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Satanas comptait les heures. Il était assis dans son lit et n’avait pas trouvé le sommeil. Il réfléchissait à ce que la Déesse Empoisonnée lui avait dit. Il avait vu défiler les heures. Les unes après les autres. Inlassablement. Inexorablement. Il lui avait même semblé un temps que plus les heures s’éloignaient de minuit plus elles mettaient de temps à s’écouler.

  Vous serez dépassés par les événements… Vous allez réveillé une force pire que ce que vous croyez connaître…

  Et s’ils s’étaient tous plantés. Tous. Pas qu’Eux. Tous. A tous les niveaux. S’ils avaient cru pouvoir maîtriser une situation, comme ils l’avaient fait des milliers de fois, et qu’au final cela leur échappait complètement.

  Une force pire que ce que vous croyez connaître…

  De quelle force pouvait-elle bien parler ? Et ces images ? Terribles. Pires que tout ce qu’elle avait pu lui montrer jusque là. Certes la Déesse était une manipulatrice, il le savait, et il savait aussi qu’il fallait tout prendre avec des pincettes. Mais il connaissait suffisamment la créature pour savoir que là elle ne plaisantait pas voire qu’elle était terrorisée.

  C’était du délire. Toute la situation avait été planifiée, étudiée, répétée, testée dans les moindres détails. Il était allé voir la Déesse trois ou quatre fois au fur et à mesure des évolutions de tests. Chaque fois les mêmes images, aucune variante. Donc aucun risque d’être passé à côté de quelque chose.

  Il ne savait pas ce qui l’inquiétait le plus. Qu’ils se soient tous fourvoyés, ou que même les créatures qu’ils avaient mis en cage puissent être effrayées de la tournure des événements. On aurait dit que la Déesse voulait intervenir, les aider à corriger le tir. Comme si elle avait sentit que s’ils n’intervenaient pas ils risquaient la destruction de leurs deux univers. Bof ! En 1350 les démons avaient lâché la Peste Noire pour éradiquer l’humanité et tout le monde s’en était sorti… Oui mais c’était eux qui l’avaient décidé, ils avaient maîtrisé la cause. Là… Tout leur échappait. Dans un camp comme dans l’autre.

  Est-ce qu’en agissant de la sorte, en laissant aller leur plan jusqu’au bout, ils pourraient… Ils… Réveilleraient… Non ! C’était impossible. De toute façon la clef n’avait pas été retrouvée ni assemblée. Cela faisait des millénaires qu’elle avait été perdue et nullement retrouvée. Même avec les moyens modernes. Oui mais une clef est prévue pour une serrure, et lorsqu’on a perdu la clef, une serrure ça se casse…


  Il était depuis suffisamment longtemps dans l’organisation et il avait atteint un sommet suffisamment haut pour comprendre et connaître un certain nombre de règles qui régissent les univers. Entre autre celui de l’Equilibre. Celui des vases communiquant en quelque sorte. Il appelait cela le « donnant-donnant ». Tout était lié, nous étions tous liés, entre nous, entre les univers. Les physiciens de l’organisation parlaient de quantum, d’univers quantique en partant du principe de la coexistence de plusieurs possibilités en même temps jusqu’à ce que nous en déterminions une à un instant T… Mais c’était plus que cela. Chaque univers avait son propre temps, son propre déterminisme et sa propre évolution. Indépendante de toutes les autres et interdépendante des autres : tout ce qui ne se réalisait pas dans une réalité se réalisait par conséquent dans un autre, et un autre sous une autre forme, et un autre, et un autre...Chaque situation ayant deux possibilités donnait naissance à autant de réalités alternatives qui poursuivaient par la suite leur petit bonhomme de chemin, chacune donnant naissance à de nouvelles réalités… Stan Lee avait tout compris.

