05 - Nouvelle formation

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  Une bourrasque de vent tiède souffla sur les marais de Gensou, portant l’odeur de la végétation fleurissante aux shinobis face à face. Kana souriait à nouveau, grisée par l’affrontement à venir. Sarouh campait son attitude blasée originelle, cependant dépourvue de mépris. La jeune femme s’élança, bien décidée à toucher son opposant.

  Ce fut bref, après une frappe d’estoc trop incisive, Sarouh frappa du plat d’Aura dans le haut du dos de la kunoichi, la poussant sans violence en avant.

  • Tu es morte, constata-t-il froidement.

  L’enthousiasme de Kana n’en fut pas entaché. Ils se remirent en position. Cela faisait une trentaine de minutes qu’ils enchainaient les simulations de combat. En dépit du violent coup qu’il avait reçu la veille, le Tsumyo suivait sans mal son rythme. Pire que ça, il semblait même en économie. L’aspirante se jeta à nouveau vers lui, le kunaï ne rencontrant que le vide.

  Sarouh voyait ses frappes se faire plus précises alors qu’elle s’adaptait à lui. Elle anticipait toujours un peu mieux ses prochains mouvements. Tout n’était pas à jeter chez elle. Il évita un coup circulaire vers sa gorge en se balançant en arrière et utilisa ses jambes pour saisir le bras trop avancé de Kana. Il finit son mouvement en l’enserrant, projetant la Genin au sol dans un soleil.

  • On arrête là, dit-il alors que la jeune femme se relevait péniblement, couverte de terre. Tu auras besoin d’énergie pour le voyage.
  • Mais…
  • J’ai déjà cerné tes principaux problèmes, coupa net Sarouh. Inutile de te forcer, même si l’effort est admirable.

  Kana le regarda avec froideur, cherchant apparemment l’ironie dans ses propos. Il n’en était rien. Le Tsumyo ne débitait que des faits. La jeune femme semblait encore un peu surprise de son revirement d’attitude et le Genin aux cheveux bleus pouvait la comprendre. Il commença à énoncer ses défauts de posture en combat, se rappelant ce qui lui avait été douloureusement appris quand il sortait lui-même de l’Académie.

  • Et surtout, tes intentions d’attaque sont trop claires, conclut-il. Quand tu penses me coincer, tu te jettes trop en avant. Modère tes ardeurs. Dans un duel équilibré, c’est le meilleur menteur qui gagne.
  • Je ne doute pas que tu dois être bon, répondit la jeune femme d’un ton acéré.

  A sa grande surprise, Sarouh fut peiné d’entendre ça. Il tenta de le dissimuler derrière un sourire ironique. Si seulement c’était vrai.

  • En tout cas merci Tsumyo, fit la kunoichi essoufflée, remettant une mèche blonde en place, tu n’étais pas obligé d’accepter de m’aider.
  • C’est gagnant-gagnant, répondit l’adolescent.
  • Tu pouvais juste accepter ma gratitude, tu sais.

  Kana grogna en s’époussetant, alors que le jeune homme ignorait sa remarque d’un haussement d’épaules. La dernière chute avait fait mal.

  • Hiwari devrait bientôt arriver, continua-t-elle, s’asseyant laborieusement sur la même souche qui avait accueilli sa sensei la veille.
  • Hiwari ? releva Sarouh.
  • Sérieusement ? Tu n’as même pas écouté nos noms hier ?

  Le cœur de l’adolescente balançait entre énervement manifeste et amusement, alors que le Tsumyo détournait le regard. Il n’avait strictement rien entendu de leurs présentations, tout occupé qu’il était à les analyser du regard.

  • Kana Akimishi. Enchantée !

  Elle ponctua sa tirade en lui tendant la main, un adorable sourire aux lèvres. Sarouh la saisit, contaminé par sa bonne humeur. Il ne lui fit pas l’insulte de répéter son nom et se contenta d’un signe de tête. La jeune femme sembla satisfaite. Elle joua avec une de ses mèches blondes, alors que le shinobi aux cheveux bleus la scrutait sans ménagement.

  • Pardonne moi si tu l’as précisé hier, mais je n’ai pas souvenir que tu m’aies donné ton affinité. Cela pourrait nous être utile.

  Un air peiné se dessina immédiatement sur le visage de l’adolescente. Le Tsumyo su alors qu’il avait fait une erreur.

  • Je n’en ai pas, souffla Kana. Les affinités sont de plus en plus rares, surtout dans les familles qui ne sont pas issues de clan prestigieux.
  • Et la plupart de ceux-ci ont subi les guerres de plein fouet.
  • Exactement.
  • Tu es consciente que ça ne te limite pas en tant que shinobi ?

  Un regard plein de tristesse lui apporta la réponse. Si elle était radieuse, instinctive et possédait quelques qualités au corps-à-corps, sa confiance en elle s’était envolée avec ce test. Sarouh pesta intérieurement devant des croyances limitantes pareilles.

  • Ce n’est pas mon seul problème, grommela Kana. Je travaille dur, mais je n’ai pas de talent. Mes parents ont choisi pour moi la voie que je mènerai.
  • Concentre-toi sur tes points forts. Met en place une stratégie en fonction, applique les sans faillir et ton travail fera le reste, énonça l’adolescent d’un ton bien trop professoral à son goût.
  • Le travail bat le talent quand celui-ci ne travaille pas, c’est cela ? cita la Genin avec un faible sourire.
  • Non. C’est juste que toi aussi, tu as un potentiel.

  Le jeune homme se tourna pour ne pas affronter les résultats de son compliment. Heureusement, Dozo arrivait, le sauvant de la gêne.

  • Il est Doton, glissa Kana à son oreille en se relevant. Bonjour Hiwari, comment vas-tu ?
  • Tu peux m’appeler par mon prénom si tu le souhaites, répondit la montagne.

