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                La cérémonie d’ouverture des festivités commença au moment où Andreìs finissait d’enfiler son armure aux côtés de ses amis.

                 — Je préférerais quand même être à ta place, Gor.

                L’intéressé rangeait son épée dans son fourreau en souriant.

— Nous en avons déjà parlé. Si nous arrivons en masse, Armist s’attendra à te voir à la tête de l’armée. Et si tu n’y es pas, il te cherchera alors dans le palais parce qu’il se doutera que tu auras tenté un coup fourré.

                Andreìs soupira.

— Je sais… Mais quand même…

                Gregor haussa un sourcil étonné.

— Tu vas t’inquiéter pour moi ?

— Bien sûr…

                Gregor vint poser son énorme main sur l’épaule de son ami.

— Andreìs… Maître Da Yo est là à assurer une connexion constante entre nous tous, Edwin va gérer le siège en coordonnant toutes les unités tout en rapatriant le champ stasé, Archi va survoler tout le palais pour nous offrir une vue aérienne et Fury sera à tes côtés. Mon absence passera inaperçue, mais pas la tienne. Et toi, tu seras entouré de l’Armée Mondiale, ce qui n’est pas arrivé depuis que nous avons vaincu les Arkols, alors tu ne te rendras pas compte non plus de mon absence.

                Andreìs planta son regard dans celui de son ami avant de lui demander.

— Et s’il t’arrivait quelque chose ?

                Gregor ne put s’empêcher de rire.

— Tu veux qu’il m’arrive quoi ? Armist ne m’effraie pas. Et je suis un bien meilleur bretteur que lui.

— Était. Tu as passé des siècles en Grand Sommeil, et nous savons tous les deux que nos aptitudes s’émoussent pendant ce temps-là. De son côté, je doute qu’Armist se soit tourné les pouces tous les jours. Alors combien même aucun de ses hommes ne se serait donné à fond face à lui, il se sera un minimum entretenu…

                Gregor afficha un sourire triste tout en haussant les épaules.

— Et bien, si je dois mourir, c’est que tel était mon destin. Le plus important, c’est que tu vives pour ramener la Famille Royale parmi nous, c’est compris mon ami ? Alors quoi qu’il arrive, ne sois pas triste pour moi. Ni en colère contre Armist. D’accord ?

                Andreìs acquiesça lentement en silence, et Gregor lui tapa l’épaule.

— L’affaire est entendue. Allez, viens-là.

                Les deux hommes s’étreignirent comme s’ils savaient qu’ils ne se reverraient plus jamais avant de se séparer et Gregor reprit.

— Nos hommes attendent un discours de ta part. Va. Sois le leader qu’ils attendent.

                Andreìs, détestant cet exercice, grogna.

— Je vais essayer d’être moi-même surtout… Au revoir mon frère.

— Adieu.

                Et les deux hommes se tournèrent le dos pour partir chacun de leur côté, l’un infiltrer le Palais Royal, l’autre motiver ses troupes avant l’assaut frontal. Une fois arrivé devant les militaires agencées avec minutie, Andreìs prit conscience de l’ampleur des évènements qui allaient suivre. Face à lui se tenaient des millions d’hommes et de femmes de toutes les nations de ce monde qui allaient conjointement combattre pour restaurer une époque de plénitude pour tous au risque de ne jamais voir ce jour arriver, non pas parce qu’ils auraient échoué, mais parce qu’ils seraient pendant les combats.

                S’approchant d’un poste de transmission, Andreìs se saisit du combiner et se brancha sur la fréquence collective avant de prendre la parole.

— Soldats, hommes et femmes de toutes nations… Mes frères et sœurs… Je ne suis pas un homme de discours, j’ai toujours préféré l’action aux belles paroles, alors je vous demanderais un peu d’indulgence…

                Tandis que tous tournaient la tête vers la table de commandement, aussi éloignée qu’elle puisse être d’eux, Andreìs mesurait chaque mot qu’il allait employer.

— Aujourd’hui est un grand jour… Un jour important, capital, même… Aujourd’hui, le monde se soulève contre une imposture et une trahison, aujourd’hui les armées des peuples se sont rassemblées pour renverser un gouvernement fantoche et tyrannique, et pour abattre un despote régicide et remettre notre bien aimée Famille Royale sur le trône dont elle a injustement été destituée. Mais pour moi, ce jour a plus de poids encore… Grâce vous, avec vous devrais-je dire, je vais tenir mes promesses et réparer mes erreurs. Je vais arrêter celui qui se fait appeler Saint de Jade et le livrer à la justice, et je vais rendre à notre bon roi un monde en paix. Ces promesses faites il y a sept cent cinquante ans… Jour pour jour… C’est parce que vous êtes à mes côtés que je vais pouvoir les honorer. Et pour ça, je vous serais à jamais redevable…

                Des larmes perlaient aux coins de ses yeux tandis qu’il se remémorait la trahison de son frère.

— Nous allons tous risquer nos vies aujourd’hui. Et à ceux qui partiraient aux Champs Élysées avant moi, ou si je devais vous quitter définitivement avant la fin de la bataille, je voulais vous dire à tous… Merci, et adieu…

                Délicatement, Andreìs sortit ensuite sa hache de son fourreau et en activa le moteur.

— Car aujourd’hui, nous allons tout à la fois déchaîner et déjouer l’enfer !

                Hurlant sa dernière phrase, il brandit haut son arme dont le moteur était lancé à plein régime, vite imité de tous les Géno-modifiés puis des militaires présents.

                Quand le calme revint enfin, Edwin s’approcha de son Capitaine et ami.

— Andreìs, es-tu réellement prêt ?

— Oui, je le suis.

— As-tu une requête à exprimer ?

                Son regard planté dans celui de son homologue, Andreìs plia le genou, puis baissa humblement la tête.

— Octroie-moi les derniers sacrements…

                Edwin soupira de tristesse avant de poser son imposant gantelet sur la tête de son ami tandis que toutes les forces armées contemplaient ce spectacle inattendu.

— Mon Roi, entendez la requête de cet homme. Offrez-lui le Repos mérité après une vie de combats. Offrez-lui le Réconfort de l’âme pour compensation de cette existence pluricentenaire à vous servir. Qu’importe si son Arme, sa Volonté ou son Bras ont failli pendant le Combat, ne lui en tenez pas rigueur et accueillez-le parmi les Justes, car Juste était Son Combat et Vaillant était Son Cœur. Qu’il en soit ainsi.

— Qu’il en soit ainsi.

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