  Le revers de cette logique c’était que toute modification d’un quelconque équilibre Bien et Mal dans une réalité pouvait provoquer une brèche entre les dimensions et permettre à une,ou plusieurs, d’entre elles de s’infiltrer même momentanément dans sa consœur. La chûte de Babylone avait eu lieu comme ça. Un abandon d’un culte ayant laissé la place à un autre, avait provoqué un déséquilibre démonique et fragiliser notre sphère du réel. Une intrusion de démons s’ensuivit et un pacte fut conclu avec Cyrus : les démons lui offraient Babylone, en échange il faisait en sorte que la brèche reste ouverte indéfiniment. Effectivement Cyrus n’a pas combattu, Babylone est « tombée sans combattre », mais Hérodote avait aussi raison, des batailles terribles eurent lieu contre les démons-mêmes.

  L’organisation veillait à cet équilibre et la moindre goutte d’eau était pesée. Mais quelque chose pouvait leur échapper. A trop regarder dans le détail on ne voit pas tout dans son ensemble. A surveiller assidûment les entrées, on en oublie les murs. Et une forteresse peut être prise par les murs.


  Il avait besoin de réfléchir. Il s’assit au bord du lit et regarda la pendule de sa table de nuit. Officiellement il lui restait trois heures de sommeil. S’il parvenait à se rendormir, à six heures, il devrait se lever. Il regarda Karen allongée à côté de lui. Elle respirait calmement, sans se douter des tempêtes qui envahissaient l’esprit de son mari. Il lui caressa ses longs cheveux bruns, comme s’il la découvrait pour la première fois, coupa la sonnerie programmée de son réveil, puis se leva et descendit à la salle de sport aménagée au sous-sol. Pour se vider la tête et avoir l’esprit plus clair, il avait besoin de taper sur un sac de sable.


******


  Il était un peu après neuf heures quand la sonnette retentit à la porte d’entrée. Sarah éteignit la télévision, puis ronchonna quelques instants, il n’était pas concevable que l’unique jour de repos qu’elle prenait depuis trois semaines soit interrompu en plein petit déjeuner par un importun. Elle allait clairement lui faire comprendre qu’il dérangeait.

  Elle ouvrit la porte et se trouva nez-à-nez avec une femme de son âge, même si Sarah ne put s’empêcher de penser qu’elle-même faisait plus jeune que l’inconnue, en tailleur bleu sombre, lunettes de soleil et queue de cheval serrée. Elle tenait à la main un attaché-case et semblait nerveuse.

  - Je vais vous mettre à l’aise tout de suite, je ne suis pas intéressée. Voyez-vous, je suis en plein petit déjeuner, je regarde les infos, et c’est mon unique jour de congé depuis trois semaines, je retourne au boulot demain et je compte bien profiter de cette journée. Alors, merci, c’est gentil d’avoir pensé à moi, mais non je ne prendrais pas votre assurance-vie ou n’importe quoi d’autre que peut contenir votre mallette.

  - Madame Bernstein ? Permettez-moi de me présenter : Amy Clarks, dit-elle en lui tendant la main. Services sociaux. Et je crois que vous allez tout de même regarder ce que contient ma mallette.


  Les deux femmes étaient à présent dans la cuisine. Madame Clarks avait gentiment mais sûrement forcé le passage à une Sarah abasourdie et dans un état second.

  Elle avait les yeux plongés dans sa tasse, tournant sa cuillère presque machinalement. En face, madame Clarks ne la quittait pas des yeux. Elle avait accepté un café, noir, sans sucre. Et depuis plus un mot. Les deux femmes n’avaient pas échangé, ne serait-ce qu’un soupir. Sarah était replongée dans les souvenirs des derniers événements, depuis le coup de fil de cette même femme il y avait quelques semaines jusqu’à cet instant, en passant par l’après-midi éprouvant avec les filles. Il ne s’était rien passé depuis et elle avait fini par croire à une mauvaise blague. Et la voici qui arrivait un matin, en plein petit déjeuner. Ca ne se faisait pas voyons. On ne faisait pas des choses comme ça aux gens. On appelait, on prévenait que l’on allait passer, on laissait du temps aux gens pour s’enfuir sans laisser de trace, on ne venait pas en pleine brioche au beurre salé…

  - Que va-t-il se passer maintenant ? Sa voix était blanche et elle dû se racler la gorge pour garder une prestance.

