XI

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Mirlen installa une bassine d’eau près d’un feu de camp. N’étant pas encore pleine, elle ordonna ses élèves de se relayer pour la remplir à ras bord. Les jeunes formèrent une chaîne jusqu’au lac. Elle se tourna vers un grand gaillard, un vagabond de la Brume Froide, qui présentait une plaie sur son avant-bras. Elle balança quelques chiffons dans l’eau, attendit quelques secondes avant d’en attraper un et de le passer sur la blessure du voyageur. Celui-ci émit une faible plainte mais ne fit rien pour l’empêcher de faire sa besogne.

Le village s’éveillait peu à peu. Mirlen avait aperçu sa petite sœur s’en aller récolter le miel des abeilles tout en évitant d’avoir des piqûres. La femme demanda à ses élèves de s’installer sur les troncs d’arbre, qui servaient d’assises, et commença son cours sur l’histoire de la Dame de la Brume. Quelques villageois se joignirent à eux en silence afin de préparer le déjeuner. Bientôt les effluves de légumes et viandes ébahirent toutes les papilles.

Les doyens se réunirent peu de temps après le repas pour décider du sort des malheureux qui, quelques jours plus tôt, avaient semé la zizanie au sein de leur communauté. Des hommes qui venaient d’un autre pays, des bandits sans cœur, des individus qui, depuis leur capture, dormaient dans les souterrains du village. Mirlen, comme tous ses camarades, après avoir envoyé les enfants jouer, écoutèrent d’une oreille ce que les anciens disaient.

Il était coutûme de punir efficacement les truants.

Finalement, il fut décidé que Mirlen ainsi que Firlen, son frère, s’occuperont des condamnés. L’adelphie abandonna leurs corvées habituelles sans attendre et se dirigèrent vers l’une des deux entrées du souterrain. Ils passèrent sous une tonelle fleurie, outropassant les enfants qui jouaient à chat, descendirent un escalier et arrivèrent au bord d’un fleuve. Ils le longèrent sans un mot, si ce n’était que rappeler à l’ordre certains adolescents désireux de briser les règles, puis ils passèrent une porte gardée par une paire de jumeaux. La prison, lorsqu’elle était pleine, était surveillée à l’extérieur et à l’intérieur pour garantir la sécurité de tous.

Au fond d’un labyrinthe de couloirs et de galeries, investies par une vingtaine de personnes, la paire arriva devant une cellule où trois hommes s’y trouvaient enchaînés. Mirlen leur adressa un sourire froid au travers de la lucarne. Firlen ouvrit la porte de la petite pièce étroite. Ensemble, ils trainèrent un premier prisonier au troisième sous-sol, sourd à ses supplications. Ils l’attachèrent solidement à une table, sanglé par des lanières en cuir, et demandèrent à un jeune geôlier de le surveiller. Ils récupèrent un à un les deux autres bandits et leur attribua un sort différent ; l’un fut suspendu au plafond et l’autre fut assis de force sur une chaise.

Le geôlier les laissa ensuite faire la deuxième partie de leur boulot. Mirlen, comme à son habitude, indiqua aux prisonniers ce qu’il allait leur arriver. Son frère se contentait de leur énumérer leurs crimes.

— Avant de commencer, dit Mirlen, comment vous appelez-vous ?

— Pourquoi est-ce qu’on te répondrait, sale putain ? rugit l’un des hommes en se débattant contre ses liens.

— C’est pour mettre un nom sur vos tombes, ironisa Firlen, caressant un couteau dans ses mains.

Il échangea un regard avec sa sœur. Celle-ci se dirigea vers un coin de la pièce, actionna un levier et se tourna vers l’individu condamné sur la table. Au-dessus de lui, le plafond commençait à s’ouvrir en deux dévoilant une plateforme cloutée. Elle resplendissait puisque les geôliers s’assuraient de la nettoyage après chaque punition. Le prisonier ne pouvait guère détacher son regard de la planche qui se rapprochait dangereusement de lui. À un certain moment, Mirlen enclencha un second levier. Par la fente déboula une grosse pierre qui s’écrasa sur l’objet, et celui-ci se planta avec violence dans la chair de la victime. Cette dernière se mit à hurler. Firlen esquissa un sourire. Il fit signe à sa sœur, après quelques minutes, de rembobinner puis, lorsque ce fut fait, il roula la table dans une pièce adjacente.

La boucherie pouvait commencer. Plus tard, le corps serait jeté en pature à des cerfs affamés.

Firlen amassa les vêtements déchirés dans un panier pour être lavé. Tout se récupérait. Rien ne se perdait. Il revint aux côtés de Mirlen qui, joyeusement, s’efforçait d’obtenir des informations avec un second bandit de manière très convainquante. Celui-ci, attaché sur une vieille chaise métallique, avait déjà perdu deux doigts et une oreille. Il saignait déjà comme un porc des bras et du torse.

— Concluant ? Questionna-t-il.

— Évidemment. Il faut envoyer Tirlen et Rirlen au-delà de la rivière pour ramener les denrées alimentaires volées. Apparement, il y aurait deux autres personnes impliquées dans ce vol.

— Parfait. Celui-là est bon pour un traitement de faveur alors.

Mirlen acquiesça. Puis elle lui demanda :

— Tu penses auquel ?

— La pendaison.

Le prisonier blêmit. Il gémit, incapable d’émettre le moindre son pour protester contre ses geôliers. L’adelphie l’ignora superbement. Firlen emmena sans tarder le truant dans les bras de deux gardiennes de prison. Ces dernières acceptèrent avec joie la mission qui leur fut donnée. D’autres se joignirent à elle pour éviter toute tentative d’évasion. Ensemble, ils emmenèrent le condamné dans une salle dédiée au séchage de viande.

Où il fut pendu à un crochet, fisselé comme un rôti et rangé dans une pièce froide.

Il ne restait que le dernier criminel. Celui-ci n’eut pas de meilleure chance. Il fut martelé de coups comme son camarade pour toute information supplémentaire avant d’être remis à des chasseurs du village pour être suspendu au milieu des cadavres dans la Forêt des Enragés. Des crânes peuplaient les branches de chaque arbre. Des os humains comme animaux jonchaient le peu de sentiers visibles. Comme d’autres avant lui, il serait dévoré par de petits mamifères, tels que les écureuils aux dents de fer ou encore les renards à deux têtes.

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