Chapitre 21 - Partie 1

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Jona et moi marchons côte à côte sous les lampadaires encore chauds. L’air nocturne me rafraîchit un peu les joues, mais mon cœur reste en ébullition.

  • Merci, je souffle arrivés devant l’immeuble. Pour tout.
  • C’était un plaisir. Mais pitié, ne te frotte plus jamais contre moi comme ça, plaisante-t-il.

Il dépose un baiser léger contre ma tempe, presque tendre, toujours complice. Puis il recule d’un pas, envoie un clin d’œil joueur et ajoute :

  • Je vais tâcher de trouver quelqu’un avec qui noyer mon chagrin.

Il tourne les talons, léger, désinvolte. Je le regarde s’éloigner quelques secondes, puis je pousse la porte de l’immeuble, seule à nouveau. Je grimpe les escaliers un peu trop vite, les clés serrées dans ma main comme un talisman. Zed n’est pas encore rentré, mais il ne tardera pas.

Je veux être prête, pas apprêtée, pas décorée comme une poupée de vitrine, mais bel et bien moi. Je pousse la porte de l’appartement, pénètre dans la pénombre tiède du salon. Je retire mes chaussures du bout des pieds, et fonce vers la salle de bain.

Je dois me démaquiller, pas parce que je déteste la sensation sur mon visage, mais parce que si Zed doit m’embrasser ce soir, si ses mains glissent enfin contre ma peau, je veux que ce soit moi qu’il touche. Pas le rôle que j’ai joué.

Mes yeux brillent encore d’un feu que je refuse d’éteindre. J’attrape un coton, le produit démaquillant, et commence à effacer. Les gestes me viennent naturellement, le trait de liner s’efface, mes cils perdent leur épaisseur artificielle, ma bouche retrouve sa couleur originelle. Je me rince le visage, tapote doucement avec une serviette, force ma respiration à s’apaiser.

Après une toilette sommaire mais nécessaire du reste de mon corps, une pensée s’impose à moi, si claire qu’elle en devient évidence : quand il rentrera, il ne faut pas qu’il me voit ici, dans la salle de bain ou le salon. Je dois être dans sa chambre, car c’est là que tout est le plus susceptible de basculer.

Le souvenir de son offre cette après-midi me revient - “Peut-être que tu peux mettre tes affaires dans une de mes étagères ?” - l’excuse idéale pour aller dans cette pièce, pour feindre le jeu un peu plus longtemps, jusqu’à ce qu’il cède.

Je retourne dans le salon, ouvre ma valise sans bruit, comme on entrouvre un coffret précieux, en sors la totalité de mes vêtements, et je marche vers la chambre, pieds nus sur le parquet tiède.

Je pousse doucement la porte, sans bruit, comme si j'entrais dans un lieu sacré, un espace suspendu hors du temps, déjà chargé de ce qui pourrait advenir. La chambre me reçoit dans une semi-obscurité tiède, baignée de silence et d'attente. L’air semble plus dense ici, plus chargé, comme si chaque atome retenait son souffle en même temps que moi.

Mes yeux se posent sur le lit, ce rectangle d’intimité, d’abandon, de promesses encore muettes. Je reste là une seconde, immobile, devant cette scène encore vierge, et c’est comme si je regardais le futur, l’imaginaire, le désir, tous emmêlés dans les plis d’un drap.

Alors je respire profondément, pour ne pas trembler, pour rester dans cette tension délicieuse, dans ce suspense qu’il ne faut surtout pas hâter et reprends mon chemin. L’armoire s’ouvre sans résistance, je découvre l’étagère promise, j’y replie mes vêtements avec lenteur, avec application, et je les dispose un à un, guettant les signes de son arrivée.

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