  - Tout d’abord, laissez-moi vous dire que je comprends ce que vous éprouvez et sachez que…

  - Quoi ? Que vous compatissez ? Que vous savez ce que c’est ? Que c’est un mauvais moment à passer mais ça ira mieux plus tard ? Que vous faites votre métier et que vous n’y êtes pour rien, que c’est une décision de justice et que dans un mois toute la lumière sera faite ? Dîtes-moi ce que je dois savoir ! Toute la réponse avait été faite d’un souffle, sans hurlement, juste avec une sécheresse dans la voix qui fit froid dans le dos à son interlocutrice.

  - Non. Sachez que j’imagine combien cela peut vous paraître difficile à accepter mais j’ai été mandatée par l’hôpital qui vous a contactée il y a un mois environ. J’ai dans ma mallette tous les documents biologiques attestant que vous ne pouvez pas être la mère de Rachel. J’ai aussi avec moi un document que je vous demanderai de signer et qui vous fait renoncer à votre droit de mère et vous engage à ne pas faire de poursuites pénales pour récupérer votre… Pardon… La jeune fille. Si vous tentiez de lancer une procédure judiciaire, elle serait automatiquement caduque du fait de ce document. Bien sûr, vous êtes libre de vous opposer à cette signature, et d’intenter un procès par la suite. Mais en tous les cas, à l’heure actuelle, je dois repartir avec Rachel. Je n’ai pas le droit de vous la laisser.

  Clarks avait discouru d’une traite, comme si elle rabâchait machinalement un texte cent fois énoncé. C’est ce qui agaça le plus Sarah : l’absence totale d’empathie, malgré le contenu de son discours. Elle se dit que la femme n’était là que pour faire son travail, qu’elle n’y était pour rien, et puis elle se dit que son travail était aussi d’entendre les gens lui dire d’aller se faire foutre et elle se dit qu’elle allait en profiter.

  - Ca vous arrache un bras de montrer un peu de compassion ou c’était en option sur votre modèle ? Vous ne toucherez pas à Rachel. J’ai bien compris que je n’étais pas sa mère biologique – elle avait articulé le mot comme si elle s’était adressée à une enfant de quatre ans – mais je suis sa mère malgré tout. Alors je suis désolée que votre vie soit triste et sans enfant, ou que votre mari ne vous satisfasse pas autant que vous l’auriez souhaité, ou que vous n’assumiez pas votre homosexualité, ou que vous soyez vieille fille… Oui je pense que c’est plus cela le problème, si vous aviez eu une quelconque vie de couple vous comprendriez… Toujours est-il que je n’en ai rien à faire. Si vous touchez à un cheveu de Rachel il vous faudra une canne blanche pour marcher.

  - Madame Bernstein voyons, ne rendez pas la situation plus difficile qu’…

  - C’est MA fille. Je l’ai élevée, je l’ai soignée, je ne dors pas quand elle a des soucis, je pense à elle tout le temps, je veux la voir grandir et devenir une femme, c’est MA fille ! Et toutes vos analyses ne changeront rien ! Sarah commençait à s’emporter.

  - Madame Bernstein allons. Ne croyez pas que je fais cela de gaieté de cœur, mais il y a une procédure judiciaire engagée, c’est la loi. Et si Rachel ne vient pas avec moi maintenant, elle repartira avec la police plus tard. Si vous la laissez repartir avec moi tout sera fait dans le calme et nous prendrons soin d’elle. Si c’est la police qui l’emmène, ils ne s’embarrasseront pas de sa santé. Elle finira en maison de redressement avec d’autres jeunes, vraiment délinquants, et qui sait ce qu’il peut lui arriver…

  - Seriez-vous en train de me menacer ? Je suis juive madame Clarks, alors les coups de pression à la culpabilité c’est moi qui les mets ! Je suis immunisée contre tout ça, laissez tomber ce petit jeu avec moi ! Evidemment que je ne signerai pas votre papier. Et évidemment que je vais intenter un procès pour faire reconnaître mon rôle de mère, pour qui me prenez-vous ? Vous pensiez venir comme ça chez moi, et parce que je vous ai eue une fois au téléphone, la situation allait se résoudre en deux minutes ? Non mais que croyez-vous ? Que croyez-vous qu’il se soit passé depuis votre appel ? Que j’avais bien docilement préparé ma fille ? Au fait Rachel, tu feras ta valise parce que tu n’es plus ma fille à partir de demain et qu’une morue viendra te chercher la semaine prochaine, tu peux me passer le sel ?

