Des arbres, anormalement grands, s’étiraient vers le ciel et plongeaient dans le vide. Une frondaison particulière, tantôt rouge, tantôt violette, tantôt jaune, comme si tout n’était que hasard. Les feuilles tombaient dans l’oubli, cachées dans la brume, dessinées comme des ombres. Des roches par centaine. Un effondrement. Cavité bouchée, et à l’intérieur, par le biais d’un petit orifice, des corps inertes. Des dizaines d’enfants en haillons, enchaînés, empalés, fracassés. Nitsugua recula, blême, son ventre se nouant. Un rire nerveux s’échappa de ses lèvres. Il tomba sur ses fesses dans une flaque d’eau. Ses mains se mirent à trembler. Quelque chose attira son attention. Il leva les yeux vers une masse sombre suspendue à une branche. Pas de visage. Rien de reconnaissable.

Nitsugua demeura, cependant, immobile. Il n’émit aucun son. L’étrangeté le fixa longuement, comme si elle se demandait si elle devait le dévorer ou le laisser tranquille. Elle finit par disparaître dans la brume. Nitsugua soupira de soulagement, se leva doucement et se détourna, tombant nez à nez avec Fain i rir. Celui-ci haussa un sourcil. Le jeune homme rougit, baissant immédiatement le regard.

Les arbres chuchotaient une histoire sans fin, un conte horrible, et Nitsugua voulait perdre l’audition. L’horreur, ce n’était pas pour lui. Il ne souhaitait pas connaître le sort de ces enfants. Hélas, ce choix ne lui appartenait pas. Son devoir lui demandait de rendre justice à ces malheureuses âmes. Il attrapa la main gauche de Fain i rir, le poussant dans la direction de la cavité. Ce dernier se pencha et contempla au travers de l’orifice ce qui terrorisait le garçon. Son sang se glaça. Fain i rir n’avait pas vu un pareil carnage depuis si longtemps. Un gloussement s’échappa de sa gorge.

— La Brume Froide, dit-il d’un ton glacial, hantera les auteurs de ce crime jusqu’au dernier.

Nitsugua frissonna. Quelque chose lui disait qu’une chasse de grande envergure allait débuter.