Chapitre 02.3

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Dans sa fuite, il attrapa une barre de fer qui traînait au sol, sans doute oubliée par un ouvrier.

Le Sambre ne lâcherait pas facilement.

Il devait l’éliminer, et sa meilleure défense était l’attaque.

Plus vite, il en aurait fini avec lui, plus vite il pourrait entrevoir une chance de survivre.

Il gagna une première salle de lecture et s’adossa à une étagère vide.

Le verre d’une vitrine non loin de lui montra le reflet du Sambre qui le talonnait.

Il poussa l’étagère de toutes ses forces.

Son adversaire l’évita de justesse.

Eric n’avait pas escompté qu’elle le mettrait hors d’état de nuire, mais elle le distrairait un bref instant.

Suffisamment pour lui laisser le temps de l’attaquer de front.

Il fonça sur le Sambre et tenta de lui assener un premier coup de barre de fer dans la tête.

L’extraterrestre parvint à parer le coup du bras droit.

Des os craquèrent, mais d’après la façon dont il portait son arbalète, Eric devina que cela ne le handicaperait pas beaucoup, car il devait être gaucher, ou bien ambidextre.

Le Sambre évita aussi le deuxième coup qu’il chercha à lui asséner dans les tibias.

Eric vit alors que l'un de ses tirs l’avait blessé à la cuisse et qu’il saignait abondamment. Pourtant, il ne semblait pas ressentir la douleur.

Ce qui n’était pas son cas à lui.

Il lui restait encore quelques balles… Deux ou trois, tout au plus.

L’ennemi fondit sur lui au moment où il pointait son arme dans sa direction.

Il parvint à lui tirer deux fois en pleine poitrine sans que cela arrête sa course.

Il l’évita seulement de justesse, mais pas assez.

Il tomba en arrière en se cognant sur une table.

La douleur lui vrilla le cerveau, mais il ne perdit pas conscience et se traîna aussitôt quelques mètres plus loin.

Il voulut regarder en direction du Sambre. Il ne vit que trop tard une semelle de bottes militaires lui arriver en pleine figure.

Cette créature s’était relevée avec trois balles dans le corps, constata-t-il malgré sa propre situation.

Groggy, Eric parvint à rouler sur le côté pour éviter un nouveau coup.

Sa blessure l’affaiblissait et il ne tiendrait pas longtemps à ce rythme, il le savait.

Pire, il laissait lui aussi des traînées de sang sur la moquette.

Le Sambre s’en rendit compte et eut un sourire sadique à son adresse.

Eric songea qu’il valait mieux qu’il ne sourît pas sur les photos d’identité. Sans quoi, il serait immédiatement arrêté pour être enfermé à l’asile, ou mieux, dans l’une des prisons lunaires pour psychopathes irrécupérables.

Encore estourbi, il se releva tant bien que mal.

Déséquilibré, il se cogna contre la baie vitrée qui donnait sur le jardin tropical.

Il avait remarqué, la veille, que toutes les vitres n’avaient pas encore été posées.

Il n’eut aucun mal à trouver un accès à l'espace vert non vitré.

Il y avait des cordes qui ressemblaient à des lianes, fixées sur des tyroliennes. Elles étaient destinées à l'entretien de la serre.

Dans son état, une chute du deuxième étage lui serait probablement fatale.

Néanmoins, il attrapa une de ces fausses lianes.

Il la dénoua de la rambarde où elle était attachée, s’y accrocha et se laissa porter à travers la végétation tropicale, tel un Tarzan, en beaucoup moins altier.

Il se concentra sur ses mains qui tenaient solidement la corde pour oublier la douleur insoutenable qui le traversait à chacun de ses mouvements, chacun de ses souffles.

Son adversaire fit alors une chose qu’il n’aurait jamais crue possible.

Il plongea dans le vide.

Son geste, aussi inconscient qu’il put le paraître se révéla calculé.

Il réussit à se suspendre à son tour à la liane.

