I
De nombreuses heures avaient été nécessaire pour arriver au pied du Mont Satori où l’une des entrées les plus connues de la Brume Froide se trouvait. Des heures à arpenter les routes dissimulés dans une carriole de peur qu’un bandit s’en prenne à lui. Si jamais ses parents venaient à apprendre qu’il s’était dérobé à ses devoirs d’apprentissage, ils le conduiraient sans tarder dans les mains d’Ablanh, le chef du clan. Nitsugua avait été prévenu la dernière fois après un accident qui avait failli le faire renvoyer de l’académie ; à la moindre bêtise, il n’aurait pas droit à une seconde chance.
Livide, il fixait une vieille pancarte installée non loin de l’une belle arche de pierre. Les mots inscrits hantaient son esprit. Pourtant, Nitsugua décida tout de même d’accéder au bois. Un coup d’œil à sa gauche, un autre à droite, un dernier regard en arrière, et il s’élança sans perdre de temps. Au bout de quelques mètres, il fut forcé de ralentir le pas. Il ne voyait rien, si ce n’étaient que les terrifiantes silhouettes des arbres. Leurs branches, qui n’étaient pour lui que de sombres tentacules, ballaient au rythme d’une musique inaudible. L’adolescent ajusta nerveusement les sangles de son sac à dos. Pas de retour possible en arrière.
Il regretta de n’avoir pas pris un manteau. La Brume Froide n’arborait aucune chaleur. Nitsugua ne pouvait que de se contenter d’une écharpe et d’un bonnet en laine. Il espérait n’attraper aucune fièvre qui, sans doute, mettrait son voyage en péril. Le sentier disparut rapidement dans les tessons du brouillard, le laissant batailler contre les ronces et les obstacles invisibles qui le faisaient trébucher toutes les cinq minutes. Un cri retentit. Nitsugua s’arrêta, le teint hâve. Un autre hurlement suivit. Glaçant. L’adolescent sentit son cœur s’affoler. Il se mit à courir. Il monta une pente, vacilla à plusieurs reprises, s’agrippant aux racines et enfonçant ses doigts dans la terre de peur de tomber. Puis il se stoppa, à bout de souffle, certain que le danger était passé.
Excepté, qu’en se tournant vers là où il s’était tenu, une figure immense dotée d’une drôle de moustache le toisait. Silhouette qui disparut une minute plus tard. Son sang se glaça quand elle réapparut à côté de lui. Nitsugua voulut crier mais aucun son ne sortit de sa bouche. Il tenta de fuir sans succès. Des mots trouvèrent une place dans sa tête :
« Tes pas sont un écho que nous ne pouvons guère ignorer. Ton esprit foisonne l’horreur brut. Permets-nous de te guider dans un voyage sans retour. »
Nitsugua ouvrit la bouche. L’individu à la moustache saisit sa langue, lui adressant un sourire froid avant de la lui trancher d’un geste sec.
— Merci de ton offrande, voyageur. Meilleurs vœux.
Et sur ces mots, son assaillant disparut.
Annotations
Versions