Chapitre 6 : Iram : La demande de la Reine.

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Je ne comprenais pas : Soline avait utilisé sa magie pour repousser Soren. En cet instant, ce n'était pas ma sœur qui attaquait Soren, mais quelque chose de beaucoup plus sombre.

Laissant l'elfe se remettre de ses émotions, je partis à la recherche de ma sœur. Elle se cachait dans la cour, sans doute pour ruminer de sombres idées.

« Tout va bien Soline ? demandais-je en m'approchant. Elle parut surprise et eut un mouvement de recul.

-Ah c'est toi. Ouais ça va. Il y a juste une chose que je ne comprends pas.

-C'est quoi ?

-C'est le fait que j'arrive encore à être surprise quand tu m'approches par derrière, alors que je vis avec toi depuis seize ans !

Je reste un instant stupéfait avant de pouffer :

-J'ai toujours été discret, tu le sais bien. Mais toi, explique-moi un peu ce que tu as fait tout à l'heure. Je pensais que tu ne ressentais plus de colère. Comment tu as pu l'attaquer ?

-Je ne sais pas, répondit Soline. C'était instinctif. J'avais l'impression de ne plus être moi-même.

Nous restâmes un instant songeur, jusqu'à ce que Gorim débarqua :

-Il faut y aller. D'après Katamo, c'est le moment ou jamais sinon on ne verra jamais ses majestés.

-Bien. Dis-je. On y va sœurette ?

Elle se leva, me regarda et me dit d'une voix un peu lasse :

-A-t-on vraiment le choix ? »



Nous prîmes nos affaires et nous allâmes au château à l'aide d'une calèche enchanté. Là-bas, je fus assez déçu par le palais. En voyant le royaume d'Echandi et le village de Maf-rup, je m'attendais à quelque chose de coloré et de vivant. Ici, la pierre était grise, les tuiles noires et les portes d'un marron banal. Pour un artiste comme moi, cette vision équivalait à l'enfer. Comme s'il avait lu dans mes pensées, Riham demanda :

« Dis, Katamo, pourquoi le château est-il si... sombre ?

Katamo ne répondit pas tout de suite, trop occupé à renvoyer la calèche.

-Nous, les mages, ne considérons pas la beauté des objets comme importante. Certes, pour des boutiques, c'est important, car il faut attirer le regard. Mais quand il s'agit du reste, on le délaisse car peu importe la beauté d'un objet, elle finira par se flétrir et l'objet disparaîtra.

-Je vois... Murmura Riham.

-C'est poétique comme façon de voir les choses. Dis-je.

-Si tu le dis. Répondit Katamo. »

Nous entrâmes dans le hall du château et un serviteur vint immédiatement à notre rencontre. Le roi et la reine étaient en réunion et, en attendant notre tour, il devait nous faire visiter l'endroit. Il était grand et sec même si on pouvait deviner les contours d'un corps musclé sous sa livrée. Il était brun avec les cheveux qui lui arrivait un peu en-dessous des épaules et avait des yeux noirs avec un regard doux.

« Je me nomme Andromé, j'ai dix-huit ans et je travaille ici depuis près de sept ans. Il m'a fallu quasiment trois années entières juste pour apprendre le plan du château. Voyez-vous, il est magique : les couloirs peuvent s'étirer à l'infini et un seul cagibi peut contenir plus d'objet que n'importe quel royaume de ce monde.

-Comment faisiez-vous pour ne pas vous perdre les premières années ? Se demanda Soline.

Elle regarda Andromé avec de grands yeux intrigués. Il repoussa la mèche brune qui lui tombait sur le front et expliqua :

-Les premiers temps, on ne te laisse pas tout seul, tu travailles en duo avec un serviteur plus expérimenté. Il te guide, te donne des trucs et astuces pour t'en sortir. Puis, quand tu connais suffisamment le château, il cesse de te suivre. Et tu peux me tutoyer, ajouta le serviteur.

-Cool. Tu en a un, toi, de nouveau à chaperonner ? Continua-t-elle.

-Non, on peut en avoir un seulement après dix ans de services. Mais mon tour viendra bientôt. »

Ils continuèrent à discuter, Andromé s'arrêtant parfois pour nous donner quelques informations. C'était quelqu'un de bienveillant et je voyais bien que Soline était intéressée. De plus, l'intérêt semblait réciproque et je me réjouis de la voir en si bonne forme, elle qui était si morose ce matin.

Après plus d'une heure de visite, un messager vint apporter une lettre à notre guide.

« Le roi et la reine peuvent vous recevoir. Annonça-t-il. En route ! Et marchons d'un bon pas car, si on se perd ou si les couloirs n'en font qu'à leur tête, on n’est pas près d'arriver.

-Je pensais que tu ne te perdais plus. Dis-je.

-Ça arrive encore. Le plan du château n'est pas fixe. Souvent c'est le même pendant quatre ou cinq ans et après tout change. Du moins à l'intérieur. Mais, quand on est expérimenté, on s'y retrouve vite. C'est pour ça que j'adore la magie.

On pouvait presque voir des étoiles briller dans ses yeux. Soline se renfrogna :

-Toi au moins, tu peux l'utiliser. Murmura-t-elle avec un regard noir en direction de Soren.

-Tu sais, tout le monde peut l'utiliser. C'est une question de sentiment.

-C'est bien ça le problème. Rétorqua Soline.