Sarouh perçut son air interrogateur. Se sentait-il de trop en ayant vu les deux adolescents discuter ensemble ? Cette simple idée arracha un air blasé au Tsumyo qui se retint de justesse de soupirer.

  • Je vois que vous êtes tous là, déclara une voix satisfaite.

  Tout le groupe se retourna, surpris. La Jounin avait soigné son effet, apparaissant de nulle part. Sarouh se demanda si c’était un réflexe professionnel ou un simple effet dramatique qu’affectionnaient un peu trop les senseis de la Cascade.

  • Tu as obéi aux ordres, constata Kurimi sur le même ton, son regard balayant Kana et Sarouh.
  • Oui. Je vous dois des excuses pour mon comportement d’hier.

  Le Tsumyo s’inclina douloureusement. La trentenaire sembla apprécier le spectacle. En son for intérieur, le jeune homme aux cheveux bleus persistait à penser que la Jounin lui avait inutilement manqué de respect. Mais il acceptait que son comportement nuisait à la cohésion d’équipe et mettait en danger chacun de ses membres.

  • Nous allons pouvoir passer aux choses sérieuses alors.

  Sarouh se redressa, la remerciant silencieusement de ne pas s’appesantir sur les événements de la veille. Il souffrait encore de ses multiples entraînements et du puissant coup à la tête qu’il avait reçu en guise de punition. Son corps lui semblait lourd, sa concentration trop dispersée et ses raisonnements trop lents. La kunoichi qui avait soigné sa concussion lui avait assuré qu’en début de soirée, il aurait récupéré l’essentiel de ses facultés. Cela ne l’empêchait pas de nourrir un ressentiment certain envers la chef d’équipe.

  • Nous sommes dépêchés pour élucider les disparitions de plusieurs personnes

  L’ambiance s’alourdit d’un coup. La Jounin savoura son effet. Il lui était agréable de voir le sérieux de ses troupes, devina Sarouh. Les Genins la dévisageaient avec la plus grande gravité.

  • Ahagashi, un village à la limite de la juridiction de Gensou au sud-est, nous engage pour comprendre ce qui est arrivé à ces quatre personnes. Nous avons la permission de régler le souci dans la foulée.

  Le Tsumyo hocha la tête. Il n’ignorait pas ce qu’ils entendaient par là.

  • Nous avons des indices ? demanda Kana en remettant une mèche.
  • Rien de plus ne nous a été transmis. Apparemment notre client veut conserver la plus grande discrétion sur cette affaire, nous devrons voir en personne la personne responsable. Une sorte de maire.
  • Le bourgmestre, corrigea Sarouh sans y penser. Gardons nos questions pour là-bas alors. Il faudrait déterminer les points communs entre les victimes et idéalement le lieu de disparition avant de mettre en place un plan.
  • Rang de la mission ? demanda Dozo, semblant à peine concerné par l’intervention de son camarade aux cheveux bleus.
  • C, pour le moment. répondit Kurimi, un sourire malsain aux lèvres.

  Le sous-entendu était clair. Ils pouvaient à tout moment être confrontés à une menace bien plus importante que cela. Hiwari blanchit. Kana se tut. Sarouh, de son côté, doutait. Si c’était vraiment le cas, ils auraient pris des Genins plus expérimentés. Il garda le silence, déterminé à finir le voyage sans hériter d’une commotion supplémentaire. Il comprenait ce qui était attendu de la mission. Toute tentative de décrédibiliser le commandement se finirait mal. Au fond de lui, il soupirait de la naïveté de ses camarades. Un instant après, le Tsumyo se demanda quand était-il devenu aussi cynique.

  • Le voyage dure deux jours, annonça la Jounin. Je compte sur vous pour faire preuve de sérieux. Le trajet ne sera pas si aisé et de nombreuses bêtes du Yuukan représentent un danger mortel.

Nouveau silence entendu. Le Genin aux cheveux cobalts n’ignorait pas les dangers que représentaient les monstres de la région. Le souvenir de l’attaque de la caravane était encore vivace.

  • Alors, on a peur ? chuchota le colosse à côté de lui, apparemment capable de lire les expressions des autres quand ça l’arrangeait.
  • Oui. Et franchement tu devrais aussi, le vitrifia Sarouh du regard.

  Le Tsumyo essayait de rattraper son erreur de la veille en terme de cohésion d’équipe, cependant cet idiot l’agaçait. Il voyait en lui autant de compétences que de neurones et se demandait ce qu’il avait fait pour mériter un tel boulet. L’image de Chiraku s’invita dans son esprit. Aussi détestables qu’ils avaient été avec lui, ses anciens coéquipiers étaient d’un tout autre niveau.

  • Sarouh a raison, dit Kana d’une petite voix, sous le regard approbateur de Kurimi. Il y a vraiment des monstres contre lesquels nous ne sommes pas de taille. Plusieurs ninjas ont disparu dans la région il y a peu.
  • Être shinobi ne vous rend pas invincible, surenchérit la Jounin. Pour la formation…

  Le Genin aux cheveux bleus n’écoutait plus. Il laissa son esprit divaguer au fil des ennuyeuses instructions dispensées par Kurimi. Il ne ressentait aucune envie d’aller dans ce bled perdu, humide et secoué par les moustiques et autres nuisibles. Il savait qu’une chaleur moite et désagréable et des ennemis de seconde zone seraient tout ce qu’il avait à attendre du voyage. Dire qu’il devait mettre son entraînement en pause pour si peu.

Son agacement ne tint pas devant l’air ravi de Kana. Obéissant vaguement aux instructions, Sarouh se plaça à ses côtés. Il trouverait peut-être un intérêt au voyage tout compte fait.

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