  - Madame Bernstein, nous ne sommes pas obligées de nous insulter !

  - Vous l’avez pris pour vous ? C’est parce que vous culpabilisez ? Je n’ai rien dit, si vous vous considérez comme une morue c’est vous que ça regarde.

  - Madame Bernstein ! Je reste polie pour le moment ! Reprenons calmement la conversation…

  Les deux femmes se regardèrent un instant froidement dans les yeux. La tension électrisait l’air. Sarah avait les jointures blanches sur sa tasse. Et celle-ci se brisa violemment ! Sarah regarda ses mains, elles étaient légèrement coupées par les éclats. Alors, elle aussi éclata… En sanglots. Madame Clarks se leva, alla chercher de quoi nettoyer les plaies et tout en la soignant délicatement, dit d’une voix douce :

  - Ca va mieux maintenant ? Vous avez évacué tout ce que vous vouliez ? Alors reprenons calmement…


******


  Dans le sac de sport qui trônait sur son lit, toutes ses armes étaient en vrac. Il les avaient jetées sans vraiment faire attention au point que l’une d’elles puisse lui tirer dessus à cause d’une mauvaise sécurité, mais ce risque ne l’avait même pas effleuré. Sur son bureau des restes de lignes de « neige » près de la carte bancaire.

  Il était dans un état second, c’était le grand jour. Il était surpuissant, son coeur avait accéléré son rythme, rien ni personne ne pouvait plus se dresser devant lui. C’était le grand jour, il allait faire la morale à tout le monde comme tout le monde lui avait fait la morale. Il allait gentiment leur expliquer ce qui était bien, et ce qui était mal. Mais s’ils ne comprenaient pas… Il devrait les punir…

  Dans un bref éclair de lucidité, il regarda les armes entassées avec dégoût et ce demanda comment il avait pu en arriver là. Il n’était pas comme ça avant. Avant quand ? Il ne se rappelait plus. Mais jamais il n’aurait pu imaginer qu’un jour il en arriverait là, à se trimbaler avec l’armurerie de Matrix et se doper à tout ce qu’il trouvait. Jamais avant il n’aurait pu faire… Alors pourquoi en être arrivé là, comment en être arrivé là ? Qu’avait-il bien pu merdé pour finir comme ça ? Il secoua la tête violemment. Rien ! Il n’avait rien fait, lui, pour en être là ! Ce n’était pas sa faute!C’était eux les responsables, eux, tous les autres ! C’était uniquement de leur faute s’il avait changé, les gars de la rue, du lycée, ses parents, son enfoiré de père qui s’était barré, sa connasse de mère… Tous les autres ! Il avait fallu qu’il se fasse tout seul dans ce monde, il avait fallu qu’il apprenne à se débrouiller tout seul pour survivre ! Qu’ils aillent tous se faire enculer ! Et aujourd’hui il allait leur faire passer le message !

  Il était huit heures. Dans dix minutes il serait dans le bus qui le déposerait vers quarante-cinq au lycée. Il décida qu’il ne prendrait que son sac de sport. Il savait très bien qu’il allait devoir supporter les moqueries de tous les abrutis du bus, comme tous les matins, mais aujourd’hui ce serait différent, il n’y prêterait pas attention parce qu’il savait ce qui les attendrait une fois descendu.

  Le bus arriva avec cinq minutes de retard comme d’habitude, les portes s’ouvrirent et il saisit son sac. Il commença à gravir les marches du bus lorsque le conducteur dit en riant :

  - Alors Jimmy ! C’est pas trop lourd ça ? T’as décidé d’te mettre au sport ? C’est pas dommage ! Fait gaffe quand même à pas t’péter un ongle ! Pas vrai les gars ?

  - Sûr Charly ! Répondirent, à la blague du chauffeur, les quelques gars qui étaient dans le bus.

  L’un d’eux se dirigea vers lui tandis qu’il essayait de s’asseoir avec son sac à ses pieds.