-Tu n'es pas insensible ?

-Non.

-Alors tu peux utiliser la magie. Il n'y a pas qu'une seule émotion. Toutes peuvent être utilisées pour faire de la magie. Les bons, comme les mauvais. Si tu peux rester un petit peu, je pourrais te l'apprendre. À toi et à tes amis, bien sûr. Se rattrapa Andromé.

-Pourquoi pas. Ça peut être amusant. »

Il eut un sourire et s'arrêta devant une immense porte en bois. Il toqua trois petits coups avant d'entrer. Il nous fit signe d'entrer.

La pièce était petite. On aurait plus dit un salon qu'une salle du trône. Assis sur des chaises en en pierre, les deux souverains nous regardaient. Les cheveux blancs se confondaient avec leurs toges immaculées et leurs yeux en, mi-blanc, mi-bleus, me rappelait quelque chose. Je fus coupé dans mes pensées par Andromé qui nous présenta :

« Ma reine, mon roi, je vous présente vos invités.

-Nous nous rappelons de leurs noms, tout va bien, Trésop. Murmura le roi.

-C'est Andromé, majesté. Trésop est mon défunt père.

-Pardonne mon époux, dit la reine. Tu peux te retirer, Mérodé. »

Andromé nous lança un regard amusé avant de quitter la pièce à reculons, la tête toujours baissée. Pendant que la porte se fermait, il eut un dernier sourire, ce qui fit rougir Soline. Nous nous tournâmes à nouveau vers les monarques.

« Bien le bonjour, Soram et Irine. Commença la reine. Et bien le bonjour à vos amis. Nous savons que vous êtes là car vous avez une demande.

-En effet, ma reine. Dit Katamo. Et leurs noms sont Soline et Iram.

-Et vous êtes... Demanda-t-elle.

-Katamo, votre majesté. Je suis là pour les aider à formuler leur demande.

-Et pourquoi auraient-ils besoin de votre aide, Patemo ? Dit le roi.

-C'est Kata... Oh tant pis. Ils ne connaissent rien de ce royaume et de la coutume de l'échange.

Comme pour lui donner raison, Soline questionna Katamo :

-C'est quoi cette coutume ?

Le roi la dévisagea et expliqua :

-Ici, pour obtenir quelque chose, il faut en donner une autre. C'est la loi du Troc des Échanges. En fonction de ce que vous voulez, on vous demandera un objet ou un service de valeur équivalente.

Il y eu un blanc, pour que chacun puisse assimiler cette information. Puis, je demandais timidement :

-Que voulez-vous en échange du sable de votre sablier magique ?

Soudain, ils ouvrirent de grands yeux et la reine poussa un petit cri :

-Le sable enchanté ?! Mais rien ne peut être échangé avec ça. Sa valeur dépasse tout ce que vous avez ! Il est notre bien le plus précieux !

Katamo tenta de les calmer mais les souverains ne l'écoutaient plus. Quand ils eurent enfin décidé de se taire, le mage reprit :

-Nous ne le demandons pas comme nous demandons un objet, nous le demandons comme une faveur. Un service contre un service. Ne vous a-t-on pas expliqué que Tonn est de retour ?

-Si, si... Bougonna le roi.

-Le seul moyen de le vaincre est de réunir les objets les plus important de tous les royaume. Nous en avons besoin.

-Au fait, Katamo, tu ne nous as toujours pas dit ce que c'était ce sablier magique. Dis Gorim.

-Il s'agit du sablier qui leur permet de prévoir les catastrophes.

Ce n'était pas Katamo qui avait parlé mais Soren. Il continua :

-Les elfes l'ont créé avec l'aide de mages. Il s'agit d'un cadeau que nous leur avons fait. Si le sable est bleu, c'est qu'il y aura une inondation, jaune, une sécheresse... Ce genre de chose. Et quand il est noir...

-ça veut dire une guerre. Conclut Katamo.

En voyant la tête honteuse des souverains, Katamo demanda :

-Vous le saviez ? Pour Tonn ? Et pour la guerre ? Vous ne vouliez pas que nous soyons au courant. Vous comptiez faire un affrontement discret ou repousser Tonn dans un autre royaume. Sans faire de vague.

Le roi eut un air coupable et rétorqua :

-Nous le faisons pour le bien du peuple ! S'il apprenait le retour de Tonn, il serait bouleversé et la peur prendrait possession des esprits ! Mais... Si vous nous promettez que ça pourrait vaincre Tonn... On pourrait vous donnez du sable... Mais il... Il y a une contrepartie...

-Laquelle ? Demanda Riham.

Le roi ne semblait avoir d'idée, quand la reine prit la parole :

-J'ai un joailler, Caligostro, qui devait me confectionner une dague en diamant, pour offrir à un ami, et il ne me l'a toujours pas envoyé. Ce n'est pas son genre d'être en retard dans son travail. Je crains qu'il ne lui soit arriver quelque chose. Si vous allez le chercher et que vous me rapportez mon joyau, je pourrais envisager de vous donner du sable.

-Nous acceptons. Concéda Katamo. Caligostro est un vieil ami à moi. Où habite-t-il maintenant ? Je sais qu'il déménage souvent.

-Il s'est établi derrière la forêt Bleu. Répondit la reine. »

En voyant le regard horrifié de Katamo, je sus que ça n'allait pas être facile de sauver Caligostro.

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