Chapitre 15 - Fin des vacances d’automne (6)

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Vendredi 9 octobre 1964, maison de Frédéric, Lausanne

Les deux Américains se déshabillèrent, Frédéric leur dit de se coucher sur le lit pour prendre les photos.

— Des deux bites ? s’étonna Jason, pas seulement celle de Kenneth qui a la cicatrice ?

— Oui, mon ami aime bien comparer.

— Que vont-ils penser au labo qui les développera ?

— Je connais un photographe qui le fait très discrètement.

Frédéric omit de préciser que Séverin garderait probablement des tirages pour sa collection personnelle.

Les lits jumeaux étaient larges, Daniel se plaça entre les deux frères afin de s’assurer que leur érection fût suffisante en les caressant. Frédéric fit plusieurs clichés à différentes distances, il espérait que le résultat ne serait pas flou ou mal exposé car il ne connaissait pas bien l’appareil. Il le posa ensuite sur une commode et se coucha aussi, en se serrant contre Kenneth pour avoir encore un peu de place.

Chacun se masturba ensuite seul, selon sa méthode préférée, avec ou sans prépuce, avec ou sans lubrifiant, à son rythme ; c’était seulement pour se détendre. Pour une fois, ils n’avaient rien à prouver : ni à jouir en même temps, ni à tenir le plus longtemps possible. On entendait juste quelques halètements ou gémissements et le contact des mains sur les glands lubrifiés.

Ils éjaculèrent les uns après les autres sur leur ventre et attendirent que tous eussent terminé avant d’enlever les traces de leur plaisir avec les mouchoirs. Ils restèrent silencieux pendant quelques minutes.

— On va remonter et vous laisser dormir, dit Frédéric.

— Rien ne presse, dit Kenneth, à moins que vous désiriez baiser ensemble.

— Daniel sera encore là demain soir.

— C’est bien ce qu’il me semblait, vous avez des relations sexuelles entre cousins.

— Ça te choque ? demanda Daniel.

— Je n’ai pas à vous juger.

— Nous le faisons bien les deux, dit Jason, entre frères.

— C’est la première fois, fit Kenneth, et juste une branlette…

— Ce n’est que la seconde nuit de votre voyage en Europe, dit Daniel en souriant.

Kenneth s’étira et remonta un peu sa tête sur le coussin.

— On est bien chez vous, dit-il, c’est rare d’être avec des personnes qui nous comprennent et qui parlent de cul sans pudibonderie, préjugés ou tabous.

— Pas comme votre mère… fit Frédéric.

— Comment se sont passés vos coming outs ?

— Mon père est gay, tel père, tel fils.

Frédéric expliqua que cela ne dérangeait pas sa mère ; Daniel que ses parents n’avaient pas été enthousiastes au départ, mais qu’ils s’étaient habitués à Dominique. Sa mère regrettait cependant l’impossibilité d’avoir des petits-enfants, Daniel ne parla pas des amies rencontrées au Tessin. Jason dit :

— Notre mère suit toujours les conseils qu’elle trouve un peu partout : dans les magazines féminins, à la télévision, chez ses amies, à l’église. Il faut toujours être propre avec elle : propreté corporelle, se laver la bite aussi souvent que les dents ; mais aussi propreté morale, ne surtout pas l’utiliser pour autre chose que pisser.

— Une mère castratrice ? demanda Daniel, cela favoriserait l’homosexualité des fils…

— Je ne suis pas psychiatre, dit Kenneth, je ne sais pas, elle pense que c’est pour notre bien. Elle change souvent d’avis, il suffit que de nouvelles idées soient à la mode.

— Vous devrez bien lui dire un jour, dit Frédéric, que tu es gay et que ton frère a une amie.

— Oui, mais à quel moment ?

— Ce ne sera jamais le bon moment.

— Et si vous lui disiez que vous êtes gays ? suggéra Kenneth, elle verra que vous êtes des gars comme les autres et pas des folles efféminées. Ce serait un premier pas.

— Bonne idée, ajouta Jason, notre mère n’a jamais côtoyé des gays, elle se base sur des commérages.

— Tu imagines, dit Daniel en riant, qu’elle nous voie sortir à poil de votre chambre…

— Et pourquoi pas ? fit Frédéric, cela ferait un intéressant sujet de conversation au petit déjeuner demain matin. On essaie ?

— Vous oseriez être nus devant ma mère ? s’inquiéta Jason.

— J’ai l’habitude, et, pour vous rassurer, j’ai déjà assisté à deux coming outs chez des parents qui se sont très bien déroulés: celui de mon ami Koen et celui de l’apprenti cuisinier de l’école. Si vous êtes d’accord, je vais encore demander l’avis de mon père pour ne pas faire de faux pas.

Les deux frères réfléchirent longuement, puis acceptèrent la proposition.

Frédéric profita du téléphone pour appeler son père en bas et lui expliquer ce qu’ils comptaient faire, celui-ci trouva que son fils était un bon stratège et donna son accord. Il avait aussi eu une conversation avec son collègue qui lui laissait à penser qu’il soutiendrait ses fils.

Lorsque les parents remontèrent pour se coucher, les cousins sortirent de la chambre, Frédéric avait laissé l’appareil à photos, Daniel tenait à la main les préservatifs et le lubrifiant.

— Oh, je suis désolé, mentit Frédéric, nous ne savions pas que vous étiez dans le couloir.

Il se garda de mettre sa main devant son sexe. Betty s’y intéressa.

— Vous n’êtes pas circoncis ?

— Non, c’est inhabituel en Suisse de circoncire les garçons.

— Ce n’est pas sale ?

— On peut rétracter le prépuce pour se laver.

Il ne fit pas de démonstration.

— Mes fils le sont, dit la mère, et Bob aussi, n’est-ce pas Bob ?

— Bien sûr, c’est l’habitude chez nous.

— Vous devez avoir vu par vous-même.

— C’est exact, fit Frédéric, dans l’étang.

— Je suis confuse… Pourriez-vous me montrer ? Je n’ai jamais vu d’hommes pas circoncis dans ma vie.

Frédéric fit un clin d’œil à sa mère et décalotta son gland. Betty le remercia puis s’adressa ensuite à Daniel :

— Je vois que vous avez des préservatifs, votre amie est-elle arrivée ?

— Non, elle travaille.

— C’est plus prudent d’en utiliser lorsqu’on n’est pas marié, n’est-ce pas Bob ?

— Oui, j’en utilisais toujours avant notre mariage.

— Mais… tu m’as déflorée la nuit de noces.

— Je ne t’ai jamais dit que j’étais vierge.

— Oui, je sais. Je conseillerais à mes fils d’en utiliser s’ils avaient une petite amie. Je vous ennuie avec mes bavardages, je vais vous laisser. Je pense que mes chéris dorment déjà, je ne vais pas contrôler, ça pourrait les réveiller.

La mère se tourna ensuite vers Anne :

— Ils sont dans quelle chambre ?

— Ici, derrière nous.

Elle n’ajouta pas que c’était la chambre d’où étaient sortis son fils et son neveu.

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