  - Alors la tarlouze ? On a décidé de prendre l’air et de faire du sport ? C’est pas un peu dangereux pour toi tout ça ? Tu devrais pas plutôt jouer avec ta manette ?

  - Vas te faire foutre Ryan !

  - Quoi ? Qu’est-ce que t’as dit p’tit con ? Tu veux que je te montre ce que c’est un vrai mec ? C’est ça que tu veux ?

  - Ca m’étonnerait… J’ai un plus gros calibre que toi tu vois…

  - Quoi ? Espèce de pédale ! J’vais t’apprendre moi à…

  Jimmy releva discrètement son T-Shirt et laissa apparaître la crosse du Beretta. Il posa sa main dessus et commença à sortir son arme.

  - Alors Ryan ? Tu vois, je t’ai dit que j’avais un plus gros calibre que toi… Je n’ai pas menti…

  Jimmy se leva. Ledit Ryan tomba sur ses fesses en essayant de reculer.

  - Jimmy fais pas le con ! On disait ça pour déconner et c’était même pas drôle… Jimmy s’te plaît déconne pas !

  - Quoi ? C’est pas marrant ça ? Et vous autres, fit-il en pointant le canon vers le reste du groupe, vous ne rigolez pas non plus ? Pas une petite blagounette à sortir à cette tafiole de Jimmy ? Bande de connards !

  - Jimmy qu’est-ce que tu fais ?

  Le conducteur avait suivi la scène dans son rétroviseur et comme ils arrivaient à un feu rouge, il en profita pour se retourner. Il n’en crut pas ses yeux.

  - Jimmy, pose cette arme. Ecoute on a conscience qu’on t’a fait du mal et on n’a vraiment pas été sympa avec toi, mais…

  - Mais quoi le négro ? Occupe-toi de ton bus et ferme ta gueule ! Mais quoi ? Hein ? « Mais s’il te plaît nous tues pas », dit-il en prenant une voix larmoyante. C’est ça ce que tu voulais dire ? Et pourquoi pas ? Débarrasser la terre de connards de leur espèce c’est pas un acte civique ça ?

  Jimmy s’était tourné vers le chauffeur et gesticulait dans tous les sens avec son arme. Pendant ce temps, en cherchant à se faire le plus discret possible, le dénommé Ryan tentait de se redresser et rejoindre son groupe. Jimmy se retourna aussitôt.

  - Qu’est-ce que tu fais toi ? Je t’ai donné l’autorisation de bouger ?

  - N… Non…

  - Non qui ? Non mon maître… A toi…

  - Non mon maître.

  - C’est bien. Alors comme tu as eu le courage de venir me voir pour m’insulter, je vais te témoigner du respect. C’est par toi que je vais commencer à exploser les têtes. Tu te rends compte de ta chance ? Toi je vais te fignoler, pas comme les grouillots du reste de ta bande, qui vont juste se prendre une bastos vite fait, non, toi, tu vas en profiter. Je vais d’abord te savater la tronche jusqu’à ce que tu n’aies plus de dents, puis je t’exploserai les membres un par un et puis je t’éclaterai la tête. Tu vois ? Un vrai traitement VIP ! Et il partit d’un rire dément.

  - S’il te plaît Jimmy… Euh maître ! Se reprit-il quand il sentit le canon contre son front. S’il te plaît fais pas ça… On a compris. Hein les gars ?

  - Ouais ouais sûr…

  - Okay… Je veux bien vous laisser une chance… Vous allez répéter après moi : « on est les plus grosses tantouzes du pays ! »

  - On est les plus grosses tantouzes du pays. Dirent-ils tous d’une même voix.

  - Maintenant vous allez tous vous embrasser sur la bouche… Voilà… Non non, avec la langue… Voilà… C’est bien. Eh le nègre ! Arrête-toi là, c’est mon arrêt.

  Charly ne se le fit pas dire deux fois. Le bus stoppa net et Jimmy descendit avec son sac. Il avait encore trois kilomètres à marcher, mais c’était le bon lieu pour descendre. Avant de poser un pied au sol, il se retourna et dit :

  - Tu vois Ryan ? Là c’est marrant : tu viens de te pisser dessus…

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