Il glissa de quelques centimètres, qu’il regagna aussitôt avec une facilité déconcertante pour se retrouver juste au-dessous de sa proie.

Il n’était pourtant pas plus au summum de sa force lui non plus.

Peut-être que les blessures infligées par ses tirs commençaient à faire effet au-delà des analgésiques et autres drogues que les scientifiques du CENKT devaient l’obliger à avaler à chaque repas et lors de ses entraînements.

Pour s’assurer une meilleure prise, le Sambre essaya d’enrouler la liane autour de son torse.

Il commit alors sa seule et unique erreur.

Il ne parvint pas à extirper ses bras de la prise de la liane.

Ayant trop présumé de ses forces et de son agilité, il glissa d’une bonne quinzaine de centimètres.

La corde végétale remonta et s’enroula autour de ses épaules.

Eric comprit que le Sambre était plus handicapé par ses blessures qu’il ne le paraissait.

S’apercevant qu’il tenait là son premier véritable avantage contre son adversaire, il se laissa lourdement glisser jusqu’à lui. Ses pieds heurtèrent la tête du Sambre avec force.

Le nœud improvisé que celui-ci avait fait avec la liane remonta de ses épaules à son cou.

Eric se concentra pour enrouler la corde autour de sa cheville. Lorsqu’il parvint à la bloquer, il tira de toutes ses forces et remontant les pieds.

Le nœud se resserra d'un coup sec, avant même que son adversaire puisse réagir.

Le Sambre essaya vainement de desserrer la corde autour de son cou.

Eric se laissa glisser. Ses pieds heurtèrent la tête de l’assassin qui glissa lui aussi. Cette fois, il n’avait plus aucune chance…

Entre le mouvement de balancier de la liane et les coups de pieds que lui assénait Eric pour l’empêcher de remonter et redonner du leste à la corde, ses efforts furent vains.

Ses poumons se vidaient de leur air tandis que ses jambes battaient dans le vide.

Eric attendit encore un peu après qu’il se soit immobilisé définitivement.

Il voulait être certain que cet assassin soit bien mort.

Cette créature avait participé au massacre de ses protégés.

Eric n’avait pourtant trouvé aucune satisfaction à le tuer. Il ne l’avait fait que pour survivre.

À la différence de la plupart des autres Sentinelles, donner la mort ne faisait pas partie de ses aptitudes premières, que ce soit par nécessité ou bien par vengeance. Un autre que lui, même blessé, n’aurait sûrement pas mis autant de temps à se débarrasser du Sambre.

Eric parvint à attraper une autre liane, laissant le Sambre pitoyablement suspendu à celle qu’il venait de lâcher.

Il se laissa glisser jusqu’au sol avec précaution. Il se sentait totalement vidé de ses forces. Il ne devait pas relâcher la pression pour autant.

Son répit n’était que temporaire.

Épuisé, en nage et le corps agité par des tremblements incontrôlables, il traversa l’espace vert, et parvint à gagner une future pièce de lecture.

En d’autres conditions, il se serait sûrement étonner que des gens lisent encore à la veille du XXIIe siècle, et que l’on construise des bibliothèques.

En réalité, ce genre de chose ne pouvait pas l’étonner. Il en avait vu bien d’autres.

Un escalier le ramena au premier étage.

Il y trouva d’autres lieux de lecture, et une salle de stockage de savoirs virtuels avec de hautes fenêtres.

S’en approchant, il put voir une partie de la ville qu’en une occasion différente il aurait sans doute pris plaisir à contempler.

Il concentra surtout son attention sur les rues autour de la bibliothèque.

Il aperçut les hommes de Jameson qui convergeaient vers son refuge.

Eric s’écarta aussitôt des vitres.

Il n’allait pas leur faciliter le travail en signalant sa position.

Il réfléchit un court instant. Il ne pouvait plus songer à sortir du bâtiment.

Il rejoignit alors l’escalier et monta péniblement au deuxième étage, puis au troisième et, enfin, le quatrième.

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