jambes et le dos arc bouté.

- As-tu fini ?

- Vous allez me réprimander pour avoir mal parlé de votre meilleure amie ? lui demanda la Fée inquiète.

- Je ne vois pas en quoi tu as mal parlé d'Elena, lui sourit la reine, même si cela peut froisser « Nalo », tu as raison sur certains points, soupira-t-elle, concernant son obsession bien sûr, le reste on y viendra plus tard. Rassis-toi.

La Fée lui obéit et Audisélia rapprocha sa chaise de la Fée et lui attrapa les mains.

- Il faut que tu comprennes, jeune fille, que les hommes et les femmes sont tous à la recherche d'une seule chose : une raison à leur existence. Et certaines personnes ne peuvent pas se contenter de simplement vivre, ils veulent vivre pour une raison, une raison qui fera que chaque matin ils se lèveront et combattront pour eux, pour les leurs, pour un idéal plus grand qu'eux. Les champions se battent pour vous car cela est leur devoir et pour nombre d'entre eux c'est parce qu'ils vous aiment et tiennent à vous, que ça soit par amour ou par amitié. Néanmoins, certains se battent pour la gloire d'avoir à protéger une princesse, et c'est pour cela qu'ils se battent. Est-ce bien ou mal ? Cela ne me regarde pas mais en tout cas, cela a toujours été comme ça. Tu peux bien leur reprocher cet égoïsme envers eux-mêmes, qu'ils devraient cesser cet altruisme égoïste et penser à eux, mais ils ont défini ainsi le but de leurs vies. Seuls eux peuvent savoir si cela est futile ou non. Tu comprends ?

- Je pense, même si je ne comprends pas vraiment...

- Certains ont perdu cet être qui leur faisait ressentir ce sentiment d'être important, et c'est le cas de ton ami et de mon fils, ils ont perdu leur raison de vivre, leur tout et ne vivent plus que pour le récupérer.

- Mais comment ? s'égosilla la Fée la fois tremblotante, elle est morte ! Qu'est-ce qu'il va bien pouvoir récupérer ?

La reine lui caressa les mains pour la calmer, elle posa une main sur son épaule et poursuivit son explication.

- C'est bien ça le soucis : il n'y a rien à récupérer. Ils poursuivent une chimère qui n'a pas lieu d'être. Et cette chimère pour le héros de la légende actuel est celui qui porte bien son nom, le Némésis, celui qui lui a arraché sa mère, qui m'a arraché l'un des êtres que j'aimais le plus au monde... Il ne peut plus vivre qu'en parcourant les terres désolées de Franca à la recherche de l'assassin de sa mère. Je n'ose même pas imaginer ce que son esprit doit imaginer du destin de sa sœur Zelda, même s'il n'en parle jamais.

- Je ne vois pas en quoi ça va me rassurer de savoir que si les champions ou d'autres personnes perdent leur raison de vivre, ils perdront toute raison et se lanceront dans une course qui les mènera à leur perte... ou se noieront tout simplement dans la dépression et l'alcool.

- Les trois sont cumulables tu sais, sourit la reine, mais ce destin n'est pas inéluctable non plus. Cette princesse dont tu dis qu'elle n'a pas de responsabilités parce qu'elle a le nom de Grave dans son patronyme, bien qu'on lui ait arraché ce que nous considérons la chose plus importante de notre être, ne s'est pas laissé abattre. Malalalivia se bat tous les jours pour pouvoir être reine de Sylvania et changer les choses, mais reste proactive sur les problèmes qui sont à sa portée.

- Vous savez qu'il ne faut pas prononcer le nom de ceux de la famille Grave, lui rappela la Fée.

- Et que les fées sans ailes n'ont pas droit de vie à leur naissance, rétorqua la reine, je n'ai que faire de ces règles sans sens. Si tu n'as pas d'ailes...

La reine s'arrêta, peut-être allait-elle trop loin cette fois. Elle ne pouvait pas lui dire cela.

