C'est là que j'aimerais qu'il grandisse...

3 minutes de lecture

revient à elle, la sphère est toujours inerte. Une odeur de chaud dans l’air, tandis que des particules incandescentes convergent vers sa Marque.

C’est ici qu’Ariane et Masqué ont trouvé les Marques. Elles étaient dans cette sphère.
Bonne déduction.

Les pupilles d’Iris s’écarquillent.

Cette voix.

Elle a le même timbre que celle des chants.
La jeune Marquée enroule ses doigts autour de sa canne, et la décroche de sa ceinture. Elle avance à pas lent dans le couloir, suivant la direction d’où la voix lui est parvenue.
Elle franchit le seuil et traverse l’épave pour se retrouver à nouveau sur le sol vitrifié. Là, elle sent les vibrations sous ses pieds, remonter le long de ses veines.

Les tremblements communient avec le rythme de son cœur.

Les cristaux se mettent à s’entrechoquer, provoquant des tintements proches de bruits que feraient deux verres en se percutant.
Un souffle siffle sur les formations minérales. Jaillissent les frottements de verrillons, qui se joignent à une mélopée toujours plus entêtante.

Iris lève la tête en voyant de la lumière au-dessus d’elle.

Au milieu de la voûte terrestre, j’aperçois la pointe brisée du monolithe qui traverse la ville jusque dans cette caverne. Autour de ce morceau anthracite, des nébuleuses de braises azurées gravitent. Les cerceaux d’énergie s’entortillent et convergent jusqu’à un point surélevé du plancher de roche vitrifiée.

Elle continue d’avancer, grimpant la pente ascendante, en quête de ce point où les flux d’énergie se dirigent, communiant avec la musique.

Lorsqu’elle parvient au sommet de l’ascension, elle voit devant elle une sphère atmosphérique faite d’une fine pellicule bleue.

Iris contemple le phénomène, et voit bien que derrière, il y a une étrange stalactite de cristal liquide qui semble couler éternellement. Elle s’égoutte à l’infini, et ses gouttes s’enfoncent dans un trou au sol.

Chaque goutte qui s’écoule, renferme des couleurs et des formes qui l’intriguent. N’écoutant que sa curiosité, elle s’avance pour traverser la membrane chaleureuse et…

… ses pieds trouvent un autre sol.

De retour dans l’archipel des îles volantes, Iris se trouve cette fois devant une butte de sable rouge, dans laquelle une porte a été encastrée. Ce doit être une forme d’habitation.
Elle se sent curieusement bien, rassurée dans cet environnement. Une impression de familiarité et de sécurité enrobe son cœur.
Iris croit entendre un bruit derrière elle. Quand elle tourne sa tête, quelques-unes de ses mèches se balancent dans son champ de vision.

Ce n’est qu’un bref instant.

Mais elles sont bleues.

Ses cheveux sont bleus.

Une aspiration de terreur lui échappe.

Elle n’est pas dans son corps.
Et à côté d’elle, un homme en armure sombre, recouverte d’un épais manteau bordeaux, si long qu’il traîne au sol, s’avance vers la butte.
Un grand marteau fait du même métal anthracite que le monolithe et sa canne, est accroché dans son dos. La tête de l’arme laisse s’échapper des éclairs rouges qui crépitent dans l’air.
Elle ne peut voir son visage, caché derrière un masque sombre, pentagonal.

Et elle sent ses lèvres et sa langue s’agiter, tandis qu’une voix trop proche de la sienne résonne dans sa tête :
« C’est là que j’aimerais qu’il grandisse... »

Une terrible douleur déchire le bas-ventre de Marion.
Elle étouffe son râle en s’appuyant sur la table du conseil. Les conseillers la regardent, courbée sur elle-même, les dents serrées, en train de revivre la terrible douleur qui annonçait l’arrivée d’Iris.

Dans les profondeurs de la ville, plus de cent mètres plus bas, Iris, à genoux, se tient les entrailles, ayant l’impression de maintenir en place ses viscères prêtes à éclater.

À plusieurs kilomètres de là, à l’écart de la marche rythmée des milliers d’hommes dans la tempête, Masqué partage cette souffrance abominable.

Les trois, unis par cette douleur fantôme…

… d’un corps qui n’est pas le leur…

… Partage la même vision.

Celle d’une femme, en tout point similaire à Iris.

Les deux mains Marquées.

Les cheveux azurés.

Ses mains tendues vers le ciel.

Ses veines se déployant dans les cieux, plus elles croissent, plus elles se dilatent, plus elles s’épandent dans l’univers.

Ses yeux ouverts sur la voûte céleste, sa vue ignore les distances.

Elle peut tout voir, tout entendre, tout dire, être entendue…

… Sans être comprise.

Lorsque la douleur s’efface, Iris comme Marion sentent couler un liquide chaud le long de leurs cuisses.

C’est là que j’aimerais qu’il grandisse…

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Les Interstices ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0