XIII

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Nitsugua reproduisait les gestes de sa professeure sans un mot. Un rictus amusé se dessina sur son visage. Le jeune homme commençait à rire de sa situation. Il déprimait moins ainsi et apprenait à redevenir lui-même. Sa dernière escapade dans les bois où il avait été confronté à la réalité de son existence, où les subordonnés de Fain i rir l’avaient retrouvé presque mort, l’avait profondément chamboulé. Depuis celle-ci, Nitsugua était sous haute surveillance, et sa moindre absence suscitait des entretiens avec plusieurs lieutenants de Fain i rir. Toutefois, cela n’empêchait personne de l’envoyer prendre des classes avec d’autres adolescents.

À côté de lui se trouvait Myahlaki, cette dernière jouissait de sa nouvelle vie et entreprenait beaucoup de choses que lui. Étonnement, elle avait bien appris le fait d’être aveugle, même si cela lui prenait du temps pour réapprendre à marcher ou à faire des choses basiques. Vrahas, la liée d’une dragonne sacrée, les avait rejoint récemment. Une noble, comme lui, qui était aussi l’ombre de son adelphie. Nitsugua se demandait si elle appartenait au clan Bahafarayama, celui-ci avait un drôle d’accent et se spécialisait souvent dans les runes.

Leur professeure avançait dorénavant dans la forêt invulnérable aux illusions de la Brume Froide. C’était une femme androgyne, dotée de dents accérées, dont les longs cheveux étaient gardés en chignon. Une tunique dissimulait le haut du corps. Un pantalon court masquait ses jambes élancées. Une cape se dressait sur ses épaules musclées. Sa voix portait sur leur classe, aussi ferme que séduisante, et racontait l’une des nombreuses histoires de la Brume Froide, plus particulièrement des Seigneurs qui la peuplaient ainsi que de la Dame de Brume.

— Sihesres ? Murmura Vrahas, timide.

L’enseignante s’arrêta et se tourna dans sa direction. Ses yeux amethystes brillaient.

— Pourquoi certains meurent ici ? Pourquoi échappons-nous à la nature de la Brume Froide ?

— La nature de la Brume Froide est défensive contre l’envahisseur. Combien d’états se sont faits la guerre pour une expension de territoire ? Combien de clans et tribus ont trouvé refuge dans le royaume de la Dame de Brume ? Si beaucoup meurent, c’est parce que leurs intentions sont mauvaises. Envers nous comme envers leurs propres congénères.

Sihesres fit une pause. Elle observait les feuilles virevolter entre les arbres. Puis elle reprit sur un ton plus doux :

— Vous n’êtes que des enfants. La Brume Froide choisit qui garder. Comme vous. Le reste ? Elle les expulse hors de son territoire. Leur aventure dans notre pays nourrit les témoignages de « survivants » et les hantent jusqu’à la fin de leurs jours.

Vrahas acquiesça. Nitsugua humma en réponse. Myahlaki sourit.

— Tiens, un visiteur. Le Chasseur n’est pas très loin. Pas de bourdes et restez silencieux. Nous allons l’observer dans son travail.

Les adolescents hochèrent la tête. Ils suivirent leur professeur pendant quelques minutes puis ils se postèrent non loin d’un homme. Un vagabond, un bandit des montagnes, qui s’était sûrement perdu. Une barbe mal rasé grouillait de poux. De la suie et de la boue teintaient sa peau. Un œil perdu couvert d’un bandeau semi-déchiré. Le seul valide contemplait avec nervosité son environnement. Il parlait dans un dialecte que personne ne connaissait. Il baragouinait dans un autre.

Nitsugua aperçut en premier le Chasseur. Ce dernier se tourna brièvement dans leur direction. Le regard de celui-ci s’attarda sur Myahlaki pendant quelques minutes avant de se concentrer sur le voyageur.

Vrahas se demandait à quelle sauce ce dernier allait être dévoré. Sihesres se pencha vers ses élèves et chuchota :

— Regardez, les enfants. La bête sait qu’elle est en train d’être chassée. Son énergie vitale dégouline de noirceur. Le Chasseur apprécie énormement que ses proies expérimentent la peur et la violence qu’elles-mêmes ont engendré.

Va-t-il crevé rapidement ? Songea nitsugua en focalisant ses pensées sur ses compagnons.

Il avait découvert cette capacité un mois plus tôt. Hélas, elle demandait un effort mental collossale. Avec l’aide de Sihesres, une démone avec de hautes abilitées en magie mentale, il arrivait plus ou moins à communiquer.

— Oh non, le Chasseur aime chasser, après tout, lui répondit Sihesres. La bête bouge, suivons-la.

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