- Si tu n'as pas d'ailes, ça ne fait pas de toi un sous-être qui doit être oublié, que le quatrième roi-combattant ait épousé une humaine et lui ait fait un enfant ne change pas la valeur de Malalalivia Talemilia Grave. Elle reste une parfaite représentante de notre royaume et en ce que je crois. Contrairement à moi ou à Nalo, elle ne se laisse pas abattre par les vicissitudes de la vie et continue à se battre malgré les difficultés pour ce nouveau but qu'elle s'est fixée, que ça soit à cause de son admiration pour le héros de la légende ou pour tous les maux qu'elle a sous les yeux, elle reste une femme forte et admirable. Et je ne crois pas que si elle mourrait demain, ou même ce soir, elle regretterait son choix de se battre pour les autres.

- Si vous le dites, ma reine...

La Fée ne semblait pas particulièrement convaincue par le plaidoyer de la reine, alors elle décida de se livrer à sa jeune protégée.

- Princesse-Sans-Nom-Et-Sans-Ailes... un jour il faudra que tu trouves un vrai prénom parce que celui-ci est interminable.

- Vous savez très bien que c'est impossible, rit tristement la Fée.

- Sauf si tu me succèdes. Nonobstant, Princesse, je dois t'avouer qu'il fut un temps je pensais un peu comme toi. Moi aussi, j'ai hurlé et pleuré en demandant à de nombreuses reprises à Sawyer pourquoi il me protégeait envers et contre tout et il m'a toujours dit une seule et unique phrase : « C'est mon devoir ! ». J'étais, et je le suis encore, à la fois en colère et heureuse d'être la raison de sa vie et de ses objectifs alors que je ne me voyais que comme un boulet à ses côtés. Pourtant, nous avancions ensemble, lui protégeant le dernier « membre » de sa famille à un prix incommensurable. Et chaque jour, je remercie les dieux de l'avoir mis sur ma route, et je le remercie, pas à voix haute, d'être toujours à mes côtés. Il doit me penser bête à croire que je ne sais pas qu'il pense que je l'ai mis de côté à penser tout le temps à Elena, mais c'est faux ! Je voudrais bien lui dire mais bon... En fait, je veux que tu comprennes que les règles imposées par notre royaume ne sont pas là indéfiniment, ce sont les régisseurs qui régissent les règles et donc tu n'as pas à t'y soumettre parce que c'est la tradition si tu trouves quelque chose d'injuste, bats-toi pour le rendre plus juste.

- Je le voudrais bien mais je n'ai pas cette fibre guerrière que vous avez ou cette fibre révolutionnaire qu'a la fée aptère des Basfonds... Malalalivia, se désola la Fée.

- Alors entoure-toi de personnes qui l'ont, de personnes qui te poussent à être meilleure, la vie ne s'accomplit pas toute seule, il faut du monde derrière nous pour cela. Et c'est le but de la seconde partie du tournoi de toute manière.

- Je le sais, dit la Fée.

- Souviens-toi aussi d'une chose : j'ai initié le programme de découverte des peuples et des autres civilisations pour que vous appreniez tout au long de votre vie que vous n'êtes pas le centre du monde. Que vous appreniez, vous, enfants du Sanctuaire, vous êtes des êtres chanceux mais pas des élus qui doivent marcher sur autrui et mépriser les plus démunis, surtout ceux habitant notre royaume.

- Vous dites ça comme si vous n'avez pas été une princesse du Sanctuaire...

- Non je ne le suis pas, je suis bien une princesse des Basfonds bien que je ne porte pas la double syllabe « punitive » dans mon prénom. Toutefois, je ne compte pas m'étendre dessus aujourd'hui.

- D'accord, soupira la princesse sans ailes.

- J'espère que tu retiendras ce que je t'ai dit... ou au moins que ça t'a rassuré.

La Fée hocha la tête, la reine lui caressa les cheveux en signe d'encouragement et de remerciement.

- Madame, vous aimez vraiment Sawyer ?

- Bien sûr, j'ai essayé de lui faire comprendre une fois, mais il m'a rejeté, je dois être un énorme boulet pour lui ! rit la reine.

Derrière la porte de la bibliothèque royale, Sawyer cessa d'espionner les deux fées et s'en alla en accompagnant silencieusement le rire de sa protégée et lui répondit en chuchotant sans qu'elles puissent entendre :

- Idiote... Tu n'as jamais été un boulet pour moi, Sélia.

Et essuya une larme qui s'écoula le long de sa joue.

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